Desmond Tutu, un géant à la petite taille


Le monde entier rend hommage à Mgr Desmond Tutu, le premier archevêque noir d’Afrique du Sud, porte-parole inlassable de la population noire durant la période de l’apartheid, et artisan majeur de la réconciliation après la promulgation de la nouvelle Constitution et l’élection à la présidence de Nelson Mandela, décédé ce dimanche à l’âge de 90 ans

Le propos, icî, n’est pas d’ajouter quoi que ce soit qui ajoute à son aura, mais simplement de rappeler un souvenir, qui témoigne de l’extraordinaire charisme de cet homme petit par la taille, immense par sa personnalité.

Passage de témoin

C’était en 2005 ou en 2006. Louis Michel, alors commissaire européen chargé du Développement et de l’Aide humanitaire, avait organisé à Bruxelles un sommet -le premier du genre?- entre l’Union européenne (UE) et l’Union Africaine (UA).

Cette initiative n’est, soit dit au passage, pas restée sans lendemain puisque, il y a quelques jours, la présidence du Conseil européen, occupée on le sait par Charles Michel qui reprend ainsi le témoin de son père, a annoncé pour les 17 et 18 février prochains l’organisation, à Bruxelles à nouveau, du sixième sommet entre l’UE et l’UA, avec l’ambition de renouveler le lien entre les deux institutions.

Un homme petit par la taille, grand par son message…

Retour au sommet de 2005 ou 2006. Sa conclusion était prévue un vendredi matin, avec une intervention de conclusion de Mgr Desmond Tutu, programmée vers 13 heures

Les palabres, toutefois, avaient pris beaucoup plus de temps que prévu, et au moment où l’archevêque du Cap aurait dû s’exprimer, on commençait seulement à présenter les conclusions du sommet. Et les minutes s’égrenaient pour un aréopage où les chefs d’État et de gouvernements africains et les responsables européens, Louis Michel en tête, étaient très nombreux. Et on se prenait à penser que leurs estomacs s’étiraient en même temps que le nôtre dans l’attente de l’intervention du porte-parole de la lutte anti-apartheid.

Desmond Tutu a enfin pu s’exprimer, avec, de mémoire, une heure de retard. Il n’a pas abrégé son intervention, qui s’il m’en souvient bien, a duré de 30 à 45 minutes… durant lesquelles, après le brouhaha précédent, on aurait entendu une mouche voler.

M’est restée l’impression de la puissance d’un verbe, qui n’avait pas besoin d’être hurlé pour être entendu. Cet homme, dont la petite taille m’avait surpris, était un géant humaniste…

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Sans crédibilité, pas de confiance dans la démocratie


Si la déontologie journalistique interdit de traiter des sujets dans lesquels on est personnellement impliqué(e), dès lors que le problème est résolu, la réserve peut, à mon sens être levée. Surtout si le propos n’est pas de défendre une thèse, mais d’en tirer des leçons.

L’affaire, en soi, est simple: des riverains d’une rue où des égouts ont été implantés et où des trottoirs ont été aménagés en 2013-2014, ont contesté des taxes sur l’implantation de l’égout, sur le raccordement à l’égout, et sur la construction des trottoirs, dont le montant leur a été réclamé en décembre 2020, soit plus de six ans après la fin des travaux. Et ils ont obtenu gain de cause: les taxes ont été annulées par le collège communal, de Dison en l’occurrence, après audition de l’avocate en charge du dossier, qui n’a donc jamais atterri en Justice. Et elles leur seront remboursées.

L’affaire a été évoquée par le quotidien qui m’a employé pendant de nombreuses années et qui (air connu) m’a rétribué pour ce faire insuffisamment à mes yeux. Et les responsables communaux, invités à expliquer leur revirement, ont soigneusement botté en touche.

«L’avocat des riverains a mis en valeur que le règlement n’a pas été publié aux valves communales, ce qui l’a rendu caduc», a ainsi balayé l’échevin des Finances.

Le problème est que cet argument… ne figurait nullement dans la requête de la plaideuse. Laquelle soulignait une pratique douteuse, sinon inadmissible: la mise en œuvre, pour l’enrôlement de ces taxes, de règlements communaux à… caractère rétroactif.

La manœuvre était mal ficelée: la référence renvoyait à deux règlements différents, l’un du 17 septembre 2018, l’autre du 17 novembre 2014, tous deux postérieurs à l’exécution des travaux. Dans l’un et l’autre cas, une règle fondamentale était ainsi violée: «selon la Cour de cassation, la non-rétroactivité doit être considérée comme un principe général de droit dont le respect s’impose notamment aux administrations locales de manière contraignante», rappelait le recours introduit par l’avocate au nom des riverains.

La manœuvre était aussi sournoise: le règlement qui s’appliquait pour l’enrôlement de cette taxe précisait que cet enrôlement devait s’effectuer dans les trois ans suivant l’achèvement des travaux. Le délai d’enrôlement était donc prescrit. On peut mieux comprendre pourquoi ces taxes ont été annulées avant d’être soumises à l’examen d’un juge!

Des travaux qui donnent de avantages privés ou qui relèvent de la mission de service public?

Les règlement visés n’étaient pas motivés, «mais l’objectif de ces taxes semble certainement être le suivant: permettre à la Commune de récupérer tout ou partie des dépenses effectuées par elle pour créer, améliorer les voiries, car ces travaux sont censés apporter une plus-value aux propriétaires, bénéficiant ainsi aux contribuables», ajoutait le recours.

«En ce qui concerne spécifiquement les trottoirs, cette dépense a été réalisée par la Commune dans l’intérêt général, en vue de profiter éventuellement à la communauté, alors que seul un groupe limité de redevables est soumis à la taxe. Il est donc manifestement déraisonnable et contraire aux principes d’égalité et de proportionnalité d’appliquer la taxe lorsque le propriétaire ne tire pas d’avantage de l’égout placé ou des trottoirs réalisés» poursuivait le texte.

La Commune ne respecte pas non plus le principe d’égalité lorsqu‘«elle fait supporter par une partie des contribuables (…) des travaux de voirie (revêtement et égouttage) visant à faciliter la sécurité et le flux des véhicules dans la localité, c’est-à-dire lorsqu’elle assure sa mission de service public» ajoutait l’avocate.

On pourrait ajouter que l’égouttage et l’épuration sont des objectifs imposés par l’Union européenne à ses États-membres, et, partant, à la Région et aux différentes communes: n’envisager les travaux que sous l’angle d’hypothétiques plus-value privées est en soi suffisamment spécieux.

Cette argumentation détaillée montre surtout que l’échevin des Finances, interrogé par une de mes ex-collègues, ne connaissait pas du tout son dossier, ou s’est payé la tête de son interlocutrice.

La bourgmestre, qui s’exprimait elle aussi, a renvoyé la patate chaude à son prédécesseur, en place au moment de la réalisation des travaux, oubliant qu’elle avait eu deux ans pour tenter de sauver les meubles. Et elle a incriminé les services communaux, en assurant que les procédures avaient été redéfinies, depuis lors, pour éviter que pareille méprise se reproduise dans le futur. Évitant ainsi toute réponse sur les objections soulevées au principe même de ces taxes.

Les explications semble traduire à tout le moins un malaise au sein même de l’administration communale, à la fois au sein du groupe majoritaire et entre le collège communal et son personnel.

Elles interrogent surtout sur la désaffection constatée, notamment des jeunes électrice et des jeunes électeurs, à l’égard de la démocratie. Ce n’est pas en se défaussant de ses responsabilités, à quelque niveau que ce soit, qu’on pourra les inciter à revoir leur opinion…