Churchill et le général de Gaulle ont marqué l’Histoire: sans le Premier ministre britannique, qui sait quelle issue aurait connue la Seconde guerre mondiale? Et sans l’appui sans réserve qu’il a apporté au général de Gaulle, que serait devenue la France?
L’énorme estime que les deux hommes se portaient ne les empêchait pas de se quereller parfois vigoureusement. Comme lorsque Churchill n’informa pas de Gaulle de l’approche du débarquement allié du 6 juin 1944 en Normandie. Lorsqu’ils se revirent, quelques jours plus tard, le général reprocha véhémentement à Churchill ce qu’il ressentait comme un manque de confiance. Et, rappelle-t-il dans ses Mémoires de guerre, Churchill lui répliqua que «Quand la Grande-Bretagne devra(it) choisir entre l’Europe et l’Atlantique, elle choisira toujours l’Atlantique».
Le général de Gaulle ne l’avait jamais oublié. Et quand la Grande-Bretagne, vingt-deux ans plus tard, sollicita son entrée dans le Marché commun, le grand Charles lui opposa son véto. Le Royaume Uni dut attendre quelques années, et la sortie de scène de De Gaulle, pour devenir membre à part entière de la Communauté Économique Européenne, puis, plus tard, de l’Union Européenne.
Membre à part entière? Les vetos opposés aux candidatures de Jean-Luc Dehaene puis de Guy Verhofstadt, dans leur course à la présidence de la Commission Européenne, au motif qu’ils étaient trop fédéralistes nous reviennent à l’esprit, aujourd’hui que Herman Van Rompuy, à son tour, risque de se heurter à un rejet britannique… au motif qu’il n’a pas assez d’envergure. Et oui, la Grande-Bretagne est «un pied dedans, un pied dehors», comme me le disait aujourd’hui un ancien confrère british. On l’a bien vu que, sous Margareth Thatcher, elle a réclamé «(her) money back». On l’a vu sous Tony Blair, quand, contre le «noyau dur européen», groupé autour de la France, de la Belgique et de l’Allemagne, le Royaume Uni a choisi d’accompagner les États-Unis dans leur expédition meurtrière en Irak.
On ne peut qu’en conclure que le général de Gaulle, décidément, avait vu clair. Et qu’il serait grand temps de mettre au point un mécanisme de sortie de l’Union Européenne. Pour dire en toute amitié à nos amis britanniques qu’aussi longtemps qu’ils ne préféreront pas résolument l’Europe à l’Atlantique, leur place sera plutôt sur son perron que dans ses salons.