Monarchie: et si on remettait la balle au centre?


La frénésie médiatique qui s’est emparée des médias, ces derniers jours,est de nature à provoquer l’indigestion chez de nombreux utilisateurs des médias, dont je suis. Point trop n’en faut, et dans la concurrence «monarcholâre» effrénée que se livrent la RTBF et RTL-TVI d’une part, les quotidiens de l’autre, l’information authentique va être noyée. Dans le même temps, les opinions qui naviguent à contre-courant n’échappent pas non plus à la généralisation, et aux approximations pas toujours innocentes. Il serait urgent de remettre la balle au centre, et de ne tomber ni dans la sacralisation, ni dans l’approximation. Même si, ce dimanche, les torrents de platitudes qui déferleront sur nos ondes empêcheront toute réflexion à ce propos.

Que l’abdication d’Albert II fasse l’objet d’une large couverture médiatique, en soi, n’est pas anormal. Un changement à la tête de l’État, que ce soit en République ou dans une monarchie, capte toujours l’attention des médias. Et après tout, contrairement à leurs collègues néerlandais, les souverains belges n’ont pas pris pour habitude de quitter leurs fonctions avant leur décès. La seule exception historique que nous avons connue jusqu’ici est l’abdication de Léopold III, en 1950. Une abdication contre laquelle le quatrième roi des Belges s’est insurgé jusqu’à la dernière minute, tentant de former un gouvernement personnel qui le maintiendrait sur le trône, mais à laquelle il a fini par consentir sous la pression populaire.

1386127_3_f935_le-roi-albert-ii-de-belgique-et-la-reine-paolaRien de tel ici: le roi Albert II prend sa retraite, tout simplement. Et il passe le témoin en toute sérénité, du moins on le suppose, à son héritier. Lequel, à 53 ans, va devoir prouver qu’il est bien à même d’occuper la fonction de chef de l’État.On sait que les polémiques ont été nombreuses, surtout en Flandre, à ce propos. La question, aujourd’hui, n’est plus tellement de savoir si le futur roi Philippe est suffisamment formé pour le poste: le temps lui a été largement donné de s’y préparer. Mais elle est de connaître la conception qu’il aura de son rôle. Plus d’un interlocuteur a émis les craintes qu’il se sente investi d’une «mission», la lutte contre le séparatisme flamingant, à l’image de son défunt oncle le roi Baudouin. La composition de son entourage, à cet égard, sera cruciale…

Ces réflexions ne doivent pas occulter l’offensive médiatique qui s’est déclenchée il y a un peu plus de deux ans pour redresser l’image de Philippe dans l’opinion publique, et qui culmine en ces jours-ci par les portraits à l’eau de rose qui sont dressés de lui. Il devient urgent de le prendre en considération  avec la pondération voulue.

Dans l’autre camp, les tenants d’une forme républicaine d’exercice du pouvoir, incontestablement plus démocratique que sa transmission héréditaire, n’évaluent pas non plus toujours la monarchie belge dans ses limites réelles. Dans un éditorial récent, Bart Sturtewagen, éditorialiste au très flamand «Standaard» – ce quotidien même qui, naguère, se précipitait à Laeken se faire congratuler par Albert II pour une initiative journalistique prétendument unique dans la presse belge avec «Le Soir» –  juge ainsi, de manière un peu lapidaire, que la monarchie belge ne doit son existence qu’à notre «particratie». Le terme, soit dit au passage, étonne un peu sous sa plume, car même si le «Standaard» n’est pas précisément progressiste, il n’utilise pas souvent  ce vocable, plutôt réservé aux tenants d’une droite dure voire extrême. Et l’éditorialiste lui-même côtoie quotidiennement ceux qu’il stigmatise ainsi sous ce terme méprisant…

220px-Leopold_I_by_Franz_WinterhalterCette mainmise des partis sur la monarchie, Bart Sturtewagen la situe dès l’origine, puisque les révolutionnaires de 1830, rappelle-t-il, souhaitaient créer une République belge. Le fait est incontestable, mais il est tout aussi notoire que les grandes puissances de l’époque (la Russie, l’Autriche-Hongrie, et surtout le Royaume-Uni) ne voulaient pas, quarante-et-un an après la Révolution française, voir renaître une République sur le sol européen. Et c’est le réalisme politique, plus que la particratie (et d’ailleurs, les partis politiques n’existaient pas en tant que tels) à l’époque, qui a imposé au gouvernement provisoire de l’époque le choix d’une forme monarchique pour le futur État. Mais comme ils avaient une maturité certaine, et Bart Sturtewagen ne le rappelle, pas, ils ont donné une forme… républicaine à cette monarchie, dont le titulaire, n’avait pas de pouvoir réel. La Constitution belge de 1831 a été à juste titre considérée comme la plus libérale du monde à son époque; et elle a été par la suite transposée dans de nombreux pays. Le premier roi des Belges -et pas «roi de Belgique», tout est dans l’appellation! – n’aura de cesse de tenter de s’arroger plus de pouvoirs que le texte ne lui en reconnaissait. «Vous avez bien mal traité la monarchie» dira-t-il, dépité, à ses ministres…

Ses successeurs, eux aussi, ont voulu dépasser les bornes de leurs responsabilités. Léopold II a régné sans partage sur le Congo; Albert Ier a violé la Constitution, mais pour la bonne cause, en imposant le suffrage universel (masculin) au sortir de la Première guerre mondiale; et Léopold III a, dans l’air du temps, rêvé de créer une forme de «dictature royale».

dyn003_original_250_284_gif_2522062_de217d57735f0504552ec83a35ee067fL’action du quatrième roi des Belges aurait dû conduire à la disparition de la monarchie, poursuit Bart Sturtewagen: elle n’a été sauvée, une nouvelle fois, que par la particratie. C’est oublier que l’effacement de Léopold III au profit de Baudouin, en 1950, a certes fait l’objet d’un compromis politique (mais n’oublions pas le rôle des anciens prisonniers politiques, rescapés des camps de concentration nazis, pour le forcer), mais a surtout préservé la Belgique d’une guerre civile entre la Wallonie républicaine et la Flandre monarchiste d’alors.

La démonstration de Bart Sturtewagen se poursuit avec le rappel du refus de feu le roi Baudouin de signer la loi sur l’avortement. L’impossibilité temporaire de régner qui lui a alors été reconnue a nourri bien des discussions. Mais dans la Belgique largement fédéralisée d’alors, quelle alternative crédible aurait-elle été possible, sinon une… abdication?

Depuis les années 50, par un de ces renversements curieux dont l’Histoire a le secret, les tendances se sont inversées: la Wallonie est aujourd’hui beaucoup plus monarchiste que la Flandre. Et même si on s’accorde sur le fait que la forme républicaine d’exercice du pouvoir est la plus démocratique, son application, dans la Belgique d’aujourd’hui, se heurterait de front à la majorité flamande en place au niveau national. Car pareil scrutin ne pourrait se dérouler qu’à l’échelle nationale. Et, en cela, la démonstration de Bart Sturtewagen peine à atterrir. Car aussi favorable qu’on puisse être, en Wallonie, à l’élection d’un(e) président(e) de la République au suffrage universel, très peu d’électeurs, sans doute, souhaiteraient se retrouver avec un Bart De Wever à la tête de l’État fédéral!

Comme notre confrère le souligne en outre lui-même, la fonction royale a évolué au fil du temps. Dans le sens, d’ailleurs, d’une constante réduction de ses pouvoirs, qu’ils soient ceux que les premiers rois s’étaient arrogés au fil du temps, ou qu’ils soient constitutionnels, par le jeu des réformes successives de notre texte fondamental. Cette évolution devra se poursuivre avec le roi Philippe. Quels que soient les lauriers que lui tresseront sans mesure, demain et dans les jours à suivre, tous les médias confondus…

La Justice française au secours de la liberté d’expression


La cour d’appel de Paris a enfin rendu son arrêt à la fin juin: elle  a confirmé le jugement du Tribunal correctionnel du 19 octobre 2006, et condamné Philippe Karsenty pour diffamation à l’encontre de Charles Enderlin et France Télévisions à la suite de ses accusations infondées sur le reportage effectué sur la mort de Mohamed Al Durah.

sante2Mohamed Al Durah, ce nom ne vous dit peut-être plus rien? C’est cet enfant palestinien de 12 ans, mort sous les balles de l’armée israélienne, le 30 septembre 2000, au carrefour de Netzarim, dans la bande de Gaza. La région, alors est en pleine Intifada, à la suite de la visite sur l’esplanade de la Mosquée, à Jerusalem, du Premier ministre israélien Ariel Sharon (dont, soit dit au passage, on ne se rappelle plus qu’il vit depuis des années dans un état végétatif). Les soldats israéliens ouvrent le feu: Mohamed est tué, et son père, Jamal, est grièvement blessé.

Accompagné de  Talal Hassan Abu Rahma, un cameraman palestinien de France 2, Charles Enderlin est présent. Le reportage qu’il présentera au monde entier, sur les images tournées par son compagnon, provoqueront une onde de choc médiatique, sociétale, et politique.

C’est la raison pour laquelle depuis lors, notre confrère, de nationalité franco-israélienne, et un des meilleurs spécialistes du Proche-Orient, est pratiquement depuis lors l’objet d’une campagne de dénigrement et de haine inimaginable. On l’a accusé d’avoir présenté un reportage trafiqué, on a affirmé que l’adolescent est mort sous des balles palestiniennes, et on a même prétendu que les blessures graves dont souffrait son père, opéré en urgence, étaient des blessures très anciennes, attestées par des cicatrices vieilles de plusieurs années.

Toutes ces attaques, Charles Enderlin les a endurées. Les plus féroces sont (évidemment) venues de France. Et  Philippe Karsenty, fondateur de l’agence de notation des médias Media-Ratings, s’en est fait l’un des plus ardents activistes. Condamné en première instance pour diffamation, en 2006, il avait été acquitté deux ans plus tard en appel. Mais Charles Enderlin et France 2 n’ont pas lâché prise. La Cour de cassation française ayant cassé l’arrêt d’appel, le procès a repris devant une autre cour d’appel l’an dernier. Et, à la fin juin, l’arrêt est tombé: le jugement du 19 octobre 2006 est confirmé, et M. Karsenty est condamné à verser 7000 euros de dommages et intérêts, au lieu de l’euro symbolique qui lui avait été infligé à l’origine.

charles-enderlin-L-1France Télévision et Charles Enderlin se sont réjouis de cette décision de justice «qui vient sanctionner une grave atteinte à un journaliste» a commenté leur avocate.

Cela ne suffira évidemment pas à mettre fin à la campagne de diffamation qui le vise et qui a repris dès le lendemain de l’arrêt favorable au journaliste.

Mais à tout le moins, la Justice française aura-t-elle définitivement posé que Mohammed Al Durah est mort sous les balles de l’armée israélienne, le 30 septembre 2000. Si la vérité est toujours la première victime d’une guerre, la rétablir est d’autant plus crucial.

Informed? Informé? Informado?


NUJ.orgThe NUJ Code of Conduct is exemplary: it lists the ethical duties each journalist is expected to comply. You could then expect the NUJ self respects its own Code. Suprisingly enough, the report on the disputed and irregular presidential election which took place at the IFJ Congress in Dublin seems to forget at least this Code’s second bullet-point.

On the NUJ Website, only part of the truth is exposed: the news mention indeed that the (irregularly) reelected IFJ President had an opponent, whom he beat by 191 votes to 173. But you’ll seek in vain any mention of the 5 voting bulletins in excess that were found in the ballot box.

But the best is yet to come: in the 1 June issue of «Informed» (!), the NUJ Newsletter to its members, under the title «Victory for Jim at IFJ world congress», you don’t even read that the (irregularly) reelected IFJ president had an opponent! And of course, nothing is written about the bulletins in excess…

Would you really describe such «information» as «honestly conveyed, accurate, and fair»?

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Le «Code de conduite» de la NUJ est exemplaire: il dresse la liste de tous les devoirs déontologiques auxquels les journalistes sont supposés se conformer. On en déduit donc que la NUJ elle-même respecte son propre code. Or, très étonnamment, il faut bien constater que la relation qu’elle donne de l’élection présidentielle disputée (et irrégulière) qui s’est déroulée lors du dernier congrès de la FIJ à Dublin ne répond pas au moins au deuxième principe énoncé dans ce code.

Ainsi, le site Web de la NUJ n’expose qu’une partie de la vérité: l’article relatif à cette élection mentionne effectivement que le président (irrégulièrement) réélu de la FIJ l’a emporté de justesse (191 voix contre 178) face à son opposant, mais il «oublie» bizarrement de mentionner les 5 bulletins de vote excessifs retrouvés dans l’urne.

Mais le meilleur est à venir: dans le numéro daté du 1er juin 2013 d’«Informed» (!), la lettre d’information de la NUJ à ses membres, l’article intitulé «Victoire pour Jim au congrès mondial de la FIJ», il n’est plus question, ni d’un opposant, ni des bulletins de vote en excès.

Peut-on vraiment dire de cette «information» qu’elle est «honnêtement reproduite, précise, et équilibrée»?

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El código de conducto de la NUJ es ejemplar: da la lista de lors principios éticos que cada uno (una) periodista debe respetar. Se puede entonces suponer que la NUJ mesma respete sus proprios principios. Pero de manera muy extraña, hay que constatar que la relación que da de la disputada (y irregular) elección presidencial que tuvo lugar durante el reciente Congreso de la FIP en Dublin no respeta a lo menos uno de estos principios.

La relación en el sitio Web de la NUJ señala solamente parte de la verdad: explica ya que el (irregularmente) reelegido presidente de la FIP tuvo un adversario que venció con 191 votos contra 178. Pero «olvida» lors 5 boletines de voto in exceso que fueron encontrados en la urna.

Pero lo mejor esta en el numero del 1 de Junio de «Informed» (!) , la carta de información de la NUJ a sus proprios miembros. Sobre el titulo «Victoria para Jim en el Congreso mondial de la FIP», no hay ninguna mención ni de un adversario, ni de lors boletines de voto in exceso.

Se puede decir veramente de esta información que es «honestamente reproducida, precisa y equilibrada»?