L’étrange mansuétude du PS à l’égard du bourgmestre de Sambreville tranche avec son intransigeance avec des élu(e)s verviétois(e)s


Ainsi donc, après s’être muré dans le silence, le président du parti socialiste, Paul Magnette, dont l’avis avait vainement été sollicité auparavant, a fait répondre, par son directeur de la communication, à Samuel Sinte et Guillaume Barkhuysen, mes anciens collègues du journal qui m’a employé pendant de nombreuses années mais ne m’a jamais assez rémunéré à mon goût (air connu), que «la décision de la Cour européenne des Droits de l’homme (relative au bourgmestre de Sambreville, Jean-Charles Luperto, Ndlr) n’est pas une surprise. Elle ne constitue pas un élément nouveau par rapport à ce qui a été décidé l’année dernière».

Pour rappel, la veille, mes anciens et excellents confrères avaient révélé qu’en décembre dernier, le recours que Jean-Charles Luperto avait adressé à la Cour de Strasbourg avait été déclaré «irrecevable». Et que dès lors, après l’échec de son pourvoi en Cassation, sa condamnation à six mois de prison avec sursis pour outrage aux mœurs, prononcée par la Cour d’appel de Liège, le 29 septembre 2020, était devenue définitive… dans le plus grand secret. Car ni l’intéressé, ni son avocat, ce qu’on peut comprendre, n’avaient signalé l’échec de leur appel à la Cour européenne des Droits de l’homme; et le PS lui-même est resté dans l’apathie la plus totale.

Interrogé l’année dernière, le président du PS, Paul Magnette, avait expliqué que, dans l’attente de la décision de la Cour de Strasbourg, «personne, pas même parmi ses adversaires politiques locaux» n’avait réclamé la démission du bourgmestre de Sambreville, et qu’entre-temps, «les électeurs lui avaient renouvelé leur confiance, malgré son affaire».

Jean-Charles Luperto est condamné définitivement pour outrages aux mœurs mais, pour le PS, ses adversaires politiques ne demandent pas sa démission, et la population lui a renouvelé sa confiance. Pas de quoi s’émouvoir!

Une étrange mansuétude, dont n’avait pas fait preuve, dans le passé, le PS à l’égard de Stéphane Moreau, ancien bourgmestre d’Ans, et d’André Gilles, ancien député provincial: le premier avait démissionné du parti avant d’en être exclu, tandis que le second en avait été exclu, à la suite de leur gestion calamiteuse du dossier Nethys.

Emir Kir, bourgmestre PS de Saint-Josse, a fait l’objet d’une exclusion de trois ans, à la suite de la réception qu’il avait offerte à six maires turcs, deux membres d’un parti proche de la sinistre milice d’extrême-droite des «Loups Gris».

Benoît Hons, échevin à Neupré, a été exclu en janvier 2020 pour propos injurieux envers les gens du voyage proférés sur Facebook, notaient encore mes anciens collègues.

Quant à Alain Mathot, ancien bourgmestre de Seraing, il a démissionné du parti en mars dernier (avant d’en être exclu?), à la suite de sa condamnation pour faits de corruption.

Samuel Sinte et Guillaume Barkhuysen rappelaient aussi l’exclusion de l’ancien échevin de Charleroi Claude Despiegeleer par la commission de vigilance du PS, pour ses condamnations dans les affaires de «La Carolorégienne».

Paul Magnette utiliserait-il donc un instrument à deux poids deux mesures, qui vaut exclusion, spontanée ou forcée du Parti socialiste, à l’ensemble des mandataires condamnés, sauf pour…. Jean-Charles Luperto, bourgmestre de Sambreville?

On a connu le président du PS beaucoup plus vindicatif à Verviers, quand il s’est agi de sanctionner la bourgmestre, Muriel Targnion, et ses fidèles au sein du collège communal, qui avaient eu l’outrecuidance de vouloir écarter un président de CPAS, tout aussi socialiste qu’eux, qui se refusait à tout contrôle de l’exercice de sa fonction!

Le Boulevard de l’Empereur avait alors «fait pression» pour forcer certain(e)s des signataires de la motion de défiance à revenir sur leur parole, quelques jours après avoir approuvé l’initiative mayorale, et à mettre en place un bourgmestre alternatif, feu Jean-François Istasse, au prix d’une manœuvre dont l’illégalité avait ensuite été constatée par le Conseil d’État.

Paul Magnette avait alors fait frapper d’exclusion la bourgmestre de Verviers, et ceux qui étaient restés fidèles à leur signature, dont l’échevin des Finances, Alexandre Loffet, qui fait pour l’instant… fonction de bourgmestre, et devrait céder le témoin d’ici à quelques semaines. Sauf circonvolutions qui le feraient rentrer dans le giron du parti?

Ces exclusions, soit dit au passage, n’avaient pas respecté la procédure interne du parti socialiste, qui aurait dû d’abord faire examiner leur cas par sa Fédération verviétoise. En les envoyant directement vers la commission de discipline (par crainte d’une approbation de leur conduite au plan verviétois?), le président du PS les avait privés d’un droit de recours sans le moindre état d’âme.

Sa passivité devant le dossier de Jean-Charles Luperto n’en est que plus surprenante. Car la barque du bourgmestre de Sambreville est drôlement chargée.

L’homme, on l’a oublié, avait vu une possible carrière ministérielle avortée à la suite d’une «plaisanterie» de très mauvais goût qu’il avait mise sur pied le 21 juin 2007, en menaçant d’incendier la maison du bourgmestre de la commune voisine de Jemeppe-sur-Sambre, Joseph Daussogne.

En novembre 2014, des perquisitions sont menées à son bureau et à son domicile, dans le cadre d’une enquête pour faits de mœurs qui se seraient produits à l’été de la même année, dans les toilettes de la station-service d’autoroute de Spy, sur l’autoroute de Wallonie.

Ces faits verront la levée de l’immunité parlementaire de celui qui était à la fois député wallon et président du Parlement de la Communauté française. Et lui vaudront sa condamnation définitive, le 29 septembre 2020, après une série de manœuvres de retardement judiciaire, qui amèneront son dossier à la Cour d’appel de Liège.

Jean-Charles Luperto se défend toujours des faits d’exhibitionnisme qui lui ont valu sa condamnation. Sa défense a consisté à dire qu’il s’était rendu dans les toilettes de cette aire d’autoroute pour… des rencontres furtives à caractère sexuel!

On voit d’ici l’argument! Si tout être humain, fût-il mandataire politique, a droit à sa vie privée, et que son orientation sexuelle ne peut lui être portée à charge, pareil comportement relève à tout le moins de l’inconduite notoire qui pourrait, ou devrait, lui valoir de ne plus pouvoir exercer une fonction mayorale… qui comprend notamment des responsabilités en matière de police!

Le président du parti socialiste ne pourra pas s’abriter longtemps derrière une communication sibylline, pour justifier une passivité dont l’effet nourrira encore un peu plus le rejet de la politique. Et se révèle désastreuse pour la classe politique wallonne dans son ensemble.

Quand le vote extrême sanctionnera pareille dérive, il sera trop tard pour se lamenter!

Le Club Liégeois victime de lui-même mais aussi de l’Union belge


Le sort en est donc jeté: battu à Knokke, le Royal Football Club Liégeois a loupé la montée en division IB, qui était son objectif avoué de cette saison.

Une nouvelle fois, les «Sang et Marine» ont été victimes de leur manque d’efficacité: à la Côte, ils ont dominé entièrement la rencontre, mais ils n’ont pu inscrire qu’un seul but, tout en fin de rencontre, insuffisant pour leur éviter la défaite, et insuffisant aussi pour leur permettre de rester dans les talons de Dender, petit vainqueur, de son côté, d’un Dessel qui n’était pas vraiment motivé pour ce tour final, décisif pour une montée qu’il ne pouvait pas plus obtenir que Knokke.

Pour les sympathisants du matricule 4, le coup est rude. Pour ses responsables, le président Jean-Paul Lacomble en tête, il est urgent de tirer toutes les leçons de ce fiasco final, dont le club porte une part de responsabilité, mais une part seulement…

La première question à se poser est de savoir s’il était opportun de se séparer de l’entraîneur, Drazen Brncic, à l’amorce du sprint final. Biens sûr, le Club Liégeois traversait alors une passe difficile, mais son expérience n’aurait-elle pas été précieuse dans ce tournoi si particulier pour la montée en division IB?

L’interrogation suivante porte sur le choix de celui qui prendra l’équipe en charge la saison prochaine. Il semble bien que Gaetan Englebert ne conservera pas ce poste. Et il s’agira de ne pas se tromper.

Il faudra aussi se pencher sur le noyau qui vient de boucler le présent championnat. Le but n’est évidemment pas de tout chambouler. Mais il y a tout de même des questions à se poser, quand on voit le nombre de rencontres où le matricule 4 a eu toutes les difficultés à s’imposer, alors que le recrutement de Jeremy Perbet était censé résoudre en large partie ses difficultés offensives. L’ancien goleador du Sporting de Charleroi a peut-être répondu à l’attente, en termes de buts inscrits, mais n’a-t-il pas fait défaut au moment le plus décisif?

Le propos n’est évidemment pas de pointer l’avant-centre du doigt. Car une rencontre, c’est bien connu, se gagne à onze, douze, treize, quatorze, quinze ou seize. Et il y a peut-être divers postes sur lesquels un renforcement serait nécessaire, pour pouvoir enfin décrocher la timbale.

L’encadrement du club doit lui aussi être passé en revue. Car aussi stupides soient les règlements de l’Union belge, l’erreur qui a fait oublier d’inscrire un joueur de moins de 21 ans sur la feuille d’arbitre d’un match crucial contre Dender a été très chèrement payée. Trop chèrement peut-être: on le saura après l’appel que le président Lacomble entend poursuivre pour le principe. Et pour éviter à d’autres de subir ce que le Club Liégeois a subi.

Et là, au-delà des moyens de droit soulevés par l’avocat qu’est Jean-Paul Lacomble (et notamment le fait que Dender n’ait pas porté plainte dans les délais, ce qui, devant n’importe quelle juridiction, l’aurait fait débouter… mais pas apparemment devant le comité sportif, ou plutôt devant le «sportcomité» comme l’a opportunément prononcé le président du Club Liégeois, de l’Union «belge» de football.

Car, si les responsabilités du club ne peuvent être éludées dans l’échec de sa course à la montée, celles de l’Union «belge» n’en sont pas moins écrasantes.

Ce n’est en effet pas un hasard si c’est au lendemain de la victoire qui apparaissait décisive, face à Dender que le «sportcomité» a infligé un score de forfait pour sanctionner une erreur administrative qui avait valu une simple amende au matricule 4.

Très peu sportif, Dender, battu 3-0 dans le match incriminé où le jeune de 22 ans installé sur le banc n’était pas monté au jeu, s’était pourvu en appel, signalant que lui-même avait été sanctionné d’un score de forfait pour la même erreur lors d’un précédent match.

Le hic, c’est que la jurisprudence de l’Union «belge» de football semble bien avoir été balbutiante sur la question: amendes et scores de forfait ont constitué une jurisprudence particulièrement changeante en la matière.

Toujours est-il que le coup de Jarnac a été parfaitement exécuté: euphorique dimanche et lundi, les joueurs liégeois ont été foudroyés par la décision lundi soir, et c’est avec un moral malgré tout dans les chaussettes qu’ils se sont présentés à Knokke, où ils ont eu la mauvaise idée de s’incliner.

Désormais, rien n’empêche les pontes de la fédération de maintenir le score de forfait, ou de l’annuler, puisque rien n’empêchera Dender d’accéder à la division I B….

Tout cela ne répond pas à la question de savoir pourquoi le Club Liégeois, vainqueur de la compétition de division I A, a été le SEUL club champion de tout le football belge à ne pas accéder d’office à l’étage supérieur, et à laisser les suivants s’empoigner dans un tour final pour désigner un deuxième montant.

Pareille incongruité (le champion ne monte pas, mais bien le club… quatrième classé!) dénature complètement la compétition, mais de cela, apparemment personne ne se soucie.

Autre absurdité: ce tour final, où le Club Liégeois se retrouvait face… à trois clubs flamands, était ouvert à deux formations (Knokke et Dessel Sports) qui ne pouvaient en aucun cas monter. Quelle logique, dès lors, à organiser un tour final à quatre, susceptible de donner naissance à toutes les suspicions de collusion?

Le plus simple, dès lors qu’on accepte, en dépit de toute logique, que la meilleure équipe de la saison ne soit pas promue, aurait été de faire s’affronter le Club Liégeois et Dessel Sports soit en un test-match décisif, soit par matches-aller et retour, avec une belle éventuelle pour emporter la décision.

Tout cela, sans doute, est trop simple, pour les grands penseurs de l’Union «belge» de football, qui préfèrent faire compliqué. Et favoriser au passage les grands clubs, et tout particulier les clubs flamands, avec cette inscription, en division I B, d’équipe «U23» qu’on enverra au casse-pipes, sous prétexte d’aguerrir des jeunes footballeurs.

À tout le moins ces équipes pourront-elles descendre en fin de saison, ce qui n’était pas le cas des jeunes du Club Brugge, les seuls autorisés (tiens, tiens…) à participer au championnat de division I B, lors d’une saison précédente.

La compétition, du coup, en avait été singulièrement faussée. Celle à venir le sera également, car, selon le moment de la saison, les jeunots, même encadrés par de vieux chevaux de retour, offriront une résistance acharnée, ou se feront dézinguer dans les grands largeurs.

Bon, cette fois, la falsification de la compétition ne se fera pas à coups de montres de luxe, c’est déjà cela. Tiens, au fait, on attend toujours les mesures d’assainissement que l’Union «belge» de football devait prendre après la révélation de ce scandale. Il est vrai qu’il lui faudrait faire preuve de courage politique….

Pourquoi pas des moyens publics urgents pour nettoyer les berges et les lits de la Hoëgne et de la Vesdre?


On ne soulignera jamais assez le dévouement des bénévoles qui, chaque semaine, répondent aux appels qui leur sont lancés, pour venir débarrasser les berges de la Hoëgne et de la Vesdre des multiples déchets qui y ont été déposés par les crues catastrophiques de la mi-juillet.

C’est un travail de fourmis qui a été ainsi entrepris, au point d’ailleurs, comme le révèle un reportage de Vedia, la télé régionale verviétoise, certain(e)s d’entre eux (elles) se sont ainsi surnommé(e)s «Les fourmis de la Hoëgne».

https://www.vedia.be/www/video/info/environnement/des-fourmis-sur-les-berges-de-la-hoy-gne-_106698.html

Si l’on peut, et qu’on doit, être admiratifs pour les bénévoles qui s’activent ainsi de semaine en semaine, il paraît évident que leurs efforts ne suffiront pas à débarrasser les rivières des nombreux débris qui encombrent non seulement leurs berges mais aussi leurs cours. On ne dénombre ainsi plus les arbres qui gisent au milieu de la Vesdre et qui, en cas de nouvelles pluies exceptionnelles, seront à nouveau déplacés et viendront éventuellement s’accumuler sous les tabliers de certains ponts, accentuant ainsi encore la montée des eaux.

Une question se pose aussi: les risques pris par ces bénévoles sont-ils couverts par leurs assurances familiales, ou des assurances collectives ont-elles été souscrites pour faire face à tout problème éventuel?

Ce qui interpelle surtout à ce stade, c’est le désintérêt apparent des pouvoirs publics pour ce problème.

Quels pouvoirs publics? Pas les communes concernées, bien entendu, dont les services techniques ont largement souffert des inondations qui ont frappé indifféremment infrastructures publiques et bâtiments privés. Les bourgmestres concerné(e)s ont suffisamment souligné la solitude dans laquelle ils avaient été laissés face à la catastrophe: aujourd’hui, ils et elles ne sont pas plus en mesure de prendre cet indispensable travail de curage à bras-le-corps.

En principe, la gestion des cours d’eau est du ressort de la Région wallonne: on devrait donc s’attendre à la voir s’activer pour curer, et approfondir le lit des rivières avant que les pluies hivernales ne forcent à remettre l’opération aux calendes grecques. On plaidera sans doute que le ministère wallon des Travaux est déjà lui-même absorbé par la remise en état de nombreuses voiries, et que le recours aux entreprises privées passe par une procédure d’appel d’offres, par définition plus longue, qui doit peut-être être engagée par les communes sinistrées elles-mêmes? En pareil cas, une procédure d’urgence ne pourrait-elle être définie pour permettre d’intervenir vite et bien?

Et puis si l’armée a été engagée avec succès pour apporter une aide d’urgence aux sinistrés, ne pourrait-elle pas, elle, mettre en œuvre des moyens pour parer au plus pressé? De la même manière, la Protection civile dispose de moyens techniques déployés au plus fort des catastrophes, mais qui sont ensuite stockés dans des hangars, en attendant les prochains événements dramatiques. Là aussi, cela ne ferait-il pas sens de dépêcher des hommes et du matériel, pour au moins enlever tout ce qui peut faire obstacle à l’écoulement naturel de l’eau?

Reste un détail compliqué, il est vrai: l’armée et la Protection civile dépendent du pouvoir fédéral, et celui-ci ne peut les engager sans être sûr que des contestations ne viendront pas le contrarier, ici venant du nord du pays…

La Hoëgne, la Vesdre, et les rivières en crue en juillet dernier resteront ainsi en l’état pour des semaines et des mois encore. On croise les doigts pour que l’hiver ne soit pas caractérisé par des chutes de neige ou des pluies abondantes. Sans quoi de nouveaux dégâts seront à déplorer…

Inondations catastrophiques dans la vallée de la Vesdre: revoir le passé pour baliser l’avenir


Alors que les vallées de la Vesdre, de la Hoegne ou de l’Ourthe portent encore, pour un temps encore assez long, les stigmates des inondations catastrophiques de la mi-juillet, une enquête judiciaire vise à désigner des responsabilités humaines dans ce désastre, et une commission d’enquête parlementaire est réclamée pour analyser les failles éventuelles du système d’alerte, de la gestion des barrages, et de l’orgàisation des secours.

Souvent, le barrage d’Eupen est pointé du doigt, pour n’avoir pas suffisamment délesté avant le début des pluies diluviennes qui ont fait rage sur l’ensemble du bassin, quand bien même pareil délestage préalable aurait sans doute déjà gonflé le flot. Il appartiendra aux analystes de s’exprimer à ce propos.

Inondations périodiques

Mais face à pareille catastrophe, il est aussi utile de se repencher sur le passé, notamment pour voir si le déchaînement des éléments que nous avons connus le mois dernier était inédit, et si les barrages, à partir du moment où ils ont été construits, ont été utilisés à bon escient pour réduire l’impact des inondations.

C’est ce qu’a fait l’excellent historien Paul Delforge, sur le site de l’institut Jules Destrée, et cr texte (http://www.institut-destree.eu/wa_files/2021-08-10_paul-delforge_barrage-vesdre.pdf?fbclid=IwAR3y2vDMwWjKX2gZ_27FhJIVKLTwcNMubVoBJytCLU0vlz9eD1fAYlLvolw) mérite à coup sûr l’examen.

On y apprend, notamment, que les inondations de la vallée de la Vesdre, pour n’être peut-être pas aussi dévastatrices que celles de cet été, ne sont absolument pas exceptionnelles.

« De la vaste documentation qu’il a rassemblée sur les périodes les plus anciennes, Remacle J. Detrooz remarquait déjà en 1856 combien les crues avaient été nombreuses dans l’Histoire, celle du 15 janvier 1643 ayant particulièrement marqué les esprits » écrit notamment Paul Delforge.

« Le 10 août 1498, précise-t-il, le pont en bois de Hodimont fut entraîné par les eaux. Il fut alors remplacé par un pont en pierre (pont des Récollets). Le 2 juillet 1723, la Vesdre qui s’est gonflée d’un coup fond avec tant de violence sur la digue du moulin qu’elle parvient à l’entraîner. La manufacture de la laine cesse toute activité faute d’eau dans le canal ; la même catastrophe se reproduit deux ans plus tard, rapporte un autre chroniqueur. Les 11, 12, 13 décembre 1740, des crues extraordinaires font déborder les rivières. Il y a plusieurs morts. Au début du XIXe siècle, la Vesdre se déchaîne encore à plusieurs reprises, par exemple en 1826, provoquant de forts dégâts sur la route de la Vesdre en construction. Le souvenir des débordements de 1803 (montée des eaux de trois mètres en une demi-heure à Dolhain) reste vivace quand se succèdent trois inondations majeures (montée du niveau d’un mètre et demi en quatre à cinq heures) le 2 mars 1843, le 15 août 1844 et surtout le 31 janvier 1850 », poursuit l’historien. La rapidité de la montée du flot en 1803 notamment n’est pas sans évoquer les événements récents.

Un but précis de régulation!

Surtout, rappelle Paul Delforge, les barrages, et plus particulièrement celui de la Gileppe (photo), n’ont pas été construits dans un souci de maîtrise des inondations , ni non plus de distribution d’eau potable, qui est aujourd’hui leur fonction essentielle, mais dans un souci de régulation du débit, afin d’assurer en été un niveau d’eau suffisant à la florissante industrie lainière verviétoise, établie le long de la Vesdre.

Plus tard, en l’une ou l’autre occasion, il a ensuite été constaté que le stockage de millions de mètres cubes permettait d’éviter ou d’atténuer l’impact d’inondations, mais ce n’était nullement le but premier des ouvrages d’art, insiste l’historien.

Autre élément à noter: des écologistes avant l’heure ont incriminé, au XIXeme siècle, l’assèchement des marais de l’Hertogenwald, qui ne jouaient plus ainsi leur rôle « d’éponge naturelle » et un procès sera même intenté à l’État belge par une commune de la vallée, après une inondation. En vain d’ailleurs…

Paul Delforge rappelle aussi qu’un système de pompage a permis de maîtriser les crues de la Meuse, après l’inondation historique de 1926, dont des bâtiments du centre de la Cité Ardente portent encore la trace. Rien de tel n’a été prévu pour la vallée de la Vesdre, et dans celle de l’Ourthe, comme nous l’avons noté, le projet de barrages écrêteurs n’a jamais été concrétisé. Trop cher estimait-on à l’époque. Le coût des indemnisations à assumer aujourd’hui forcera peut-être à revoir certaines positions…

Et on voudrait que la politique intéresse quelqu’un?


Édifiante histoire que celle racontée, ce jour, dans «L’Avenir Verviers» par mes anciens collègues: un agriculteur, à qui, à la suite de travaux routiers, s’est vu exproprier une bande de 13 mètres de long sur 1,3 de large, pour conduire les eaux de pluie à un bassin d’orage de quelque 3000 mètres carrés, attend depuis neuf ans d’être indemnisé! (https://www.lavenir.net/cnt/dmf20210712_01596950/neuf-ans-qu-il-attend-d-etre-indemnise)

Retard normal de l’administration? Le délai paraît fort long, et pour cause, à l’intéressé, qui s’est adressé à l’ancien bourgmestre de sa commune. Lequel, à l’en croire lui a d’abord expliqué qu’il fallait attendre le versement de subsides, puis a incriminé une notaire, qui n’aurait pas fait mesurer précisément ce fameux bassin d’orage. N’étant pas tombé de la dernière… pluie, l’agriculture a contacté cette notaire, qui lui a expliqué que pour faire mesurer ce bassin, il fallait que la commune lui fasse parvenir de l’argent pour payer le géomètre, et que cette somme devait donc être provisionnée. Ce qui n’a jamais été fait.

Le temps passant, l’agriculteur, qui n’est pas seul dans le cas, s’est à nouveau inquiété. Il s’est alors entendu dire qu’il ne toucherait… rien. Ce qui reviendrait à dire qu’un pouvoir public peut s’approprier gratuitement un bien privé?

Un changement de titulaire au fauteuil mayoral aidant, l’homme est revenu à la charge. Et la nouvelle détentrice de l’écharpe mayorale lui a expliqué… n’être au courant de rien.

Être bourgmestre ne se limite pas à ceindre une écharpe lors de cérémonies…

On veut bien la croire sur parole. Mais dans sa fonction, n’aurait-on pu attendre d’elle qu’elle consulte le dossier, ou interroge le service concerné, pour donner une réponse plus précise au contribuable qui l’avait interpellée? Car entre-temps, comme il le précise, l’agriculteur reçoit chaque année de l’administration fiscale une taxe foncière sur un bien dont il a perdu une partie de la jouissance…

Les politiques se plaignent régulièrement du désintérêt des citoyen(ne)s et notamment des jeunes pour la politique et pour la chose publique. Ce qui n’empêche pas nombre d’entre eux de s’accrocher à des mandats, dont l’augmentation sérieuse des rémunérations, il y a quelques années, était censée leur permettre de s’attacher à la chose publique. Elle semble au contraire, pour un certain nombre d’entre elles et eux, s’apparenter à une rente de situation.

Le vote obligatoire en Belgique évite de connaître la désaffection catastrophique dans les urnes qu’a encore connue la France à l’occasion du dernier scrutin régional. Avec pour résultat que les décisions prises par des mandataires aussi mal élu(e)s sont de plus en plus contestées par des citoyen(ne)s qui n’ont plus envie d’exprimer leur suffrage. Mais le taux d’abstention va croissant chez nous aussi. Et même s’il faudra bien se traîner jusqu’aux isoloirs, pour les moins concerné(e)s d’entre eux, comment voudrait-on que les électrices et les électeurs s’intéressent encore à la chose politique, quand les élu(e)s manifestent pareille indifférence à leur endroit?

Le lobby électrique impose sa politique de mobilité au gouvernement bruxellois


Ainsi donc, après avoir émis les idées de l’instauration d’une redevance de circulation sur le territoire de la région-capitale, puis de l’achat de terres agricoles en Wallonie pour nourrir sa population urbaine, le gouvernement bruxellois a sorti un nouveau lapin de son chapeau en décidant, tout seul comme un grand, que les véhicules à moteur thermique ne pourraient plus circuler dans ses rues est avenues, à partir de 2030 pour ceux qui sont alimentés au moteur diesel, et dès 2035 pour ceux qui fonctionnent à l’essence.

L’objectif déclaré est d’améliorer la qualité de l’air dans la capitale, ce qui est un objectif louable en soi. Où la démarche devient cependant plus dérangeante, c’est par l’option exclusivement électrique qui est affichée par les excellences bruxelloises. Aucun véhicule hybride n’échappera ainsi au couperet. Pas plus que les véhicules circulant au CNG. Et encore moins ceux qui rouleront à l’hydrogène, puisque l’a priori adopté par le gouvernement Vervoort est celui que seuls les véhicules lourds type bus, pourront être mus par des moteurs à hydrogène. C’est exactement la thèse du lobby électrique, qui n’a jamais démontré pourquoi des moteurs faisant mouvoir des véhicules lourds ne pourraient pas être doublés de versions plus légères pour des véhicules moins pondéreux. D’habitude, on part pourtant du principe que qui peut le plus peut aussi le moins.

Déjà les réactions se multiplient, face à pareille politique punitive, dont tous les spécialistes s’accordent à dire qu’elle est la moins appropriée pour convaincre le bon peuple d’adopter des comportements plus compatibles avec les objectifs de réduction des gaz à effets de serre et par voie de conséquence du réchauffement climatique.

Ce qui est étrange, c’est que personne au gouvernement bruxellois, et notamment parmi les ministres écologistes, ne soulève, à cette occasion, les conditions inhumaines dans lesquelles les minerais rares nécessaires aux batterie électriques sont extraits, notamment en République Démocratique du Congo. Comme écrit récemment dans ce blog, les véhicules électriques ne sont pas verts, mais rouges du sang des travailleurs, et notamment des enfants, qui meurent chaque jour dans cette extraction.

Au risque de me répéter, la filière automobile électrique ne serait acceptable que si sa production passait par l’imposition de conditions de travail décentes et sécuritaires et surtout de salaires décents, à tous ces mineurs artisanaux. Le problème est que cela multiplierait par trois ou par quatre le prix de ces batteries électriques, et entraînerait encore à la hausse les prix déjà prohibitifs de ces véhicules prétendument écologiques. Il est beaucoup plus facile de protester, à juste titre, contre les atteintes aux droits des personnes LGBTI en Hongrie: cela ne demande aucun effort, même si la protestation restera largement vaine.

On passe bien entendu sous silence le fait que ces batteries sont impossibles à recycler, et que les minerais rares nécessaires à leur production seront rapidement éliminés: le lobby électrique ne s’embarrasse évidemment pas de telles considérations, pourvu que ses bénéfices soient maximisés à court et à moyen terme.

Autres problèmes soulevés par le bon peuple mais ignorés par celles et ceux qui le gouvernent: l’absence de bornes électriques pour le rechargement, et les problèmes inextricables que cela suscitera non seulement dans la capitale, mais, par exemple, sur les autoroutes des vacances, lorsque des vacanciers devront s’arrêter aux mêmes endroits pendant une, deux, ou trois heures, pour recharger les batteries épuisées de leur véhicule.

Et puis on n’évoque que pour mémoire le problème de l’approvisionnement en électricité, une fois que les centrales nucléaires auront fermé leurs portes et que la demande en électricité explosera massivement. La solution passera-t-elle par la multiplication de centrales au gaz? Il faudrait, il est vrai, les implanter en Flandre ou en Wallonie, et sans doute dira-t-on à Bruxelles que la purification de l’air dans la capitale exige bien une solidarité régionale. Mais l’effet sur le réchauffement climatique en sera d’autant réduit…

Un gisement d’emplois pour la Wallonie?

Les inquiétudes des nombreux navetteurs qui se rendent chaque jour dans la capitale sont également largement ignorées. Leur restera-t-il à s’adapter ou à renoncer à leur emploi? Le ministre wallon de la Mobilité, Philippe Henry, évoque à l’horizon 2035 un changement des modes de transport, et notamment un développement mirifique de l’offre ferroviaire et de transport en commun vers Bruxelles. Mais Philippe Henry a déjà un long passé de ministre écologistes derrière lui. Et on sait que certaines de ses promesses ne se sont jamais réalisées, voire se sont muées en fiasco, comme celles relatives aux certificats verts.

À l’inverse, les excellences bruxelloises, dont les initiatives impétueuses, prises sans concertation avec leurs homologues flamands, wallons, et germanophones, commencent à susciter l’agacement, pour ne pas dire plus, pourraient ainsi se tirer une balle dans le pied. Car nombre d’emplois de toutes ces navetteuses, et tous ces navetteurs qui partent chaque jour pour la capitale pourraient tout simplement être… rapatriés vers la Wallonie. Tant il est vrai que l’administration centralisée a fait son temps. Et que le télétravail imposé par la pandémie a démontré, si besoin en était, qu’une administration ou une entreprise établie à Verviers, La Louvière, Bastogne, ou Ciney, peut être tout aussi efficace qu’une entreprise ou une administration établie à Bruxelles.

Dans le cavalier seul adopté par Bruxelles, la Wallonie pourrait retrouver largement son compte. En réduisant drastiquement les déplacements quotidiens de dizaines de navetteurs. Et contribuant ainsi largement, sans leur imposer des dépenses pharamineuses, à la lutte contre le réchauffement climatique.

Le retour de Seraing en D1A: sympa… mais de quel Seraing parle-t-on?


L’événement footballistique du week-end, dans notre petite terre d’héroïsme, a été la dégelée infligée par le RFC Seraing au SK Waasland-Beveren, qui condamne à la relégation le club waeslandien, et ramène du coup les Sérésiens au plus haut niveau du football belge, qu’ils ont quitté il y a un quart de siècle.

Ce résultat fait que la saison prochaine commencera à nouveau avec quatre clubs wallons au sein de l’élite: le Standard, le Sporting de Charleroi, l’AS Eupen (que je qualifierais plutôt de club germanophone… ou qatari), et donc, à la place de l’Excelsior Mouscron, le RFC Seraing, ou plus exactement le FC Seraing, si l’on s’en tient à la règle qui impose qu’un titre de «société royale» ne s’obtient qu’en fonction de conditions strictes (50 ans d’existence et agrément du Palais Royal), et qu’il ne peut se transmettre au gré de cessions à l’encan, dont le club de l’ancienne cité du fer a fait plusieurs fois l’objet au cours des dernières années.

Si l’on s’en tient aux faits, le RFC Seraing, club créé en 1905, a connu une existence chahutée marquée, au cours du dernier demi-siècle, par une grève des joueurs en 1969; par l’arrivée, l’année suivante, du défunt bourgmestre de Seraing, Guy Mathot, dans le comité de direction du club, ce qui lui attirera, plus tard, divers ennuis judiciaires; par la faillite du club, le 18 juin 1984, et sa reprise, en 1990, par le défunt entrepreneur bruxellois Gérard Blaton. Lequel fera flamber le Pairay, en qualifiant notamment le club pour une coupe d’Europe, avant de jeter l’éponge: le 2 avril 1996, le RFC Seraing est absorbé dans la fusion avec le Standard de Liège, et son matricule, le 17, disparaît pour toujours.

Feu le notaire Paul Plateus, fils de François Plateus, dirigeant historique du club, ancien secrétaire général du RFC Seraing, avait lutté jusqu’au bout pour faire échec à cette fusion, qui «tuait» son club. Mais comme le nabab bruxellois disposait de la totalité des parts de la coopérative, il n’avait eu que ses mots à opposer à une fusion qui équivalait à une mise à mort.

Restait le stade du Pairay, désormais veuf: il ne restera pas longtemps inoccupé. La Royale Union Liégeoise, née de la fusion de Bressous (matricule 23) et de Jupille, sous l’impulsion de l’ancien secrétaire du CPAS de Liège, Michel Faway, vient y planter ses pénates, et, en hommage au lieu, modifie son nom: le RFC Seraing-RUL voit le jour. Le 1er juillet 1996, il adaptera son nom: le RFC Sérésien accueille au sein de son équipe dirigeante d’anciens joueurs du RFC Seraing. En troisième division, le club se reconstruite patiemment jusqu’à l’irruption de Bernard… Serin.

Bernard Serin est une personnalité hors du commun. Il est arrivé en région liégeoise dans les bagages d’Usinor, et a été placé à la tête de Cockerill-Sambre quand le groupe sidérurgique lorrain a repris la sidérurgie wallonne.Tenu à l’écart du comité de direction du géant sidérurgique Arcelor, né de la fusion, le 18 février 2002, d’Usinor, de la luxembourgeoise Arbed, et de l’espagnole Aceralia, il claque ensuite la porte et reprend, avec l’aide de capitaux liégeois, Cockerill Mechanical Industries (CMI), la filiale la plus boîteuse du bassin sidérurgique liégeois. Il la transforme rapidement en success story wallonne et internationale: le groupe, qui a pris aujourd’hui le nom de John Cockerill, rayonne dans le monde entier.

Parallèlement à cela, cet hédoniste, originaire de l’Hérault, est devenu à la fois Lorrain et liégeois, et il est passionné par le football. Entré dans le comité du FC Metz en 2006, il en devient le vice-président exécutif en 2008, puis président en 2009, succédant au mythique Carlo Molinari. Bernard Serin préside toujours le club messin, qui, sous sa conduite, a connu des fortune diverses, faites de descente en Ligue 2 puis de remontée en Ligue 1, où il figure toujours aujourd’hui.

Cet homme d’affaires avisé imagine alors rapidement un partenariat entre le club lorrain et… qui au fond?

Dans un premier temps, le 1er juillet 2013, il reprend le RFC Sérésien, mais le club évolue alors en Iere provinciale liégeoise: la mariée n’est pas assez belle pour en faire un partenaire du FC Metz.

Un an plus tard, c’est le tour de passe-passe: le 1er juillet 2014, Bernard Serin rachète le matricule du club de Boussu-Dour, club lui-même issu d’une fusion, mais à bout de souffle. Sous le numéro 167, le club, baptisé Seraing United, évolue alors en division II.

Douze mois plus tard, le 1er juillet 2015, le club change à nouveau de nom: selon le site du club, il redevient le «RFC Seraing».

Petit problème, sauf à donner à la lettre «R» une autre dénomination, il ne peut en aucun cas exciper du titre de «Royal» puisque Seraing United n’avait pas hérité de cette distinction, non plus que Boussu-Elouges et Dour, clubs passé à la trappe de cette opération, de même que Bressoux, Jupille, et la Royale Union Liégeoise, dont le souvenir ne subsiste plus que chez les historiens du football belge.

Le phénomène n’est pas unique dans le football belge: pour ne plus parler du RWDM qui unit trois clubs disparus (le Racing de Bruxelles, le White Star, et le Daring de Molenbeek) qu’on a rebaptisé abusivement «Daring» à chaque fois qu’il a rencontré l’Union Saint-Gilloise, le Beerschot, par exemple, failli lui aussi, ne s’est tiré d’affaire qu’en rachetant le matricule de Wilrijk, et n’a gardé que pour un temps le nom de Beerschot-Wilrijk qui correspondait exactement à sa situation «matriculaire»

Le partenariat entre les deux clubs peut alors s’organiser: Seraing devient la succursale du FC Metz.

Un partenariat «gagnant-gagnant»? Pas immédiatement, puisque, avec la réforme du football belge, le FC Seraing s’est retrouvé en division IA francophone, où il a figuré sans briller jusqu’à l’année dernière, quand à la faveur d’un replâtrage de bric et de broc de la division I B (avec notamment l’intégration brillamment ratée des U23 du Club Brugge), le matricule 167 a bénéficié de circonstances administrative favorables, avec le désistement de plusieurs clubs, pour acquérir, sur le tapis vert, le droit de jouer à l’étage supérieur cette saison.

On connaît la suite: les renforts heureux venus de Lorraine, avec surtout le buteur Georges Mikautatdze, 22 buts cette saison, qui va repartir pour Metz; le début de championnat tonitruant; puis la lutte pour conquérir la deuxième place dans le sillage de l’intouchable Union Saint-Gilloise, placée, elle, sous tutelle britannique.

La conclusion de cette campagne est tombée dimanche, et quelques centaines de supporters ont fêté les «Rouge et Noir» à leur retour au Pairay.

Le plus dur commence maintenant. D’abord pour reconstruire une équipe, car Metz, qui a besoin de toutes ses plumes pour voler, reprendra ses meilleurs éléments, pour en amener d’autres, inexpérimentés, sur les hauteurs sérésiennes. Le problème, c’est qu’en division IA, les débutants n’ont pas toujours l’occasion de se faire les dents. Et le récent match de coupe de Belgique entre Seraing et le Standard est là pour montrer l’écart qu’il lui reste à franchir pour éviter de faire un rapide aller et retour.

Et puis reste la quadrature du cercle que Seraing, même à la grande époque des Bocande, Oblitas, Rojas, Bertelsen, Kabongo ou Lukaku (Roger, pas Romelu…) n’a jamais pu résoudre: hors les derbies liégeois, face au Standard ou au RFC Liégeois alors toujours en division I, ou à part la visite du Sporting d’Anderlecht ou du Sporting de Charleroi, les travées du Pairay sont le plus souvent restées désespérément vides.

Si on peut être heureux de cette promotion, et féliciter le FC Seraing pour ce résultat, ce n’est pas faire preuve d’un pessimisme exagéré de dire que son avenir reste aussi sombre que les fumées qui, jadis, sortaient de ses hauts-fourneaux aujourd’hui éteints…

Il y a cent ans naissait Paul Brusson, héros et humaniste


Parmi les innombrables personnes que j’ai rencontrées au cours de ma carrière professionnelle et para-professionnelle, il en est peu qui m’ont laissé une impression aussi profonde que Paul Brusson.

À l’occasion du centième anniversaire de sa naissance, son petit-fils, Milan Jovic, qui l’a accompagné si souvent au camp de concentration de Mauthausen, où il avait été déporté à l’âge de 19 ans, a écrit un texte que je me fais un plaisir et un devoir de reproduire ici. Afin que son souvenir subsiste

PAUL BRUSSON – LE CENTENAIRE D’UN PASSEUR DE MEMOIRE

Il y a 100 ans, naissait à Ougrée Paul Brusson, le 29 avril 1921.  Comment mieux caractériser cet homme en disant de lui qu’il fut un homme engagé, se battant pour ses idées, son idéal, et pour servir ses concitoyens.

Paul Brusson fut déporté dans les camps de concentration nazis de 1942 à 1945.  A la libération, il s’engage dans la police communale, gravit les échelons un à un pour devenir le premier Commissaire en Chef de Liège après les fusions de communes.  Il consacra l’essentiel de son temps libre, une fois pensionné, à transmettre aux plus jeunes ce que fut l’horreur des camps nazis et ce à quoi peut conduire un absolutisme, une dictature, fusse-t-elle de droite ou gauche. 

En 2013, l’Athénée Royal de Montegnée, avec laquelle il participa à de nombreux voyages sur les lieux de la barbarie nazie, devint l’Athénée Royal Paul Brusson.  Membre fondateur des Territoires de la Mémoire, dont le parcours concentrationnaire est toujours accessible à la Cité Mnema, il s’éteint le 27 octobre 2011.  

En ce temps troublés, ou chaque faute politique est guettée, soulignée, il est bon de rappeler que son décès a créé un émoi commun toutes tendances politiques et confessionnelles confondues.  Puisse son travail de passeur de mémoire se perpétuer à travers les générations à venir

Je n’ai rien à ajouter à ce témoignage

La chute de Stéphane Moreau ou la fin d’un système


La presse a fait état, ce matin, d’une quasi non-information: l’avocat de Stéphane Moreau, l’ancien patron tout-puissant de Publifin et de Nethys, a fait savoir que son client niait «avec énergie» les faits mis à sa charge de détournement par personne exerçant une fonction publique, de faux, usage de faux, escroquerie, et d’abus de biens sociaux. Le rappel de la présomption d’innocence dont bénéficie chaque inculpé a toute son utilité, mais il faut bien avouer que le contraire eût stupéfié: que le ci-devant bourgmestre d’Ans reconnaisse sa culpabilité sur toute la ligne. Les arguments brandis par son défenseur ne répondent par ailleurs guère (cf. ci-dessous) aux préventions auxquelles il doit faire face.

La remarque vaut aussi pour Pol Heyse, ancien directeur financier de Nethys, et ancien président du conseil d’administration des Éditions de l’Avenir, où ce personnage pénétré de sa grande valeur a fait la preuve à la fois de son incompétence (invité à plusieurs reprises, d’abord par l’ancien administrateur-délégué, Quentin Gemoets, puis par les délégués du personnel, à venir préciser un projet d’entreprise qu’il avait vaguement brossé le soir même de l’annonce du rachat du groupe à Corelio par l’intercommunale liégeoise Tecteo, non seulement il n’a jamais répondu à l’invitation, mais il n’a même pas accusé réception. Plus tard, on s’apercevra qu’il n’avait aucun projet à exposer dans un secteur où il ne connaissait que dalle ) et de son mépris pour le personnel: assistant à une réunion du conseil d’entreprise comme invité, il s’écriera, en prenant connaissance du nombre de personnes en congé de maladie de longue durée, que c’était «encore pire que dans une intercommunale» (sympa pour le personnel de Resa, par exemple…) et que les gens malades souffraient d’«agueusie, c’est-à-dire de manque de goût pour le travail».

Terreur, séduction et achat

Mais revenons à Stéphane Moreau, dont la chute est d’autant plus spectaculaire qu’il a, pendant quasiment un quart-de-siècle, pratiqué une politique très efficace de domination, par l’achat des personnes dérangeantes ou potentiellement dérangeantes, par la séduction, et parfois par la menace.

L’homme a rodé sa méthode avant de s’imposer comme le patron de l’ancienne Association Liégeoise d’Électricité (ALE) et de son réseau de télédistribution Teledis, ancêtres de Tecteo, rebaptisée ensuite Publifin puis Enodia, et de Nethys, la société anonyme filiale qu’il avait créée pour échapper à un contrôle wallon qu’il avait astucieusement évité.

Avant cela, au début des années 1990, celui qui était alors premier échevin à Ans, exerçait la fonction de secrétaire général de l’Intercommunale d’Incendie de Liège et Environs (IILE).

Le contexte, alors, était tendu: l’IILE avait succédé au Service Régional d’Incendie de Liège (SRIL), que la ville, en état de faillite, n’était plus en état de gérer. Le SRIL avait, comme d’autres administrations liégeoises, été confronté à un plan d’austérité, que les hommes du feu liégeois, gonflés à bloc, avaient refusé. L’épisode donnera lieu à une confrontation insolite entre pompiers et policiers de la Cité Ardente, repoussés par les autopompes des grévistes. L’épisode télévisuel fera pratiquement le tour de la terre!

Au sein de l’IILE, des communes de la périphéries… dont Ans, ne souhaitaient pas éponger les dettes du SRIL. Et les syndicats étaient toujours aussi remontés. Qu’à cela ne tienne: les délégués les plus combatifs disparaîtront bientôt de la circulation, notamment par la grâce d’un engagement au service du premier échevin ansois…

Devenu patron de Tecteo, Stéphane Moreau avait pris de la bouteille. Là aussi, il aura un plan de rationalisation à imposer. Et il le fera par la force. Une autre vidéo, celle où il enguirlande des agents en grève et leurs permanents syndicaux est elle aussi passée à la postérité.

C’est aussi à cette époque qu’il se rend coupable d’un abus de pouvoir étrangement ignoré par l’autorité de tutelle: quand des grévistes occupent le site d’antenne de Teledis, à Ans, et perturbent ainsi le réseau de télédistribution, le patron de Teledis, Stéphane Moreau, s’adresse au bourgmestre d’Ans, Moreau Stéphane, lequel mande sa police communale pour aller déloger les grévistes du site d’antenne, un site par essence privé. Vous avez dit confusion des rôles?

Même attitude à l’égard de la presse critique: des boycotts publicitaires frapperont pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois Vers l’Avenir et Le Soir, après des articles portant sur la multitude de ses mandats, ou qui commencent à interroger sa gouvernance à la tête de l’intercommunale.

Mais l’homme sait aussi se faire charmeur. Il crée le «Voo Rire Festival», et ce festival du rire de Liège lui permettra de nouer de nombreuses relations, auprès des artistes reconnaissant, après de nombreux invités et puis parmi la presse, liégeoise essentiellement. Au banquet final, parmi les quelques «happy few» invités au terme d’un apéritif largement ouvert, on trouvera régulièrement des représentant(e)s de la presse principautaire, dont l’un, plus tard, sera choisi pour tenter, en pure perte, de mettre la rédaction de L’Avenir au pas, et qui a effectué ces derniers jours sur une chaîne d’information continue belge une forme assez remarquable de volte-face par rapport à son ancien protecteur. Parmi les habitués, il y aura aussi des représentants de la «grande presse» dont l’interviewer indéboulonnable d’une chaîne privée, récompensé par une obscure mission de conseiller du grand patron, toujours dans le cadre du rachat des Éditions de l’Avenir par Tecteo (cf. ci-dessous).

On reconnaîtra à Stéphane Moreau une redoutable habileté manœuvrière, quand il soustraira l’intercommunale Tecteo au contrôle wallon, en excipant la présence, parmi les communes affiliées, de Fourons, historiquement desservie par l’ALE, et en plaidant avec succès que l’intercommunale, ainsi bicommunautaire (elle sera même tricommunautaire, plus tard, avec l’adhésion de la commune d’Uccle) échappe au contrôle de la Région wallonne.

Au Parlement wallon, Bernard Wesphael, membre d’un groupe écolo singulièrement écorné, tentera alors de faire adopter un décret pour imposer, malgré tout un contrôle sur Tecteo, mais sa proposition, venant de l’opposition, ne sera jamais retenue…

Ainsi assuré d’une totale liberté d’action, Stéphane Moreau développera Nethys avec d’autant plus de facilité que les plantureux bénéfices de Resa, le réseau de distribution d’électricité qui a succédé à la défunte Association Liégeois d’Électricité, rejointe plus tard par l’Association Liégeoise du Gaz (ALG) , lui permettront de financer notamment l’onéreux développement du réseau câblé de Voo, héritier de Teledis.

Plus tard, son sens de l’ingéniérie financière le poussera à transférer l’argent des pensions des agents de l’ALE, et de plusieurs intercommunales liégeoises dans un Fonds de pension, Ogeo, dont certains investissements se révéleront hasardeux, par exemple en République démocratique du Congo ou surprenants, comme ces investissements immobiliers à Anvers, révélés par une excellente enquête de nos confrères du Vif, dont l’une des retombées sera ce soutien incongru de la N-VA aux élus socialistes de la Chambre, pour faire obstacle à la demande de levée d’immunité parlementaire de l’un d’entre eux, le député-bourgmestre de Seraing, Alain Mathot (cf. ci-dessous), poursuivi dans un dossier de corruption. Les derniers retraités de l’Association Liégeoise d’Électricité, frustrés d’avantages accordées à leurs prédécesseurs tandis qu’eux étaient toujours en activité, tenteront, mais en vain, d’obtenir de la Justice qu’elle force Tecteo à respecter les engagements souscrits par l’ALE.

Collusion politique

Avoir de l’ambition, en tant que chef d’entreprise, peut être collectivement positif. C’est d’ailleurs la parade, aujourd’hui, de Stéphane Moreau, qui, comme si c’était une circonstance atténuante à l’égard des préventions mises à sa charge, et dont, pour l’heure, il est toujours présumé innocent, plaide l’extraordinaire développement de Nethys qu’il a assuré essentiellement, on le répète, avec de l’argent public, provenant de l’intercommunale Publifin, ex-Tecteo et future Enodia, et de sa filiale Resa.

Mais, à force d’échapper à tout contrôle, l’ambition devient débridée. Celle de Stéphane Moreau, sur le plan politique, le conduira à «tuer le père». Michel Daerden, l’inamovible mayeur ansois, est sur le déclin, quand il se sent pousser dans le dos par son peu fidèle premier échevin. Il croit toujours pouvoir mobiliser ses soutiens traditionnels, et lance contre le renégat une motion de défiance… qui se retourne contre lui. Et il ne trouve pas le moindre soutien à la Fédération liégeoise du parti socialiste, où ses manières autoritaires et sa dérive suscitent de plus en plus de réticence. Stéphane Moreau devient donc premier citoyen dans sa commune du plateau liégeois.

Avec le bourgmestre de Liège, Willy Demeyer, président de la Fédération liégeoise du parti socialiste; avec le député provincial sérésien, André Gilles; avec le député-bourgmestre de Seraing, Alain Mathot; et avec Jean-Claude Marcourt, alors ministre wallon de l’Économie, et qui se rêvait ministre-président wallon, il fait ensuite partie du «club des cinq» cadenassant la Fédération.

La protection politique se parfait au sein de la coalition provinciale (la province de Liège est actionnaire majoritaire de l’intercommunale) entre le PS et son partenaire libéral, le MR, conduit par son chef de file, Georges Pire, tandis que le PSC puis le cdH est habilement associé à l’opération, puisque les mandats dans les intercommunales sont distribués selon la clé D’Hondt au prorata de la représentation des partis au sein de l’institution provinciale. On retiendra notamment le rôle joué par l’inamovible chef de groupe social-chrétien, puis humaniste, Dominique Drion dans une série de décisions cruciales.

Stéphane Moreau, qui avait déjà fait entrer Tecteo dans le capital de la société IPM, éditrice de La Libre et de La Dernière Heure, se porte alors acquéreur, à un prix nettement supérieur à leur valeur réelle, des Éditions de l’Avenir.

La manoeuvre avait peut-être dans son esprit pour but de lui assurer une protection médiatique contre d’éventuels futurs orages. Mais là, le calcul allait se révéler foireux.

D’abord parce que le rachat des quotidiens du groupe provoque une levée de boucliers dans la classe politique, où, comme rappelé plus haut, certains iront jusqu’à évoquer une «Berlusconisation» de la presse francophone, en référence au magnat italien de la presse, devenu un Président du conseil des plus discutables.

Très vite, par ailleurs, le conflit éclatera entre un personnel qui avait pu croire dans un projet industriel de Nethys vers des développements numériques, mais constats la vanité de cette attente, et à qui les pressions exercées par le rédacteur en chef de l’époque, et les tentatives de peser sur le contenu des quotidiens, apparurent rapidement insupportables

Le comble sera atteint avec la désignation, au mépris des conventions existantes, d’un directeur des rédactions «aux ordres», qui se signalera dès son arrivée par un éditorial, aux antipodes de la politique d’indépendance du groupe, volant au secours du député-bourgmestre de Seraing, toujours dans le dossier de corruption à sa charge, et dont l’épilogue judiciaire est attendu pour les prochains jours. Plus tard, lors d’une séance au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, invité à se pencher sur une forme de censure exercée par la direction du groupe, l’estime dans lequel cette dernière tenait ce directeur des rédactions sera enregistrée par une autre vidéo particulièrement significative, qui fera le tour de la toile.

L’obsession de l’argent

Autre caillou dans la chaussure de Stéphane Moreau: l’obstination d’un échevin des Finances d’Olne. Cédric Halin a des compétences en matière financière et analytique, et sa présence aux assemblées générales de Tecteo n’avait pas pour but essentiel de voter l’approbation des comptes et la décharge aux administrateurs, avant de se précipiter sur les petits fours de circonstance, mais de comprendre pourquoi les dividendes perçus par la petite commune liégeoise dont il est devenu depuis lors le bourgmestre, fondaient comme neige au soleil.

C’est en tirant sur ce fil que la dérive des comités de secteur, créés au moment de la fusion entre ALE et ALG, et où des mandataires publics se voyaient octroyer une rente mensuelle en compensation de réunions qui avaient… ou n’avaient pas lieu, que le «scandale Publifin» a commencé à éclater, dans la sphère médiatique d’abord, dans les cénacles politiques ensuite, et, de fil en aiguille, se prolongent ces jours-ci sur le plan judiciaire.

Car entre-temps, l’autorité wallonne, réveillée, avait mis des garde-fous en place, notamment pour limiter le salaires de ces super-managers d’autant plus efficaces qu’ils jouent avec de l’argent public, même au travers de sociétés anonyme dont les actionnaires sont tous publics. C’est alors que de faramineuses indemnités compensatoires auraient été subrepticement octroyées à Stéphane Moreau; au directeur financier de Nethys, Pol Heyse; à la directrice générale, Bénédicte Bayer; et une série d’autres personnes, dont certaines, une fois le scandale mis au jour, se sont empressées de rembourser les montants, bien moindres que les millions d’euros évoqués, qui leur avaient été attribués. Pour ainsi sans doute se mettre à l’abri des poursuites.

L’argent semble en effet être le gros point faible de Stéphane Moreau. Comment expliquer, autrement un faux à l’assurance, sous forme d’une police antidatée, pour éviter de devoir rembourser les frais de réparation d’un… abri de jardin détruit par un arbre tombé lors d’une tempête? Ou une domiciliation fictive avec sa compagne, pour majorer le montant d’une assurance-pension à son bénéfice? Et ces tentatives désespérées de vendre pour une bouchée de pain à l’homme d’affaires François Fornieri, lui aussi détenu, au prix d’une forme de délit d’initié puisque ce dernier était administrateur de Nethys, de filiales qui rapportent gros aujourd’hui et dont il aurait dû devenir administrateur-délégué, une fois venue la défenestration qu’il sentait venir?

Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se brise. Les appuis politiques d’hier sont aujourd’hui aux abonnés absents, et les affidés médiatiques, au mieux, jouent la carte de l’oubli, ou ont retourné leur veste. L’ancien patron omnipotent de Nethys et de Tecteo a pu jouer la montre, en (ab)usant de la transaction pénale, pour éviter des condamnations qui apparaissaient inéluctables. Cette voie, aujourd’hui, lui paraît fermée. Lui reste à espérer un acquittement: le travail de ses avocats a déjà commencé.

Verviers est plus ingouvernable que jamais


Il y avait déjà la désertification commerciale croissante à Verviers; il y avait aussi son appauvrissement progressif: la Cité lainière y ajoute désormais une ingouvernabililité durable, sur fond d’ambitions personnelles démesurées et d’incompatibilités entre des personnalités de plus en plus clivantes.

Le résultat est que le budget 2021 de la ville n’est pas près d’être approuvé, que les projets vont rester en rade, et que l’hypothèse de l’envoi d’un(e) commissaire spécial(e) en rives de Vesdre prend de plus en plus de consistance. Hors sursaut d’honneur très peu probable d’élus qui pourraient démissionner en bloc et provoquer une élection… à laquelle certain(e) d’entre eux (elles) feraient mieux de ne plus se présenter après les reniements en série qui ont été les leurs au cours des derniers mois.

Ce qu’on dit et ce qu’on dit qu’on a dit

L’événement de cette fin de semaine a été l’annonce, par les « Verts » verviétois de leur refus de négocier plus avant avec le MR, le Nouveau Verviers ( NV, dissidence libérale), le cdH, et les «  Indignés verviétois » (IV, les exclus du PS).

Ecolo se tourne à nouveau vers le PS « orthodoxe » tout en se disant toujours ouvert à certains des autres partenaires. Mais comme le PS « orthodoxe » et amoindri proposerait toujours au mayorat le président du CPAS, Hasan Aydin devenu infréquentable pour les autres partenaires et dont les pratiques ont été plus d’une fois condamnées par la tutelle, ou le conseiller Malik Ben Achour, chef de groupe socialiste, autant dire qu’une union sacrée verviétoise est tout à fait hors d’atteinte.

Le revirement des Verts peut s’expliquer par les propos prêtés à un échevin ou à un contrat de location commerciale accordé par le même échevin dans des circonstances qui posent questions: Freddy Breuwer est à nouveau dans l’oeil du cyclone.

L’affaire a commencé comme un mauvais vaudeville: lors du dernier conseil communal par visioconférence, l’échevin, après une longue intervention qui lui avait permis d’éreinter le PS « orthodoxe » en général, et le président du CPAS en particulier, a oublié de débrancher son micro. Et tout le monde l’a entendu… ou cru l’entendre dire, dans une conversation téléphonique qui suivait, que les socialistes et les écolos le faisaient chier (sic). La toile s’est aussitôt enflammée, même si, tel le ministre fédéral de la Santé, récemment, Freddy Breuwer a apparemment été incriminé plus pour ce qu’on disait qu’il avait dit que pour ce qu’il avait vraiment dit. Mais on ne prête qu’aux riches…

Querelle de bac à sable sur un bail


L’autre motif de fâcherie entre Verts et Bleus portait sur un bail commercial particulièrement favorable accordé à un commerçant réputé proche de l’échevin. (https://www.vedia.be/www/video/info/politique/verviers-une-surface-commerciale-qui-divise-_103782_89.html)

On pouvait entendre l’argument selon lequel mieux vaut louer un emplacement commercial à vil prix dans un centre-ville où les vitrines vides se multiplient et embrayer avec la proposition du conseiller écolo Dany Smeets de systématiser ce type de bail pour lutter précisément contre cette désertification et effacer tout soupçon de favoritisme: les deux positions étaient parfaitement conciliables. Mais la querelle (publique) de bac à sable qui s’en est suivie entre l’échevin et le chef de groupe socialiste ne fait rien pour rehausser le débat démocratique dans l’ancienne cité lainière.

Sur le sujet, on peut retenir la position un peu schizophrénique des échevins socialistes « orthodoxes » qui ont approuvé l’opération en collège communal avant de s’y opposer en conseil. Et on ne peut recevoir l’explication apportée par l’un d’entre eux, Antoine Lukoki en l’occurrence, selon laquelle il n’avait pas perçu toutes les implications du dossier lors du premier vote, mais qu’il en a été informé avant le second par son chef de groupe et par le plus éphémère des bourgmestres verviétois, Jean-François Istasse. Sauf à admettre que le casting des échevins socialistes « orthodoxes » a de quoi interloquer…

Double impasse

Un autre point expliquerait le revirement « vert »: l’obligation de réserver un mandat au « groupe Targnion » en cas de mise sur pied d’une coalition dont ne ferait pas partie le PS « orthodoxe ».

En attendant, aussi infréquentable qu’elle soit, là bourgmestre de Verviers semble bien partie pour rester encore un certain temps en place, alors qu’il y a quelques semaines, Jean-Francois Istasse, privé d’écharpe mayorale par le conseil d’État, se faisait fort de lui régler son compte en moins de deux. Mais la défection de ses échevins socialistes « orthodoxes » la met désormais dans une situation impossible.

Les écologistes verviétois auraient aussi été choqués par la publication, dans l’édition verviétoise de La Meuse, ce jeudi, d’un «casting» du collège communal en cours de négociation. Si les noms mentionnés n’avaient déjà circulé depuis quelques jours, l’hypothèses serait envisageable. Mais on peut en douter…

Le revirement des « Verts » conduit donc à une impasse politique, puisque aucune coalition ne semble en mesure de recueillir une majorité. L’impasse politique se double d’incompatibilités personnelles: Muriel Targnion et Alexandre Loffet (L.I.V.) pour les socialistes « orthodoxes » et les Verts; Hasan Aydin et Malik Ben Achour (l’éminence grise du PS « orthodoxe », qui s’avance manifestement mieux masquée dans ce dossier que devant la caméra de la télé verviétoise!) le premier pour tous les autres sauf peut-être les Verts; le second pour pas mal de monde; et maintenant à nouveau Freddy Breuwer (MR) pour le PS « orthodoxe » et Écolo, après l’avoir été pour le PS, jadis, quand il l’a déserté pour la liste Verviers Autrement, du défunt ex-échevin Paul Cormeau, pour le cdH quand les deux partis étaient en majorité, et même pour le… MR avant la constitution des listes pour le scrutin communal d’octobre 2018.

Les acteurs actuels ne pouvant en sortir, la piste la plus logique serait l’envoi d’un(e) commissaire spécial(e) chargé(e) de rétablir une gestion normale de la Cité lainière. Soit dans un sursaut d’honneur d’élu(e)s qui n’ont pas vraiment fait honneur à la démocratie ces derniers mois, sous forme d’une démission collective qui entraînerait de nouvelles élections où un certain nombre d’entre eux (elles) devraient alors avoir le bon sens de ne plus se présenter. Et où un chien avec un chapeau d’extrême-droite risquerait de faire de leur tailler des croupières. Ne leur resterait alors qu’à parodier l’empereur allemand, Guillaume II, au lendemain de la Première guerre mondiale, et de soupirer «Das habe ich nicht gewollt», «Ce n’est pas cela que j’ai voulu»…