Les journalistes responsables de la montée ou non de l’extrême-droite? Un peu courte, l’analyse!


Pour Jean-Marc Nollet, l’absence de l’extrême-droite en Wallonie serait le résultat du «silence médiatique» à son propos!

Le coprésident d’Ecolo, Jean-Marc Nollet, était présent sur La Première, ce matin, comme dans les colonnes de divers journaux, dont celui qui m’a employé pendant de nombreuses années sans jamais me rémunérer à mon goût (lol). Et, en radio, il a osé féliciter son interlocuteur sur le «cordon médiatique» qui, selon lui, préserve la Wallonie de la déferlante d’extrême-droite qui fait rage en Europe depuis des mois, et dont le dernier avatar a fait une percée désolante au Portugal, en demi-siècle après la révolution des œillets qui a mis fin à la dictature salazariste.

Il est vrai que l’extrême-droite n’a pas droit au chapitre dans les médias francophones… pour la bonne et simple raison qu’elle est pratiquement inexistante sur le plan politique!

Pourquoi l’extrême-droite «n’accroche»-t-elle pas en Wallonie? Différentes formes d’explications ont déjà été avancées ces dernières années, dont la principale est l’absence de «nationalisme wallon».

Si le contentieux fouronnais, dans les années 1980, le slogan flamingant «Plus un franc flamand pour l’acier wallon»; ou l’émergence progressive du pouvoir wallon ont pu créer un sentiment wallon, les Wallons sont plus particularistes que nationalistes. Avant d’être Wallon(ne), on est Liégeois(e); Borain(e); Luxembourgeois(e); Namurois(e); Condruzien(ne); Hesbignon(ne); Carolorégien(ne); et autres identités plus locales.

Autre élément d’explication: l’extrême-droite wallonne n’a jamais été entraînée par un(e) leader d’envergure. Au contraire, les diverses mouvances d’extrême-droite, portées par des responsables falots, ont plus passé leur temps à se chamailler entre elles qu’à forger un programme nauséabond, du type de ceux de la Lega en Italie; de l’Afd (Alternativ für Deutschand) Outre-Rhin; du Rassemblement national en France; ou du Vlaams Belang en Flandre, qu’on annonce premier parti au nord du pays au lendemain des scrutins du 9 juin prochain. Au point que le Front national français, mué depuis lors en Rassemblement national, avait fini par interdire au Front national belge l’utilisation de son nom et de son symbole, la flamme tricolore, rouge-jaune-noir en Belgique, sur le modèle de la bleu-blanc-rouge française.

Rendre les journalistes responsables de l’émergence et de l’essor de mouvements d’extrême-droite n’est pas nouveau, en Belgique francophone. Il y a une trentaine d’années déjà, Louis Michel, alors président des libéraux francophones, avait déjà avancé pareille explication. Ce qui m’avait déjà poussé, alors en tant que président des journalistes belges et francophones, à protester.

Les journalistes français(e)s auraient-ils (elles) rempli leur devoir d’informer s’ils (si elles) avaient refusé la parole à Marine Le Pen avant le deuxième tour de la dernière élection présidentielle?

Même si une chaîne comme CNews, en France, est réputée «rouler pour» l’extrême-droite, dont elle relaie complaisamment les points de vue, oserait-on dire que les journalistes français, dans leur ensemble, sont des suppôts de l’extrême-droite, parce qu’ils invitent périodiquement des responsables politiques du Rassemblement national à s’exprimer? N’auraient-ils pas rempli leur mission d’information, quand Marine Le Pen s’est retrouvée au deuxième tour de l’élection présidentielle, face au (futur) président Macron, s’ils ne lui pas octroyé le même temps de parole?

De la même manière, les journalistes néerlandophones de Belgique peuvent-ils se permettre de ne jamais parler du Vlaams Belang, alors que la percée de ce parti s’annonce irrésistible, au point de le placer en tête au lendemain du 9 juin?

Dans le même temps, s’indigne-t-on en Wallonie de l’espace accordé au PTB (Parti du Travail de Belgique)? Même si l’extrême-gauche et l’extrême-droite ne peuvent sûrement pas être placée sur un pied d’égalité, en fonction des «valeurs» qu’elles défendent respectivement.

De toute manière, il y a belle lurette que les journalistes, tout en refusant toute responsabilité dans l’émergence et le progrès des mouvements d’extrême-droite, ont réfléchi à la manière de les aborder, en décortiquant leur programme et en révélant ce qu’ils ne veulent parfois pas dire.

Mais au fait, cette attitude journalistique ne doit-elle pas s’appliquer à l’ensemble des partis politiques, spécialement en période électorale? Quand Jean-Marc Nollet, ce matin, annonçait «plus de trains ponctuels» ou «quatre mille kilomètres de pistes cyclables en Wallonie» si Ecolo revient au pouvoir après le 9 juin, on aurait pu lui rappeler que le ministre fédéral de la Mobilité, Georges Gilkinet, est le vice-Premier ministre… écolo du gouvernement dirigé par Alexander De Croo. Et qu’en Wallonie, le ministre écolo de l’Énergie et du Climat, Philippe Henry, est responsable entre autres du large sous-équipement de la Région en matière de bornes de recharge des voitures électriques.

On aurait pu aussi interroger Jean-Marc Nollet sur sa présence depuis trente ans dans le landerneau politique, alors qu’Ecolo, en principe, milite pour la limitation du nombre de mandats: l’incohérence politique, plus que le silence médiatique, est une des composantes du lit de l’extrême-droite…

L’échevin disonais Delaval défenestré: sérieux dilemme pour le PS


L’absence de quorum requis lors du vote à bulletins secrets imposé à l’Union Socialiste Communale (USC) de Dison n’y a rien changé : la motion de défiance introduite par son propre parti contre l’échevin des Finances, Jean-Michel Delaval, a été approuvée par le groupe socialiste, rejoint bizarrement par un élu MR, moins évidemment le désormais ex-échevin lui-même. Ce dernier a plaidé sa cause en conseil er sur Facebook, mais il n’a pas fait de pli, et a repris sa place au sein du groupe socialiste, se disant toujours membre du parti. Fin de l’épisode? Pas si sûr…

On peut se réjouir de voir ainsi des élus voter en âme er conscience, en ignorant les mots d’ordre… ou les statuts de leur propre formation politique. Mais on s’étonne en même temps de voir des élu(e)s socialistes, par essence parmi les plus régenté(e)s par leur parti, s’éloigner ainsi du « rappel à la loi » que leur avait imposé la commission de vigilance du PS, après que la fédération verviétoise de l’ex-parti à la rose eut, comme expliqué ici, décidé courageusement de se débarrasser de la patate chaude.

L’ex-échevin n’a pas fait un pli, mais a annoncé un recours

L’ex-échevin Delaval a déjà annoncé un recours devant les instances du PS, qui vont se retrouver face à un terrible dilemme: vont-elles désavouer l’ensemble du groupe socialiste disonais (moins Jean-Michel Delaval) et notamment la bourgmeste, Véronique Bonni, à un peu plus d’un an du scrutin communal, ou bien va-t-il lui imposer un humiliant retour en arrière ?

Le sort de ce recours sera observé avec grand intérêt, même si la formation du président Paul Magnette se caractérise par une interprétation assez erratique de ses propres statuts. Faut-il rappeler ici l’exclusion de la bourgmestre de Verviers, Muriel Targnion, coupable d’avoir voulu démettre un président de CPAS, qui a ensuite été écarté, mais la confiance renouvelée à son collègue de Sambreville, Jean-Charles Luperto, pourtant définitivement condamné en justice? Ou la suspension immédiate du bourgmestre d’Anthisnes et député européen Marc Tarabella, cité et inculpé dans le «Qatargate», mais qui bénéficie toujours , comme tout accusé, de la présomption d’innocence?

Reste que désormais, la majorité disonaise est irrémédiablement divisée.

La défenestration de l’échevin Delaval, après celle de la présidente du CPAS, Dany Wérisse, et la démission de l’échevin Benoit Dantinne pourrait se révéler une victoire à la Pyrrhus pour la bourgmestre.

Celle-ci, qui se disait « attristée » au début de l’épisode, a sans doute révélé ses véritables intentions en se muant en authentique Fouquier-Tinville à l’égard de son ex-collègue, qui a par ailleurs des choses à se faire pardonner: https://www.vedia.be/www/video/info/politique/l-echevin-des-finances-de-dison-jean-michel-delaval-a-ete-limoge_111801.html

Véronique Bonni a ainsi (provisoirement?) écarté celui qui avait failli la priver de la tête de liste aux dernières élections communales et qui risquait de lui faire de l’ombre en octobre 2024. Son pari est risqué : elle pourrait dans un peu plus d’un an devenir la bourgmestre qui aura fait perdre au PS son emprise quasi-séculaire sur la politique disonaise..

L’exclusion de Marc Tarabella démontre l’inconséquence du PS


Le député européen et bourgmestre socialiste d’Anthisnes, Marc Tarabella, est désormais écarté de l’Alliance Progressiste des Socialiste et Démocrates au Parlement européen, où il siège depuis 2004, et il est, par surcroît, exclu du Parti Socialiste. Une exclusion temporaire, a-t-on expliqué au Boulevard de l’Empereur, jusqu’au moment où l’enquête sur la corruption au Parlement européen aura conduit soit à son inculpation, soit à son innocence.

Les «révélations», ou pseudo-révélations du «repenti» italien, Pier Antonio Panzeri, l’ont, il est vrai, gravement mis en cause ces derniers jours: à en croire certaines fuites, son ancien collègue au Parlement européen l’accuserait d’avoir perçu 120000 euros en provenance du Qatar. Et Panzeri, dans le même temps, a complètement innocenté Marie Arena, compromise elle aussi par un voyage dans l’émirat qu’elle avait opportunément omis de déclarer.

Marc Tarabella s’est-il laissé acheter? L’enquête devra le démontrer. La perquisition menée tambour battant à son domicile n’a en tout cas pas laissé apparaître le moindre pactole. Et ses concitoyens d’Anthisnes ont peine à croire que leur bourgmestre, resté très proche d’eux, ait ainsi cédé à une offre sonnante et trébuchante.

Pour l’heure, Marc Tarabella, mis en cause par des «fuites», n’est pas inculpé…

Pour ma part, pour bien connaître Marc Tarabella depuis de très nombreuses années, j’avoue que je serais à la fois très surpris et très cruellement déçu si l’enquête, au bout du compte, démontrait que s’il a changé d’opinion sur l’organisation du dernier championnat du Monde de football au Qatar, c’est après s’être laissé convaincre par une valise de billet. Jusqu’à preuve du contraire, je m’accroche à la présomption d’innocence dont bénéficie chaque inculpé. Et je rappelle qu’à l’heure présente, le bourgmestre d’Anthisnes, qui a déjà réclamé à plusieurs reprises d’être entendu par Michel Claisse, le juge d’instruction en charge du dossier, n’est toujours pas inculpé.

La précipitation avec laquelle le Parti Socialiste l’a exclu, fût-ce de manière temporaire, n’en est dès lors que plus choquante. Et pose question sur la manière dont le PS exclut ou non ses membres. Une manière en apparence très arbitraire, qui semble essentiellement relever du bon vouloir du prince, entendez, du président du parti, Paul Magnette.

Comme le rappelait avec beaucoup de pertinence Bertrand Henne, ce matin, sur La Première, le Parti Socialiste ne respecte en rien les règles qu’il avait édictées, il y a plusieurs années, quand avaient éclaté les affaires dites de Charleroi. Celles qui avaient conduit le président du parti de l’époque, Elio Di Rupo, à jeter qu’il en avait «marre des parvenus» (sic)!

En principe, selon ces règles, tout mandataire inculpé devait être exclu du PS. Mais rapidement, il est apparu qu’une inculpation pouvait déboucher sur un non-lieu, voire un acquittement. Dès lors, la règle a été illico vidée de sens.

Il arrive néanmoins que des inculpés finissent par être condamnés. Ce fut le cas, récemment, de M. Jean-Charles Luperto, définitivement condamné dans une affaire de mœurs. Oui, mais hum, Jean-Charles Luperto est un gros faiseur de voix à Sambreville, et l’exclure risquait de le voir conduire, en 2024, une liste du bourgmestre qui aurait privé le PS du mayorat dans une ville importante de la province de Namur. On a donc inventé une excuse selon laquelle cette condamnation n’est en rien liée à l’exercice d’un mandat politique (!), et on a oublié la «blague» qu’il avait faite auparavant à son collègue de Jemeppe-sur Sambre, qu’il avait menacé de mort, en estimant que cette plaisanterie lui avait coûté un mandat ministériel. Le camarade reste donc un camarade. «Je suis le champion de l’éthique» a expliqué le président du PS, ce jeudi soir, au JT de La Une, juste avant la séance des vœux de son parti. On doit donc en conclure que, pour lui, se poster dans les toilettes d’une station d’autoroute, en quête d’une relation homosexuelle furtive est un acte parfaitement éhique…

Stéphane Moreau, ancien bourgmestre d’Ans et ex-patron de Nethys, a, lui, été exclu du PS en avril 2017, en pleine révélation des manœuvres financières et d’une fraude à l’assurance qui lui avaient bénéficié. L’ancien député provincial sérésien André Gilles, ex-président du conseil d’administration de l’intercommunale Publifin, aujourd’hui Tecteo, dont dépendait Nethys, a été lui aussi exclu en même temps du parti: la règle vide de sens a été appliquée à leur endroit, sans que personne la remette en cause. Pour rappel, à nouveau, à l’heure présente, Marc Tarabella n’est pas inculpé dans le «Qatargate».

Il y a un an Alain Mathot, l’ancien député-bourgmestre de Seraing, condamné pour corruption, a préféré, lui, se retirer du PS, avant de subir une exclusion qui lui semblait devenue inévitable.

Et puis il y a eu les exclusions pour cause de divergence politique avec certains mandataires. Emir Kir, le populaire député-bourgmestre de Saint-Josse a été «dégommé» pour son refus de reconnaître le génocide arménien et pour sa proximité avec des «Loups gris», la milice d’extrême-droite turque. Son exclusion temporaire, largement approuvée, va bientôt prendre fin… sans qu’on sache si, sur le génocide arménien, sa position ait évolué. Lui aussi est une «machine à voix»…

La bourgmestre de Verviers, Muriel Targnion, et son échevin des Finances, Alexandre Loffet, ont, eux été exclus, en violation des règles internes du PS soit dit au passage, parce qu’ils n’étaient pas revenus sur leur signature au bas d’une motion reniée, sous pression, par certain(e)s de leurs ancien(ne)s colistier(e)s, demandant le retrait du mandat d’un président du CPAS, lui aussi PS, dont le comportement politique posait problème à la gestion de l’ancienne cité lainière. La tentative de mettre un autre bourgmestre de consensus, feu Jean-François Istasse, à la place de Muriel Targnion, ayant échoué, le-dit président du CPAS a tout de même été écarté. Et dernier épisode en date, Alexandre Loffet, ancien président de la fédération verviétoise du PS, qui devait démissionner en ce début d’année pour faire place à un(e) socialiste «orthodoxe»…. a été réintégré au parti. Manière de lui éviter de nouveaux déchirements.

La jurisprudence du Parti Socialiste, on le voit, est à géométrie (très) variable, et le tort principal de Marc Tarabella est sans doute d’être le bourgmestre d’une… petite commune condruzienne, et de ne pas peser suffisamment lourd. Comme l’écrivait déjà Jean de la Fontaine, selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous feront blanc ou noir…

Les «barrages écrêteurs» envisagés il y a un quart de siècle ont-ils été trop vite enterrés?


Les inondations catastrophiques qui ont ravagé les vallées de la Vesdre, de la Hoegne, et de l’Ourthe ont dépassé par leur ampleur toutes celles qu’on avait connues auparavant. Alors que les régions sinistrées pansent encore leurs plaies, des politiciens locaux avides de publicité (et jaloux de celles que se sont attirées à titres divers les bourgmestres de Limbourg, Olne et Trooz?) ont déjà lancé une polémique visant le ministre wallon du Climat, Philippe Henry, en attribuant les dégâts considérables causés par ces inondations à la seule gestion du barrage d’Eupen.

Le propos, ici, n’est pas de défendre le vice-ministre-président écolo du gouvernement wallon, mais avant de lancer cette polémique, les politiciens locaux concernés auraient peut-être dû se rappeler les quantités inédites d’eau que les cieux en colère ont déversées simultanément sur tous les bassins hydrographiques de la région, et opérer un calcul, sur base de ces précipitations au mètres carré et dè nombre de mètres carrés considérés, pour avoir une idée des millions de litres qui se sont ainsi déversés dans les rivières en furie! Là se trouve sans doute la première cause des ravages qu’elles ont provoqués.

Il n’empêche qu’il faudra revenir sur la gestion des barrages; et qu’il conviendra de redéfinir diverses normes en matière de constructions. Tout en se souvenant que si on interdit de reconstruire aux abords des rivières, et qu’on oblige les habitants concernés à aller s’établir ailleurs, on bétonnera par définition de nouvelles zones, dans lesquelles l’eau ne pourra plus s’infiltrer, et dévalera d’autant plus vite les pentes des vallées pour se déverser dans la Vesdre, la Hoegne, le Wayai, l’Ourthe ou l’Amblève.

Il faudra donc penser à une batterie de mesures… comme c’était déjà le cas, il y a plus d’un quart de siècle, quand des inondations à répétition se produisaient dans la vallée de l’Ourthe, sans causer des dommages du niveau inédit que nous avons connus ces dernières semaines.

Le ministre wallon des Travaux de l’époque, feu Jean-Pierre Grafé, avait sorti l’idée de créer des « barrages écrêteurs» sur l’Ourthe. Ces ouvrages, dont il avait vu des exemplaires dans la vallée de la Lippe en Allemagne, laissent passer la rivière en période d’étiage normal, mais dès que le niveau des eaux monte de manière anormale, ils les retiennent et inondent des zones définies par avance.

Lancée en 1993, et examinée par la commission de l’Ourthe, l’idée avait progressé dès l’année suivante, avec des crues, qui avaient suscité la réalisation de travaux classiques comme des rehaussements de murs de quais; le redressement de coudes de rivières; ou l’enlèvement d’un dos rocheux contrariant l’écoulement des eaux.

Des projets précis de «barrages écrêteurs» étaient également évoqués: une digue de 27 mètres, susceptible de retenir 10 millions de m3 sur l’Ourthe Occidentale, était envisagée en amont du confluent d’Engreux; et une autre de 13,5 mètres devait pouvoir en retenir 11,8 millions en amont de Durbuy. Un autre barrage écrêteur était également en projet sur l’Amblève, et le site de Stoumont, à l’aval du complexe de Coo, semblait tenir la corde.

En voyant les millions de mètres cubes d’eau qui auraient ainsi pu être «stockés» la semaine dernière, on se prend à penser que bien des tourments auraient ainsi pu être évités…

Déjà à l’époque, toutefois, des voix s’élevaient contre le projet. En suggérant des mesures alternatives comme la plantation de feuillus; la revalorisation de zones humides; ou l’aménagement de certains méandres. Ce qui, a priori, n’était pas contradictoire en soi…

Ce qu’on peut imaginer, par contre, c’est qu’aucune Commune ne souhaitait se voir attribuer des zones inondables pour retenir les eaux de l’Ourthe en cas de crue grave de la rivière. Le phénomène NIMBY («Not in my backyard») était déjà bien connu à l’époque; il se manifeste toujours aujourd’hui, par exemple sur les projets d’implantations d’éoliennes.

L’astuce, là, passera par le changement de titulaire du ministère wallon des Travaux. Michel Lebrun, en charge de l’Aménagement du territoire, était du même parti que feu Jean-Pierre Grafé, et s’il s’est chargé d’enterrer le projet de son prédécesseur, il y a mis les formes. En invoquant la nécessité, d’abord, d’une unanimité de tous les spécialistes appelés à se prononcer sur le sujet. C’était déjà une manière de refermer discrètement la porte. Puis en invoquant des arguments techniques sans trop y rechercher de solutions. Et en estimant le coût des travaux du premier barrage planifié, à Grandhan, en province de Luxembourg, absolument trop élevé.

Les barrages écrêteurs n’ont donc jamais vu le jour sur l’Ourthe et l’Amblève. En Brabant Wallon, à l’inverse, des projets de «zones d’immersion temporaire» sont à l’étude ou en cours de réalisation. En Allemagne, ils ont fait leur preuve depuis de nombreuses années.

Le moment est peut-être venu de les ressortir du placard où on les avait enfermés. En résolvant les questions techniques présentées comme fondamentales, il y a vingt-cinq ans. Et en réévaluant la question du coût de leurs réalisations, à l’aune des dégâts actuellement constatés dans les différentes vallées concernées, dont le coût sera sans commune mesure avec celui de création de retenues d’eau dans des zones inondables préalablement définies…

Le lobby électrique impose sa politique de mobilité au gouvernement bruxellois


Ainsi donc, après avoir émis les idées de l’instauration d’une redevance de circulation sur le territoire de la région-capitale, puis de l’achat de terres agricoles en Wallonie pour nourrir sa population urbaine, le gouvernement bruxellois a sorti un nouveau lapin de son chapeau en décidant, tout seul comme un grand, que les véhicules à moteur thermique ne pourraient plus circuler dans ses rues est avenues, à partir de 2030 pour ceux qui sont alimentés au moteur diesel, et dès 2035 pour ceux qui fonctionnent à l’essence.

L’objectif déclaré est d’améliorer la qualité de l’air dans la capitale, ce qui est un objectif louable en soi. Où la démarche devient cependant plus dérangeante, c’est par l’option exclusivement électrique qui est affichée par les excellences bruxelloises. Aucun véhicule hybride n’échappera ainsi au couperet. Pas plus que les véhicules circulant au CNG. Et encore moins ceux qui rouleront à l’hydrogène, puisque l’a priori adopté par le gouvernement Vervoort est celui que seuls les véhicules lourds type bus, pourront être mus par des moteurs à hydrogène. C’est exactement la thèse du lobby électrique, qui n’a jamais démontré pourquoi des moteurs faisant mouvoir des véhicules lourds ne pourraient pas être doublés de versions plus légères pour des véhicules moins pondéreux. D’habitude, on part pourtant du principe que qui peut le plus peut aussi le moins.

Déjà les réactions se multiplient, face à pareille politique punitive, dont tous les spécialistes s’accordent à dire qu’elle est la moins appropriée pour convaincre le bon peuple d’adopter des comportements plus compatibles avec les objectifs de réduction des gaz à effets de serre et par voie de conséquence du réchauffement climatique.

Ce qui est étrange, c’est que personne au gouvernement bruxellois, et notamment parmi les ministres écologistes, ne soulève, à cette occasion, les conditions inhumaines dans lesquelles les minerais rares nécessaires aux batterie électriques sont extraits, notamment en République Démocratique du Congo. Comme écrit récemment dans ce blog, les véhicules électriques ne sont pas verts, mais rouges du sang des travailleurs, et notamment des enfants, qui meurent chaque jour dans cette extraction.

Au risque de me répéter, la filière automobile électrique ne serait acceptable que si sa production passait par l’imposition de conditions de travail décentes et sécuritaires et surtout de salaires décents, à tous ces mineurs artisanaux. Le problème est que cela multiplierait par trois ou par quatre le prix de ces batteries électriques, et entraînerait encore à la hausse les prix déjà prohibitifs de ces véhicules prétendument écologiques. Il est beaucoup plus facile de protester, à juste titre, contre les atteintes aux droits des personnes LGBTI en Hongrie: cela ne demande aucun effort, même si la protestation restera largement vaine.

On passe bien entendu sous silence le fait que ces batteries sont impossibles à recycler, et que les minerais rares nécessaires à leur production seront rapidement éliminés: le lobby électrique ne s’embarrasse évidemment pas de telles considérations, pourvu que ses bénéfices soient maximisés à court et à moyen terme.

Autres problèmes soulevés par le bon peuple mais ignorés par celles et ceux qui le gouvernent: l’absence de bornes électriques pour le rechargement, et les problèmes inextricables que cela suscitera non seulement dans la capitale, mais, par exemple, sur les autoroutes des vacances, lorsque des vacanciers devront s’arrêter aux mêmes endroits pendant une, deux, ou trois heures, pour recharger les batteries épuisées de leur véhicule.

Et puis on n’évoque que pour mémoire le problème de l’approvisionnement en électricité, une fois que les centrales nucléaires auront fermé leurs portes et que la demande en électricité explosera massivement. La solution passera-t-elle par la multiplication de centrales au gaz? Il faudrait, il est vrai, les implanter en Flandre ou en Wallonie, et sans doute dira-t-on à Bruxelles que la purification de l’air dans la capitale exige bien une solidarité régionale. Mais l’effet sur le réchauffement climatique en sera d’autant réduit…

Un gisement d’emplois pour la Wallonie?

Les inquiétudes des nombreux navetteurs qui se rendent chaque jour dans la capitale sont également largement ignorées. Leur restera-t-il à s’adapter ou à renoncer à leur emploi? Le ministre wallon de la Mobilité, Philippe Henry, évoque à l’horizon 2035 un changement des modes de transport, et notamment un développement mirifique de l’offre ferroviaire et de transport en commun vers Bruxelles. Mais Philippe Henry a déjà un long passé de ministre écologistes derrière lui. Et on sait que certaines de ses promesses ne se sont jamais réalisées, voire se sont muées en fiasco, comme celles relatives aux certificats verts.

À l’inverse, les excellences bruxelloises, dont les initiatives impétueuses, prises sans concertation avec leurs homologues flamands, wallons, et germanophones, commencent à susciter l’agacement, pour ne pas dire plus, pourraient ainsi se tirer une balle dans le pied. Car nombre d’emplois de toutes ces navetteuses, et tous ces navetteurs qui partent chaque jour pour la capitale pourraient tout simplement être… rapatriés vers la Wallonie. Tant il est vrai que l’administration centralisée a fait son temps. Et que le télétravail imposé par la pandémie a démontré, si besoin en était, qu’une administration ou une entreprise établie à Verviers, La Louvière, Bastogne, ou Ciney, peut être tout aussi efficace qu’une entreprise ou une administration établie à Bruxelles.

Dans le cavalier seul adopté par Bruxelles, la Wallonie pourrait retrouver largement son compte. En réduisant drastiquement les déplacements quotidiens de dizaines de navetteurs. Et contribuant ainsi largement, sans leur imposer des dépenses pharamineuses, à la lutte contre le réchauffement climatique.

Vérité d’un jour en bord de Vesdre, mensonge huit mois plus tard…


Le conseil communal de Verviers s’est réuni en présentiel ce mercredi soir, car l’événement était d’importance: les élus de l’ancienne Cité lainière étaient invités à retirer la motion de méfiance mixte qu’ils avaient approuvées le 21 septembre 2020, pour écarter la bourgmestre PS, Muriel Targnion, et la remplacer par l’éphémère mayeur Jean-François Istasse. Ce qui supposait une autre motion de méfiance, alambiquée celle-là, pour écarter de la magistrature suprême Hasan Aydan, président du CPAS et successeur naturel de la bourgmestre défenestrée, mais le réinstaller tout de même à la tête du Conseil de l’aide sociale.

Le retrait de cette motion devait permettre de contourner le prescrit du Code wallon de la démocratie locale, qui impose un délai d’un an entre le dépôt de deux motions de méfiance, et la voie sera dès lors libre à Malik Ben Achour, grand instrumentaliste de cette machinerie, de devenir à son tour bourgmestre, le 26 avril. Si toutefois aucun grain de sable ne vient gripper la mécanique, et sous réserve que le Conseil d’État, s’il est à nouveau saisi du problème, n’y déniche pas une autre défaillance juridique.

L’événement n’a finalement pas eu lieu, puisque… Malik Ben Achour lui-même a demandé le report du vote sur ce point. Il faut dire que seuls vingt-six élus se sont retrouvés en séance, et que le groupe socialiste, fort en principe de treize mandataires, était privé de ses exclu(e)s, Muriel Targnion, Alexandre Loffet, et Laurie Maréchal, ce qui n’en laisse plus que dix. Mais que les absences de l’échevin Antoine Lukoki; du président du CPAS, Hasan Aydin; et des conseiller(e)s Chimaine Nangi, Saïd Naji, et Mohammed-Anass Gallass ne laissaient subsister que cinq représentant(e)s. Mais sans doute n’est-ce que partie remise? Et l’installation d’une nouvelle majorité renvoyée… aux calendes grecques?

La motion de méfiance à l’égard de Muriel Targnion n’en reste pas moins, comme l’a rappelé mon ancien confrère Franck Destrebecq, dans le journal qui m’employait et ne me rémunérait pas assez à mon goût (air connu) (https://www.lavenir.net/cnt/dmf20210413_01572015/nouvelle-majorite-le-26-avril-peut-etre), motivée par «la mise en péril de la majorité sur base de la scission du groupe PS (…) à la suite d’une tentative de motion de méfiance individuelle avortée, déposée le 7 juillet 2020, à l’égard d’un de ses membres, Monsieur Hasan Aydin (PS), président du CPAS».

L’épisode a valu à la bourgmestre verviétoise d’être exclue du PS, au terme d’une procédure à dire vrai très peu orthodoxe, orchestrée par le président du parti, Paul Magnette, qui s’est rangé derrière le député fédéral verviétois, toujours en place en attendant de devoir démissionner du Parlement fédéral, s’il ceint l’écharpe mayorale à Verviers.

Dans la foulée, l’échevin Alexandre Loffet a, lui, été suspendu par le parti, tandis que la jeune conseillère Laurie Maréchal, écœurée par ces manœuvres de coulisse, en a démissionné, non sans avoir au préalable exigé, avec un certain panache, que son portrait de jeune élue soit retirée de la devanture du siège du PS, Boulevard de l’Empereur à Bruxelles.

«Expressément»

La quadrature du cercle, pour le PS verviétois, est de confirmer la mise à l’écart de Muriel Targnion, tout en instrumentalisant l’exécution de Hasan Aydin qui, non seulement ne se verra pas confier le mayorat, mais va, si l’ingéniérie politicienne mise en place par ses propres «amis» aboutit, perdre aussi la présidence du CPAS.

L’astuce? Reprendre, comme l’a évoqué mon ancien collègue, les termes de la motion de méfiance individuelle déposée à son égard par les conseillers socialistes qui avaient soutenu Muriel Targnion en juillet 2020, avant de se «raviser» opportunément par la suite.

«Pour rappel, cette motion comportait cinq pages d’argumentaire (auxquelles les signataires de la présente motion renvoient expressément)» explique le texte de la nouvelle motion de méfiance collective qui sera soumise aux élu(e)s verviétois(es) le 26 avril prochain.

Il était question, a rappelé Franck Destrebecq, «d’un certain nombre d’opérations problématiques au regard des règles», de «décisions que nos considérons non conformes à la loi»; «d’inconduite d’Hasan Aydin envers ses collègues», d’«accusations diffamatoires lancées publiquement à leur encontre» et de « pratique de l’insulte et de l’intimidation, en particulier envers les femmes qui s’engagent en politique» (qui) «ne fait pas partie de nos valeurs».

Cohérence?

Pour les partis actuellement associés au PS dans la gestion (?) de la ville de Verviers, le MR, le NV (Nouveau Verviers), ainsi que pour le cdH, invité à s’unir à l’attelage, le texte ne doit pas poser de problème, puisqu’ils s’étaient déjà ralliés au projet de motion déposé par Muriel Targnion à l’endroit de son président de CPAS.

Mais, au sein du PS, il faudra tout de même une sérieuse explication pour justifier pourquoi le dépôt d’une motion, en juillet 2020, a valu à la bourgmestre socialiste de Verviers d’être exclue de son parti et d’être chassée de sa fonction, alors qu’en avril 2021, le vote d’une même motion permettra à un autre élu socialiste de reprendre son écharpe, avec la pleine approbation du président du PS lui-même!

Muriel Targnion a-t-elle eu le tort d’avoir raison trop tôt? Notre impression est plutôt que ces mois d’empoignades politiciennes à Verviers qui font honte à la démocratie avaient pour seul but d’écarter de sa fonction une bourgmestre dont l’action, notamment en tant que présidente du conseil d’administration de Nethys, avaient heurté de front la volonté présidentielle de se débarrasser de l’image désastreuse collée à son parti par la gestion calamiteuse de l’intercommunale liégeoise et de ses filiales. Et que les reproches formulés à l’égard du président du CPAS étaient fondés. Mais alors, pourquoi n’avoir pas pris l’initiative, il y a un an, alors que la gestion d’une ville de plus en plus paupérisée et vidée de ses commerces requérait déjà l’urgence?

L’impasse constatée depuis des mois n’aurait-elle pas justifié par ailleurs l’envoi à Verviers d’un(e) commissaire spécial(e), voire, devant l’impasse prolongée, une démission collective des bourgmestre et échevin(e)s, et un retour aux urnes anticipé pour rebattre les cartes?

La procédure utilisée ici, au mépris des statuts internes du PS, prend tellement des allures de «chasse à la sorcière»; la reprise des arguments que Muriel Targnion à l’égard de celui qui a réaffirmé son droit à exercer le mayorat témoigne d’un tel cynisme que la confiance du public dans l’institution communale mettra longtemps à se rétablir. Et risque de bénéficier aux populistes de tous poils, qui n’auront qu’à se baisser pour ramasser les suffrages des déçus de la démocratie.

Replongée dans le marasme politique, Verviers attendra encore un peu (?) sa relance


En suspendant le mécanisme de contournement du code wallon de la démocratie locale, mis en place à Verviers pour défenestrer la bourgmestre Muriel Targnion et installer Jean-François Istasse à sa place, tout en permettant par un jeu de motions de défiance-votes de confiance à Hasan Aydin et Sophie Lambert de conserver leurs mandats respectifs de président du CPAS et d’échevine, le Conseil d’État a relancé la saga politique dans l’ex-cité lainière. On en revient donc à la configuration du début août, avec un collège communal et une majorité différents de la constellation mise en place grâce précisément à ce mécanisme de contournement.

La bourgmestre réintégrée n’a pas tardé à convoquer un collège communal pour récupérer les attributions qui étaient siennes et rendre à Alexandre Loffet celles dont il avait la responsabilité.

Les échevin(e)s socialistes ont obéi à une injonction de l’ancien mayeur Jean-François Istasse qui espérait empêcher le collège communal de siéger en le privant de quorum, mais comme les échevins libéraux et Nouveau Verviers ont répondu à la convocation, la manœuvre a fait pschitt comme aurait dit feu Jacques Chirac qui s’y connaissait, lui, en entourloupes.

La discussion désormais tourne autour de la portée de l’arrêté de suspension pris par le Conseil d’État, sur les possibilités juridiques d’y répondre et sur les conclusions politiques à en tirer à la fois sur le plan local et au niveau wallon.

Quelle portée?

La décision de la plus haute instance juridique et administrative du pays ne remet la construction mise en place à Verviers que « sur un petit point de détail » a plastronné Jean-François Istasse.

L’observation est pertinente : comme souvent dans ses avis, le Conseil d’État indique en creux dans ses arrêtés le moyen de corriger le tir.

Il suffirait donc que la motion de défiance à l’égard de Sophie Lambert ne vise que son incapacité à occuper la fonction mayorale et, emballez c’est pesé, le bourgmestre dégommé Istasse retrouverait son écharpe et la majorité constituée autour de lui rentrerait en piste. L’affaire de quelques jours en somme, et le retrait de la motion précédente rendrait sans objet le recours en annulation de cette motion et de ses compléments toujours pendant au Conseil d’État.

Quelle réponse ?

Une nouvelle motion, autrement motivée, suffirait donc à remettre les choses en l’état? Pas aussi simple, apparemment.

Il faut d’abord vérifier s’il est légalement possible d’introduite immédiatement une nouvelle motion de défiance, à l’égard de la majorité conduite par Muriel Targnion, quelques semaines seulement après avoir fait voter la première.

Selon certains juristes, un délai d’un an s’impose. Il ne m’appartient pas de trancher, mais si Jean-Francois Istasse a raison, le code wallon de la démocratie locale permettrait dès lors, passé le délai requis après la mise en place des majorités communales, de rendre toutes les communes wallonnes ingouvernables: il suffirait au gré des vents ou des humeurs de déposer à l’envi des motion de défiance à l’égard des majorités en place, quelles qu’elles soient.

Ensuite, à supposer que le recours en annulation du stratagème de contournement mis en place par les Machiavels verviétois soit effectivement abandonné du fait de l’adoption d’une nouvelle motion de défiance collective et de deux motions de défiance individuelles, corrigées sur un point, rien n’empêcherait l’introduction de demandes de suspension en extrême urgence et d’annulation de ce nouveau mécanisme. Avec autant de chances de réussite ou de risque d’insuccès.

Le Conseil d’État a en effet des habitudes de… cancre: saisi de requêtes qui invoquent généralement une série de moyens (d’arguments), dès qu’il en rencontre un qui lui permet de fonder ou de rejeter une d’entre elles, il n’examine pas les moyens suivants. D’hypothétiques recours contre cette possible nouvelle motion ne devraient donc reprendre que les arguments invoqués dans les recours actuels sauf celui relatif à l’échevine, et en y ajoutant éventuellement d’autres. Le carrousel verviétois pourrait ainsi éclipser le célèbre carrousel fouronnais des années 1980

Quelles conclusions politiques?

En attendant le résultat de toutes ces intrigues de coulisse, qui démentent la maxime « Publicité sauvegarde du peuple » figurant au frontispice de l’Hôtel de ville de Verviers, le déclin de l’ancienne cité lainière, victime à la fois d’une paupérisation et d’une désertification commerciale croissantes, s’accentue. Et ce n’est pas l’immobilisme d’un projet de centre commercial auquel plus personne ne croit qui l’aidera à en sortir.

La réponse politique doit venir de Verviers d’abord et renvoie tous les politiques locaux à leurs engagements ou à leurs reniements. Sont-ils toutes et tous prêts à relancer une mécanique juridique qui conduira inévitablement à des recours, et à des risques de pannes répétées dans la gestion de la ville?

Le PS, dont les dissensions sont à l’origine du marasme politique à Verviers est à nouveau interpellé : le président du parti, Paul Magnette, débarrassé de ses travaux et ambitions au niveau fédéral, se repenchera-t-il sur l’imbroglio verviétois ? Et s’expliquera-t-il sur les accusations de capitulation devant une pression communautariste en bord de Vesdre?

La question vaut également pour Muriel Targnion qui avait clamé que les recours en suspension et en annulation du montage juridique mis en place pour l’écarter étaient introduits pour le principe et pas pour lui permettre d’exercer une fonction mayorale dont elle ne voulait plus, parce qu’il ne lui était plus possible de « travailler avec ces gens-là ».

L’est-elle aujourd’hui? Et « ces gens-là » sont-ils disposés à reprendre leur collaboration avec elle? Il est un peu court, comme elle le pose, qu’« il y a des collègues qu’on aime mieux ou moins mais chacun bosse ensemble dans l’intérêt de la boîte ». Même dans le monde de l’entreprise, cette atmosphère de bisounours est une fiction.

La situation verviétoise interpelle aussi le pouvoir wallon. En octroyant le mayorat à la candidate ou au candidat credité(e) du plus grand nombre de voix sur la liste principale de la majorité communale, le code wallon voulait instaurer une forme de démocratie directe, au risque de favoriser une forme de démagogie. Si elle est maintenue et in fine validée, la mécanique verviétoise vide cette disposition de sens puisqu’il suffira aux partis d’introduire dès la mise en place des majorités une motion de confiance assortie de motions de défiance individuelles pour leur permettre d’ignorer le vote populaire.

Pour les parlementaires wallons, il y a urgence à préciser les dispositions du code wallon de la démocratie locale.

Pour les élu(e)s verviétois(e)s, la chance se présente une nouvelle fois de faire primer l’intérêt collectif sur l’intérêt partisan et les ambitions carriéristes.

Grâce à Paul Magnette, une extrême -droite inexistante peut rêver à Verviers


 

Hôtel_de_ville_de_Verviers_12C’était le 15 octobre 2012, et la toute jeune élue au conseil communal de Verviers ne tournait pas autour du pot. «Cette élection à un goût amer. Loin d’une victoire personnelle, c’est sur un sentiment de défaite que je me suis endormie hier soir» écrivait Dugyu Çelik sur sa page Facebook. «Le résultat des urnes montre en termes de voix de préférence que le vote ethnique a joué de manière importante. Et pas n’importe quel vote ethnique!» ajoutait-elle. «Il s’est cristallisé autour des mosquées, encouragé et prôné par un électorat souvent de droite, appartenant à la nouvelle bourgeoisie musulmane, celle qui roule en 4×4, et qui fait porter le voile à ses femmes, celle qui n’a que faire des idées et des valeurs du PS, et qui a mobilisé en masse pour soutenir son/ses candidats, pendant que nos électeurs laïques se détournaient de nous, et ce sont les mosquées qui ont triomphé au Parti socialiste à Verviers».

La lucidité de Dugyu Çelik confirmait son brillant trajet d’étudiante en sciences politiques à l’université de Liège.

1292857201paul-magnettePaul Magnette, président actuel du PS, ancien professeur à l’Université Libre de Bruxelles, aurait peut-être dû lire cette analyse écrite par une jeune femme fraîche élue au conseil communal de Verviers, avant de prendre la décision de mettre le PS de Verviers et sa fédération régionale sous tutelle pour une durée indéterminée afin de sauver le mandat de Hasan Aydin, président du CPAS de Verviers, menacé par une procédure de destitution prévue dans le Code wallon de démocratie locale. Car c’est de Hasan Aydin que Dugyu Çelik parlait il y a huit ans. Depuis lors, elle a quitté Verviers. Mais les événements des dernières semaines ne sont que la dernière conséquence de la situation qu’elle décrivait.

Des actes illégaux couverts

La bourgmestre de Verviers, Muriel Targnion, et celles et ceux qui l’ont propulsée à l’Hôtel de ville de Verviers portent une responsabilité évidente dans la dégradation de la situation. Manifestement, elle n’était pas taillée pour le rôle. Et la présidence de Publifin, d’Enodia ensuite, qu’elle a occupée trop longtemps pour défendre envers et contre tout les pratiques mafieuses de Stéphane Moreau et consorts ne l’a que trop distraite d’une tâche qui la dépassait peut-être.

Il n’empêche, elle a été réélue au mayorat de manière incontestable. Et par surcroît, le collège communal et elle sont confrontés depuis des mois à un président de CPAS qui se comporte en grand vizir n’ayant de comptes à rendre à personne, et qui a multiplié les actes illégaux, annulés par le ministre wallon des Pouvoirs locaux. Paul Magnette va-t-il par extension étendre la tutelle à Pierre-Yves Dermagne, ministre socialiste? L’homme, par ailleurs, s’est signalé d par la violence de ses paroles, dont certaines d’un sexisme primaire, a l’égard de ses collègues du collège communal.

En choisissant de geler la motion prise à l’égard de Hasan Aydin, le PS wallon, à l’initiative de son président, couvre donc les actes illégaux que celui-ci a commis, comprenne qui pourra! Les pressions exercées sur les élus PS qui sont revenus sur la signature qu’ils avaient apposée sur la motion de destitution du président du CPAS ne plaident pas pour la moralisation de la vie politique.

En plaçant l’union socialiste communale de Verviers et la fédération verviétoise du PS sous tutelle pour une durée indéterminée, il risquait aussi de paralyser pour des mois une ville de Verviers en pleine déliquescence, dont le délabrement aurait dû lui parler à lui, bourgmestre de Charleroi.

En décidant d’exclure la bourgmestre de Verviers et celles et ceux qui la soutiennent au sein du PS, parmi lesquels un ancien président du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles tout de même, le président du PS apporte son appui à un mandataire qui s’est appuyé sur le vote ethnique décrit par Dugyu Çelik en 2012, et qui joue toujours la carte turquissime. En témoigne la récente manifestation de soutien organisée en sa faveur, au sein de laquelle des cris antisémites ont retenti. Pour la séance finalement annulée du conseil communal de ce soir où sa destitution aurait dû être décidée, une mobilisation aurait été déclenché sur des médias turcophones dans toute la Wallonie et à Bruxelles. Comme si son origine était à la base de sa mise à l’écart!

«Ce sont les mosquées qui ont triomphé au Parti socialiste de Verviers» écrivait Dugyu Çelik en 2012. Paul Magnette leur assure aujourd’hui une victoire plus grande encore, et met leur candidat sur orbite pour octobre 2024. Mais le risque est grand, alors, de voir une liste d’extrême-droite, aussi médiocre soit-elle, surgir du néant et tailler des croupières au PS verviétois divisé ou rabiboché. Alors le président du PS dira-t-il tel l’empereur allemand Guillaume II après la Première guerre mondiale «Das habe ich nicht gewollt». «Ce n’est pas cela que j’ai voulu»?

Divide ut imperes

La nuit aurait-elle porté conseil au Boulevard de l’Empereur? Y aurait-on considéré qu’effectivement, exclure une majorité du groupe socialiste, dont un ancien président du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, était aller un pas trop loin? Ou tenterait-on de manière insidieuse de désolidariser les élus qui ont signé une motion pour écarter le président du CPAS de sa fonction d’abord, une motion de défiance constructive ensuite, de la bourgmestre, en application du vieux principe latin « Divide ut imperes », diviser pour régner?

Muriel Targnion n’est plus en odeur de sainteté au PS depuis un certain temps. Sa faute, quand elle présidait l’intercommunale Enodia, est de n’avoir pas compris que le moment de ne plus soutenir la gestion calamiteuse de Stéphane Moreau était venu.

On aurait compris que, pour sortir du blocage actuel, le PS invite et la bourgmestre, et le président du CPAS, à faire un pas de côté.

Le paradoxe est qu’il apparaît que les tenants de la discipline du parti ont tenté, eux aussi, de « débaucher » le cdH, mais pour installer Hasan Aydin au mayorat! Donc d’avoir tenté la manœuvre dont ils font reproche aujourd’hui à la majorité des élus socialistes verviétois!

Ils donnent ainsi l’impression de jouer la femme, ce qui n’est pas de la plus grande élégance, on en conviendra. Reste à voir si les cosignataires de la bourgmestre verviétoise tomberont dans un panneau aussi grossier. Et au même moment, les comportements irréguliers du président du CPAS ne sont toujours pas remis en cause par le PS à Bruxelles. Cela ne renforce pas sa crédibilité…

Janvier crucial pour les Éditions de l’Avenir et pour le pluralisme de la presse quotidienne francophone belge


La fin de janvier marquera le début d’un nouvel épisode dans l’histoire tourmentée, depuis quelques années, des Éditions de l’Avenir: ainsi que son administrateur-délégué ad interim, Renaud Witmeur, l’a déclaré à la fois dans une interview et devant les administrateurs d’Enodia, à la fin décembre, Nethys va les mettre en vente.

Les Editions de l'AvenirCette opération rencontrera à la fois une demande mainte fois répétée du personnel du journal, et les exigences des parlementaires wallons: après s’être dégagée des quotidiens du sud de la France, dans des conditions qui demandent toujours à être éclaircies, et après avoir mis fin à l’expérience calamiteuse d’Ilico, un site d’info en ligne dont la finalité n’a jamais été clairement définie, la filiale de l’intercommunale Enodia, l’ex-Publifin, va se dégager de ses activités de presse en Belgique en remettant sur le marché non seulement les Éditions de l’Avenir, mais aussi L’Avenir Advertising, la société éditrice du toutes-boîtes publicitaire Proximag, et la société L’Avenir Hebdo, éditrice de Moustique et de Tele Pocket. La question qui reste en suspens est de savoir si cette vente sera globale, ou si elle se fera par appartements.

Pour autant, l’opération demande à être menée avec beaucoup de doigté, à la fois pour éviter de nouvelles pertes massives d’emplois, pour maintenir le pluralisme de la presse écrite quotidienne en Belgique francophone, et pour donner aux Éditions de l’Avenir des perspectives de développement dans un marché entamé méchamment par l’emprise publicitaire des GAFAM (Google, Amazone, Facebook, Microsoft) que le pouvoir politique européen devra tôt ou tard, et idéalement plus tôt que tard, frapper au portefeuille, en réaction à leur politique scandaleuse d’évasion fiscale.

Une vente d’entreprise s’accompagne en effet souvent de mesures de «rationalisation», comme on le dit pudiquement pour éviter la brutalité du terme «licenciements».

Le rude plan social dont les Éditions de l’Avenir viennent de sortir a durement frappé la rédaction, et sa finalité, comme nous l’avons déjà expliqué ici, n’était pas uniquement économique. Bien sûr, il s’agissait de ramener les finances de l’entreprise dans le vert, mais les licenciements ciblés auxquels l’opération a donné lieu, en dépité des démentis hypocrites exprimés par un management désormais déconsidéré, montraient bien que l’indépendance journalistique était également ciblée.

Ce plan social exécuté, d’autres rationalisations étaient envisagées, qui allaient frapper les secteurs administratif et commercial: des regroupements à Liège, siège de Nethys, étaient planifiés, et des emplois, inévitablement, allaient être sacrifiés dans l’opération.

Une vente des Éditions de l’Avenir, à quelque repreneur que ce soit, s’il s’agit d’un des deux autres groupes de presse quotidienne en Belgique francophone, débouchera inévitablement sur de tels doubles emplois. Ce n’est pas forcément le seul scénario envisageable: il y a cinq ans, personne n’attendait Tecteo dans un secteur, auquel d’autres investisseurs, belges ou étrangers, pourraient s’intéresser.

Mais restons dans l’hypothèse de reprise belgo-belge, sous forme de regroupement au sein du paysage médiatique francophone. Et  si c’est un repreneur plutôt que l’autre qui décroche la timbale, c’est sans doute à un bain de sang social qu’il faut s’attendre, dont non seulement les services administratif et commercial feront les frais, mais également la rédaction, à nouveau. Car la reprise postulera la fermeture immédiate ou à court terme de certaines des éditions régionales du groupe.

Un autre scénario de reprise se traduirait par des pertes d’emplois plus limitées, qui ne nécessiteraient pas nécessairement un plan social en tant que tel, et sur le papier, il présente l’avantage d’ancrer le pluralisme de la presse quotidienne francophone en Belgique, en favorisant sa recomposition en deux groupes de force plus ou moins égale. Mais le tableau n’est pas aussi idyllique qu’il en a l’air.

Il pose tout d’abord la question de la pérennité financière du nouvel ensemble ainsi créé, par l’adjonction au repreneur de partenaires financiers privés, qui en attendront peut-être un retour sur investissement rapide. Et il pose, malgré tout aussi, mais en termes différents, la question du pluralisme de la presse. Car la pratique qui existe déjà en son sein est celle d’un partage large d’informations, politiques économiques ou sportives, qui fait que deux quotidiens que tout séparait au départ ne s’expriment désormais plus que d’une seule voix.

CorelioUn parallèle vécu personnellement illustre le propos. Il y a quelques années, pour traiter de la politique aéroportuaire et du transport aérien, il y avait quelques journalistes spécialisés en Flandre, dont l’un travaillait pour le Nieuwsblad, au sein du groupe Corelio, dont faisaient partie à l’époque les Éditions de l’Avenir.

De l’eau a depuis lors passé sous les ponts de l’Escaut et de la Meuse. Corelio a revendu les Éditions de l’Avenir à Tecteo en 2013, et s’est mué en Mediahuis, qui regroupe le Standaard, le Nieuwsblad, la Gazet van Antwerpen, et le Belang van Limburg. Le confrère est resté, d’autres ont été sacrifiés dans l’opération. Et par la suite, ses articles ont non seulement été publiés dans les quotidiens jumelés, le Standaard et le Nieuwsblad, mais aussi dans les quotidiens anversois et limbourgeois. Selon son inspiration, ses préférences, ou ses convictions, son opinion sur quelque problème que ce soit, a ainsi prévalu dans la moitié de la presse néerlandophone. Sans que plus aucun débat ne s’y ouvre, par exemple sur le survol de la zone du canal à Bruxelles, sur le développement de Ryanair à Bruxelles-National, ou sur l’intégration de Brussels Airlines dans la Lufthansa.

Voilà les risques liés à la vente des Éditions de l’Avenir à la fin de ce mois. Une vente qu’il faudra donc entourer de garde-fous, pour limiter les impacts à la fois sur l’emploi, et sur le pluralisme de la presse.

Un contrefeu classique, dans le cas d’un rapprochement entre journaux complémentaires, pourrait être dans la conception de rédactions transversales, sportive, économique, culturelle, politique, sociale, etc. Des sujets pourraient être plus richement couverts par des rédactions ainsi renforcées, avec, selon le cas, des articles différents selon les titres qui s’adressent à des publics différents, ou, dans un nombre limité de cas, des articles identiques déclinés dans différents journaux. L’objection à pareille mise en place sera vraisemblablement économique, mais la résistance la plus importante sera plus probablement psychologique: elle obligera à faire travailler ensemble des journalistes qui ne sont pas jusqu’ici vraiment concurrents, mais qui travaillent dans des quotidiens à la personnalité marquée, et à qui il faudra apprendre à vivre et à penser en commun.

Une autre recette plus ancienne consiste en la création d’une Fondation, chargée de défendre l’esprit d’un quotidien.

La référence classique, en Belgique, est la Fondation Hoste, côté flamand, qui veille à ce que les développements du Laatste Nieuws respectent les idéaux libéraux des fondateurs. Pareille tâche est évidemment plus aisée dans un contexte d’expansion, où le quotidien qu’elle protège, joue un rôle moteur. Dans un contexte défensif, où des impératifs économiques seront opposés à toute velléité de défendre un périmètre maximal, elle risque très vite de faire long feu.

L’étude McKinsey, commandée en son temps par l’ancien ministre wallon de l’Économie et communautaire des Médias Jean-Claude Marcourt, aujourd’hui président malgré lui du Parlement wallon, ne peut non plus être ignorée. Le document recommandait une mutualisation des moyens pour l’ensemble des quotidiens francophones de Belgique. Le centre d’impression de Rossel à Nivelles, où sont déjà imprimés les quotidiens du groupe L’Avenir, pourrait jouer ce rôle… pourvu qu’il puisse assurer l’ensemble des tirages, alors qu’il est déjà au bord de la saturation. Et surtout qu’il sorte du giron du groupe de presse actuellement dominant en Belgique francophone.

Reste la solution originale, à laquelle le personnel des Éditions de l’Avenir s’est attelé depuis plusieurs mois: celle d’une coopérative associant ce personnel aux lecteurs du quotidien, à des investisseurs locaux ou régionaux, et à des spécialistes des médias.

Les administrateurs d’Enodia et de Nethys ont déjà convenu de donner un rôle crucial à cette coopérative dans un processus de vente qui, par là même, sortira des schémas classiques. Le personnel politique lui-même, et notamment la nouvelle ministre communautaire des Médias, a manifesté son intérêt pour une initiative qui, pour ancienne qu’elle soit par sa forme, ouvre peut-être une voie nouvelle pour assurer l’avenir de la presse écrite quotidienne en Belgique francophone. Et surtout pour lui permettre d’explorer de nouvelles pistes de développement.

Pour la découvrir: https://www.notreavenir.coop/devenir-cooperateur/ Tous les soutiens sont utiles. Dès la part de base, à 50 euros. La contribution requiert un effort, certes. Mais, au regard d’autres dépenses, elle reste bien modeste, non?

Stéphane Moreau parti, que subsistera-t-il de Nethys?


 

Ainsi donc, le départ de Stéphane Moreau, l’administrateur-délégué de Nethys, réclamé en vain depuis trois ans par l’autorité wallonne, serait prochain, si on doit en croire les confidences de Pierre Meyers, le président du conseil d’administration de la société au Soir de ce jour?

Cette sortie de scène avant que les nouvelles procédures envisagées, après examens et débats d’usage, par le Parlement wallon et par Pierre-Yves Dermagne, le tout nouveau ministre régional des Pouvoirs locaux, ne puissent arriver à leur terme, correspondrait assez au personnage, qui se croit ou se sait hors d’atteinte. Une forme de pied de nez ultime…

Mais surtout, avec les révélations en chaîne des offres liantes conclues pour la vente du réseau VOO au fonds d’investissement états-unien Equity Providence et pour celle de WIN, la filiale de Nethys en charge des nouvelles technologies à la société Ardentia Tech créée ensuite par François Fornieri, administrateur de Nethys, qui en a confié la gestion quotidienne à Stéphane Moreau dans un parfum de double conflit d’intérêts; après l’annonce de la cession prochaine d’Elicio, la filiale « Énergies nouvelles » de Nethys à un consortium formé de John Cockerill, ci-devant CMI et… Ardentia Tech à nouveau, puis avec les récentes envisagées de la compagnie d’assurance L’Intégrale –peut-être à DKV, mais la piste d’un rapprochement avec APICIL, mutualité française déjà actionnaire de L’Intégrale, est évoqué par Nethys- et in fine le dégagement de Nethys des Éditions de l’Avenir (une décision qui ne désolerait pas leurs rédactions), c’est à un nettoyage industriel par le vide que le patron de Nethys semble occupé essentiellement pour l’instant.

Une fois cette coquille vide, et NewCo1, où est actuellement logée la marque VOO tranformée en instrument financier, sur le mode de Finanapart, dont la suppression vient d’être décidée, il n’aurait évidemment que peu de raisons d’y rester.

Reste l’ironie des commentaires des responsables politiques qui défendaient naguère sa gestion malgré ses errements en plaidant que la direction du câble wallon restait en Wallonie alors que celle du câble flamand était depuis longtemps entre mains états-uniennes. Et, si nous étions échevin des Finances d’une commune liégeoise, des questions nous tarauderaient sur l’usage qui a été fait des investissements réalisés à l’époque lointaine où l’Association Liégeoise d’Électricité était dirigée par des responsables pénétrés de l’idée de l’initiative publique. Et qui en investissant dans la câblo-distribution il y a un demi-siècle, étaient encore bien plus visionnaires qu’ils ne le pensaient

Retrait prudent

Un rebondissement: Stéphane Moreau a annoncé son retrait de la structure d’Ardentia Tech. Manière d’écarter définitivement tout soupçon de conflit d’intérêt, malgré les assurances données en la matière par le président du conseil d’administration de Nethys, Pierre Meyers? Ce dernier a pourtant donné toutes les assurances que les dispositions du Code des entreprises ont été respectées, sous le regard d’éminents avocats.

Mais reste peut-être une forme de délit d’initiés. L’infraction ne touche qu’à des sociétés cotées (la désormais ex-patronne de Proximus en fait l’expérience pour l’instant), mais il n’empêche, dans les opérations annoncées, il doit y avoir eu comme une distorsion de concurrence: au moment où le conseil d’administration de Nethys a décidé de vendre les filiales concernées, un de ses administrateurs a pu les racheter avant que la mise en vente ne soit officiellement annoncée. D’autres amateurs potentiels se sont depuis lors fait connaître, et on estimé que le prix de vente de ces filiales était sous-estimé. On attendra les avis des experts mandatés par le conseil d’administration d’Enodia, puis un éventuel débat au Parlement wallon, pour savoir le fin mot de cette histoire.