L’exclusion de Marc Tarabella démontre l’inconséquence du PS


Le député européen et bourgmestre socialiste d’Anthisnes, Marc Tarabella, est désormais écarté de l’Alliance Progressiste des Socialiste et Démocrates au Parlement européen, où il siège depuis 2004, et il est, par surcroît, exclu du Parti Socialiste. Une exclusion temporaire, a-t-on expliqué au Boulevard de l’Empereur, jusqu’au moment où l’enquête sur la corruption au Parlement européen aura conduit soit à son inculpation, soit à son innocence.

Les «révélations», ou pseudo-révélations du «repenti» italien, Pier Antonio Panzeri, l’ont, il est vrai, gravement mis en cause ces derniers jours: à en croire certaines fuites, son ancien collègue au Parlement européen l’accuserait d’avoir perçu 120000 euros en provenance du Qatar. Et Panzeri, dans le même temps, a complètement innocenté Marie Arena, compromise elle aussi par un voyage dans l’émirat qu’elle avait opportunément omis de déclarer.

Marc Tarabella s’est-il laissé acheter? L’enquête devra le démontrer. La perquisition menée tambour battant à son domicile n’a en tout cas pas laissé apparaître le moindre pactole. Et ses concitoyens d’Anthisnes ont peine à croire que leur bourgmestre, resté très proche d’eux, ait ainsi cédé à une offre sonnante et trébuchante.

Pour l’heure, Marc Tarabella, mis en cause par des «fuites», n’est pas inculpé…

Pour ma part, pour bien connaître Marc Tarabella depuis de très nombreuses années, j’avoue que je serais à la fois très surpris et très cruellement déçu si l’enquête, au bout du compte, démontrait que s’il a changé d’opinion sur l’organisation du dernier championnat du Monde de football au Qatar, c’est après s’être laissé convaincre par une valise de billet. Jusqu’à preuve du contraire, je m’accroche à la présomption d’innocence dont bénéficie chaque inculpé. Et je rappelle qu’à l’heure présente, le bourgmestre d’Anthisnes, qui a déjà réclamé à plusieurs reprises d’être entendu par Michel Claisse, le juge d’instruction en charge du dossier, n’est toujours pas inculpé.

La précipitation avec laquelle le Parti Socialiste l’a exclu, fût-ce de manière temporaire, n’en est dès lors que plus choquante. Et pose question sur la manière dont le PS exclut ou non ses membres. Une manière en apparence très arbitraire, qui semble essentiellement relever du bon vouloir du prince, entendez, du président du parti, Paul Magnette.

Comme le rappelait avec beaucoup de pertinence Bertrand Henne, ce matin, sur La Première, le Parti Socialiste ne respecte en rien les règles qu’il avait édictées, il y a plusieurs années, quand avaient éclaté les affaires dites de Charleroi. Celles qui avaient conduit le président du parti de l’époque, Elio Di Rupo, à jeter qu’il en avait «marre des parvenus» (sic)!

En principe, selon ces règles, tout mandataire inculpé devait être exclu du PS. Mais rapidement, il est apparu qu’une inculpation pouvait déboucher sur un non-lieu, voire un acquittement. Dès lors, la règle a été illico vidée de sens.

Il arrive néanmoins que des inculpés finissent par être condamnés. Ce fut le cas, récemment, de M. Jean-Charles Luperto, définitivement condamné dans une affaire de mœurs. Oui, mais hum, Jean-Charles Luperto est un gros faiseur de voix à Sambreville, et l’exclure risquait de le voir conduire, en 2024, une liste du bourgmestre qui aurait privé le PS du mayorat dans une ville importante de la province de Namur. On a donc inventé une excuse selon laquelle cette condamnation n’est en rien liée à l’exercice d’un mandat politique (!), et on a oublié la «blague» qu’il avait faite auparavant à son collègue de Jemeppe-sur Sambre, qu’il avait menacé de mort, en estimant que cette plaisanterie lui avait coûté un mandat ministériel. Le camarade reste donc un camarade. «Je suis le champion de l’éthique» a expliqué le président du PS, ce jeudi soir, au JT de La Une, juste avant la séance des vœux de son parti. On doit donc en conclure que, pour lui, se poster dans les toilettes d’une station d’autoroute, en quête d’une relation homosexuelle furtive est un acte parfaitement éhique…

Stéphane Moreau, ancien bourgmestre d’Ans et ex-patron de Nethys, a, lui, été exclu du PS en avril 2017, en pleine révélation des manœuvres financières et d’une fraude à l’assurance qui lui avaient bénéficié. L’ancien député provincial sérésien André Gilles, ex-président du conseil d’administration de l’intercommunale Publifin, aujourd’hui Tecteo, dont dépendait Nethys, a été lui aussi exclu en même temps du parti: la règle vide de sens a été appliquée à leur endroit, sans que personne la remette en cause. Pour rappel, à nouveau, à l’heure présente, Marc Tarabella n’est pas inculpé dans le «Qatargate».

Il y a un an Alain Mathot, l’ancien député-bourgmestre de Seraing, condamné pour corruption, a préféré, lui, se retirer du PS, avant de subir une exclusion qui lui semblait devenue inévitable.

Et puis il y a eu les exclusions pour cause de divergence politique avec certains mandataires. Emir Kir, le populaire député-bourgmestre de Saint-Josse a été «dégommé» pour son refus de reconnaître le génocide arménien et pour sa proximité avec des «Loups gris», la milice d’extrême-droite turque. Son exclusion temporaire, largement approuvée, va bientôt prendre fin… sans qu’on sache si, sur le génocide arménien, sa position ait évolué. Lui aussi est une «machine à voix»…

La bourgmestre de Verviers, Muriel Targnion, et son échevin des Finances, Alexandre Loffet, ont, eux été exclus, en violation des règles internes du PS soit dit au passage, parce qu’ils n’étaient pas revenus sur leur signature au bas d’une motion reniée, sous pression, par certain(e)s de leurs ancien(ne)s colistier(e)s, demandant le retrait du mandat d’un président du CPAS, lui aussi PS, dont le comportement politique posait problème à la gestion de l’ancienne cité lainière. La tentative de mettre un autre bourgmestre de consensus, feu Jean-François Istasse, à la place de Muriel Targnion, ayant échoué, le-dit président du CPAS a tout de même été écarté. Et dernier épisode en date, Alexandre Loffet, ancien président de la fédération verviétoise du PS, qui devait démissionner en ce début d’année pour faire place à un(e) socialiste «orthodoxe»…. a été réintégré au parti. Manière de lui éviter de nouveaux déchirements.

La jurisprudence du Parti Socialiste, on le voit, est à géométrie (très) variable, et le tort principal de Marc Tarabella est sans doute d’être le bourgmestre d’une… petite commune condruzienne, et de ne pas peser suffisamment lourd. Comme l’écrivait déjà Jean de la Fontaine, selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous feront blanc ou noir…

L’étrange mansuétude du PS à l’égard du bourgmestre de Sambreville tranche avec son intransigeance avec des élu(e)s verviétois(e)s


Ainsi donc, après s’être muré dans le silence, le président du parti socialiste, Paul Magnette, dont l’avis avait vainement été sollicité auparavant, a fait répondre, par son directeur de la communication, à Samuel Sinte et Guillaume Barkhuysen, mes anciens collègues du journal qui m’a employé pendant de nombreuses années mais ne m’a jamais assez rémunéré à mon goût (air connu), que «la décision de la Cour européenne des Droits de l’homme (relative au bourgmestre de Sambreville, Jean-Charles Luperto, Ndlr) n’est pas une surprise. Elle ne constitue pas un élément nouveau par rapport à ce qui a été décidé l’année dernière».

Pour rappel, la veille, mes anciens et excellents confrères avaient révélé qu’en décembre dernier, le recours que Jean-Charles Luperto avait adressé à la Cour de Strasbourg avait été déclaré «irrecevable». Et que dès lors, après l’échec de son pourvoi en Cassation, sa condamnation à six mois de prison avec sursis pour outrage aux mœurs, prononcée par la Cour d’appel de Liège, le 29 septembre 2020, était devenue définitive… dans le plus grand secret. Car ni l’intéressé, ni son avocat, ce qu’on peut comprendre, n’avaient signalé l’échec de leur appel à la Cour européenne des Droits de l’homme; et le PS lui-même est resté dans l’apathie la plus totale.

Interrogé l’année dernière, le président du PS, Paul Magnette, avait expliqué que, dans l’attente de la décision de la Cour de Strasbourg, «personne, pas même parmi ses adversaires politiques locaux» n’avait réclamé la démission du bourgmestre de Sambreville, et qu’entre-temps, «les électeurs lui avaient renouvelé leur confiance, malgré son affaire».

Jean-Charles Luperto est condamné définitivement pour outrages aux mœurs mais, pour le PS, ses adversaires politiques ne demandent pas sa démission, et la population lui a renouvelé sa confiance. Pas de quoi s’émouvoir!

Une étrange mansuétude, dont n’avait pas fait preuve, dans le passé, le PS à l’égard de Stéphane Moreau, ancien bourgmestre d’Ans, et d’André Gilles, ancien député provincial: le premier avait démissionné du parti avant d’en être exclu, tandis que le second en avait été exclu, à la suite de leur gestion calamiteuse du dossier Nethys.

Emir Kir, bourgmestre PS de Saint-Josse, a fait l’objet d’une exclusion de trois ans, à la suite de la réception qu’il avait offerte à six maires turcs, deux membres d’un parti proche de la sinistre milice d’extrême-droite des «Loups Gris».

Benoît Hons, échevin à Neupré, a été exclu en janvier 2020 pour propos injurieux envers les gens du voyage proférés sur Facebook, notaient encore mes anciens collègues.

Quant à Alain Mathot, ancien bourgmestre de Seraing, il a démissionné du parti en mars dernier (avant d’en être exclu?), à la suite de sa condamnation pour faits de corruption.

Samuel Sinte et Guillaume Barkhuysen rappelaient aussi l’exclusion de l’ancien échevin de Charleroi Claude Despiegeleer par la commission de vigilance du PS, pour ses condamnations dans les affaires de «La Carolorégienne».

Paul Magnette utiliserait-il donc un instrument à deux poids deux mesures, qui vaut exclusion, spontanée ou forcée du Parti socialiste, à l’ensemble des mandataires condamnés, sauf pour…. Jean-Charles Luperto, bourgmestre de Sambreville?

On a connu le président du PS beaucoup plus vindicatif à Verviers, quand il s’est agi de sanctionner la bourgmestre, Muriel Targnion, et ses fidèles au sein du collège communal, qui avaient eu l’outrecuidance de vouloir écarter un président de CPAS, tout aussi socialiste qu’eux, qui se refusait à tout contrôle de l’exercice de sa fonction!

Le Boulevard de l’Empereur avait alors «fait pression» pour forcer certain(e)s des signataires de la motion de défiance à revenir sur leur parole, quelques jours après avoir approuvé l’initiative mayorale, et à mettre en place un bourgmestre alternatif, feu Jean-François Istasse, au prix d’une manœuvre dont l’illégalité avait ensuite été constatée par le Conseil d’État.

Paul Magnette avait alors fait frapper d’exclusion la bourgmestre de Verviers, et ceux qui étaient restés fidèles à leur signature, dont l’échevin des Finances, Alexandre Loffet, qui fait pour l’instant… fonction de bourgmestre, et devrait céder le témoin d’ici à quelques semaines. Sauf circonvolutions qui le feraient rentrer dans le giron du parti?

Ces exclusions, soit dit au passage, n’avaient pas respecté la procédure interne du parti socialiste, qui aurait dû d’abord faire examiner leur cas par sa Fédération verviétoise. En les envoyant directement vers la commission de discipline (par crainte d’une approbation de leur conduite au plan verviétois?), le président du PS les avait privés d’un droit de recours sans le moindre état d’âme.

Sa passivité devant le dossier de Jean-Charles Luperto n’en est que plus surprenante. Car la barque du bourgmestre de Sambreville est drôlement chargée.

L’homme, on l’a oublié, avait vu une possible carrière ministérielle avortée à la suite d’une «plaisanterie» de très mauvais goût qu’il avait mise sur pied le 21 juin 2007, en menaçant d’incendier la maison du bourgmestre de la commune voisine de Jemeppe-sur-Sambre, Joseph Daussogne.

En novembre 2014, des perquisitions sont menées à son bureau et à son domicile, dans le cadre d’une enquête pour faits de mœurs qui se seraient produits à l’été de la même année, dans les toilettes de la station-service d’autoroute de Spy, sur l’autoroute de Wallonie.

Ces faits verront la levée de l’immunité parlementaire de celui qui était à la fois député wallon et président du Parlement de la Communauté française. Et lui vaudront sa condamnation définitive, le 29 septembre 2020, après une série de manœuvres de retardement judiciaire, qui amèneront son dossier à la Cour d’appel de Liège.

Jean-Charles Luperto se défend toujours des faits d’exhibitionnisme qui lui ont valu sa condamnation. Sa défense a consisté à dire qu’il s’était rendu dans les toilettes de cette aire d’autoroute pour… des rencontres furtives à caractère sexuel!

On voit d’ici l’argument! Si tout être humain, fût-il mandataire politique, a droit à sa vie privée, et que son orientation sexuelle ne peut lui être portée à charge, pareil comportement relève à tout le moins de l’inconduite notoire qui pourrait, ou devrait, lui valoir de ne plus pouvoir exercer une fonction mayorale… qui comprend notamment des responsabilités en matière de police!

Le président du parti socialiste ne pourra pas s’abriter longtemps derrière une communication sibylline, pour justifier une passivité dont l’effet nourrira encore un peu plus le rejet de la politique. Et se révèle désastreuse pour la classe politique wallonne dans son ensemble.

Quand le vote extrême sanctionnera pareille dérive, il sera trop tard pour se lamenter!

Un an plus tard, l’imbroglio politique se prolonge à Verviers


Selon un vieil adage wallon, un nouveau balai balaie toujours mieux qu’un ancien. Et la nouvelle présidente de la fédération verviétoise du PS, Valérie Dejardin, espérait bien, avec le puissant appui de son homologue liégeois, le ministre communautaire Frédéric Daerden, sortir le PS verviétois du marasme dans lequel il est plongé depuis près d’un an, et, par vie de conséquence, du marasme dans lequel les déchirements au sein d’un parti qu’un slogan, jadis, affirmait « fort et uni » a plongé la ville de Verviers.

On se demande néanmoins quelle mouche avait piqué Valérie Dejardin quand elle a tenté (sur ordre du boulevard de l’Empereur?) de relancer l’idée d’un remplacement de la « bourgmestre renégate », Muriel Targnion, par Malik Ben Achour, député fédéral à la suite de la nomination de Frédéric Daerden au gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, qu’on dit par ailleurs peu intéressé par l’écharpe mayorale de l’ancienne Cité lainière. Bourgmestre elle-même de Limbourg, la présidente de la Fédération verviétoise du PS aurait dû pressentir qu’elle courait droit au fiasco.

A moins qu’elle ait voulu procéder par une démonstration par l’absurde?

Elle n’a en tout cas pas trouvé une majorité d’élu(e)s de ce qui reste du PS au conseil communal de Verviers pour appuyer sa proposition. Et on s’oriente donc vers une nouvelle proposition qui prévoirait le maintien de Muriel Targnion. exclue du PS, au mayorat de Verviers jusqu’à la fin de la mandature.

Statu quo ante? Pas vraiment!

On efface donc tout et on en revient à la situation qui prévalait il y a un an, avant que Muriel Targnion, avec le soutien d’une majorité du groupe socialiste au conseil communal de Verviers et de ses partenaires de majorité, ne tente d’éjecter le président du CPAS, Hasan Aydin, de son poste?

Euh, pas vraiment car dans l’aventure, Alexandre Loffet. président débarqué de la Fédération verviétoise du PS, perdrait son mandat d’échevin.

Et pour le reste, on peut cibler:

• Hasan Aydin devrait rester en place. Certes, les relations du président du CPAS avec ses collègues du collège communal de Verviers se sont détendues, mais il nourrit peut-être toujours un espoir d’accéder au fauteuil mayoral. Et le CPAS continue à réclamer à la ville des suppléments de moyens qu’elle ne peut lui concéder

• Des échevins(e)s, notamment socialistes, doivent continuer à travailler avec une bourgmestre qu’elles ont allègrement trahie avant de se rendre solidaires de son exclusion du PS, forcée dans des conditions à tout le moins discutables.

• La ville de Verviers garde une bourgmestre dont on disait, à l’époque où elle présidait le conseil d’administration d’Enodia (où elle a défendu mordicus la gestion calamiteuse de l’administrateur-délégué de Nethys, Stéphane Moreau, ce qui l’a placée dans le viseur du président du PS, Paul Magnette) que la gestion de sa ville ne semblait plus être sa priorité première.

C’est donc un attelage de bric et de broc qui risque donc rester en place à Verviers jusqu’en 2024. Une ville qui, pour rappel, se paupérise chaque jour un peu plus et dont les commerces ferment en série.

Pour en sortir par le haut, deux solutions auraient été envisageables. Une nouvelle élection d’abord, qui aurait permis de rebattre les cartes, mais pour cela, les échevin(e)s auraient dû avoir le courage de démissionner en bloc. Ou alors, puisque les déchirures au sein du PS ont fini par paralyser la ville, la mise sur pied d’une coalition renvoyant le PS dans l’opposition. Là aussi, il aurait fallu du courage politique. Du côté des « verts » verviétois notamment….

La chute de Stéphane Moreau ou la fin d’un système


La presse a fait état, ce matin, d’une quasi non-information: l’avocat de Stéphane Moreau, l’ancien patron tout-puissant de Publifin et de Nethys, a fait savoir que son client niait «avec énergie» les faits mis à sa charge de détournement par personne exerçant une fonction publique, de faux, usage de faux, escroquerie, et d’abus de biens sociaux. Le rappel de la présomption d’innocence dont bénéficie chaque inculpé a toute son utilité, mais il faut bien avouer que le contraire eût stupéfié: que le ci-devant bourgmestre d’Ans reconnaisse sa culpabilité sur toute la ligne. Les arguments brandis par son défenseur ne répondent par ailleurs guère (cf. ci-dessous) aux préventions auxquelles il doit faire face.

La remarque vaut aussi pour Pol Heyse, ancien directeur financier de Nethys, et ancien président du conseil d’administration des Éditions de l’Avenir, où ce personnage pénétré de sa grande valeur a fait la preuve à la fois de son incompétence (invité à plusieurs reprises, d’abord par l’ancien administrateur-délégué, Quentin Gemoets, puis par les délégués du personnel, à venir préciser un projet d’entreprise qu’il avait vaguement brossé le soir même de l’annonce du rachat du groupe à Corelio par l’intercommunale liégeoise Tecteo, non seulement il n’a jamais répondu à l’invitation, mais il n’a même pas accusé réception. Plus tard, on s’apercevra qu’il n’avait aucun projet à exposer dans un secteur où il ne connaissait que dalle ) et de son mépris pour le personnel: assistant à une réunion du conseil d’entreprise comme invité, il s’écriera, en prenant connaissance du nombre de personnes en congé de maladie de longue durée, que c’était «encore pire que dans une intercommunale» (sympa pour le personnel de Resa, par exemple…) et que les gens malades souffraient d’«agueusie, c’est-à-dire de manque de goût pour le travail».

Terreur, séduction et achat

Mais revenons à Stéphane Moreau, dont la chute est d’autant plus spectaculaire qu’il a, pendant quasiment un quart-de-siècle, pratiqué une politique très efficace de domination, par l’achat des personnes dérangeantes ou potentiellement dérangeantes, par la séduction, et parfois par la menace.

L’homme a rodé sa méthode avant de s’imposer comme le patron de l’ancienne Association Liégeoise d’Électricité (ALE) et de son réseau de télédistribution Teledis, ancêtres de Tecteo, rebaptisée ensuite Publifin puis Enodia, et de Nethys, la société anonyme filiale qu’il avait créée pour échapper à un contrôle wallon qu’il avait astucieusement évité.

Avant cela, au début des années 1990, celui qui était alors premier échevin à Ans, exerçait la fonction de secrétaire général de l’Intercommunale d’Incendie de Liège et Environs (IILE).

Le contexte, alors, était tendu: l’IILE avait succédé au Service Régional d’Incendie de Liège (SRIL), que la ville, en état de faillite, n’était plus en état de gérer. Le SRIL avait, comme d’autres administrations liégeoises, été confronté à un plan d’austérité, que les hommes du feu liégeois, gonflés à bloc, avaient refusé. L’épisode donnera lieu à une confrontation insolite entre pompiers et policiers de la Cité Ardente, repoussés par les autopompes des grévistes. L’épisode télévisuel fera pratiquement le tour de la terre!

Au sein de l’IILE, des communes de la périphéries… dont Ans, ne souhaitaient pas éponger les dettes du SRIL. Et les syndicats étaient toujours aussi remontés. Qu’à cela ne tienne: les délégués les plus combatifs disparaîtront bientôt de la circulation, notamment par la grâce d’un engagement au service du premier échevin ansois…

Devenu patron de Tecteo, Stéphane Moreau avait pris de la bouteille. Là aussi, il aura un plan de rationalisation à imposer. Et il le fera par la force. Une autre vidéo, celle où il enguirlande des agents en grève et leurs permanents syndicaux est elle aussi passée à la postérité.

C’est aussi à cette époque qu’il se rend coupable d’un abus de pouvoir étrangement ignoré par l’autorité de tutelle: quand des grévistes occupent le site d’antenne de Teledis, à Ans, et perturbent ainsi le réseau de télédistribution, le patron de Teledis, Stéphane Moreau, s’adresse au bourgmestre d’Ans, Moreau Stéphane, lequel mande sa police communale pour aller déloger les grévistes du site d’antenne, un site par essence privé. Vous avez dit confusion des rôles?

Même attitude à l’égard de la presse critique: des boycotts publicitaires frapperont pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois Vers l’Avenir et Le Soir, après des articles portant sur la multitude de ses mandats, ou qui commencent à interroger sa gouvernance à la tête de l’intercommunale.

Mais l’homme sait aussi se faire charmeur. Il crée le «Voo Rire Festival», et ce festival du rire de Liège lui permettra de nouer de nombreuses relations, auprès des artistes reconnaissant, après de nombreux invités et puis parmi la presse, liégeoise essentiellement. Au banquet final, parmi les quelques «happy few» invités au terme d’un apéritif largement ouvert, on trouvera régulièrement des représentant(e)s de la presse principautaire, dont l’un, plus tard, sera choisi pour tenter, en pure perte, de mettre la rédaction de L’Avenir au pas, et qui a effectué ces derniers jours sur une chaîne d’information continue belge une forme assez remarquable de volte-face par rapport à son ancien protecteur. Parmi les habitués, il y aura aussi des représentants de la «grande presse» dont l’interviewer indéboulonnable d’une chaîne privée, récompensé par une obscure mission de conseiller du grand patron, toujours dans le cadre du rachat des Éditions de l’Avenir par Tecteo (cf. ci-dessous).

On reconnaîtra à Stéphane Moreau une redoutable habileté manœuvrière, quand il soustraira l’intercommunale Tecteo au contrôle wallon, en excipant la présence, parmi les communes affiliées, de Fourons, historiquement desservie par l’ALE, et en plaidant avec succès que l’intercommunale, ainsi bicommunautaire (elle sera même tricommunautaire, plus tard, avec l’adhésion de la commune d’Uccle) échappe au contrôle de la Région wallonne.

Au Parlement wallon, Bernard Wesphael, membre d’un groupe écolo singulièrement écorné, tentera alors de faire adopter un décret pour imposer, malgré tout un contrôle sur Tecteo, mais sa proposition, venant de l’opposition, ne sera jamais retenue…

Ainsi assuré d’une totale liberté d’action, Stéphane Moreau développera Nethys avec d’autant plus de facilité que les plantureux bénéfices de Resa, le réseau de distribution d’électricité qui a succédé à la défunte Association Liégeois d’Électricité, rejointe plus tard par l’Association Liégeoise du Gaz (ALG) , lui permettront de financer notamment l’onéreux développement du réseau câblé de Voo, héritier de Teledis.

Plus tard, son sens de l’ingéniérie financière le poussera à transférer l’argent des pensions des agents de l’ALE, et de plusieurs intercommunales liégeoises dans un Fonds de pension, Ogeo, dont certains investissements se révéleront hasardeux, par exemple en République démocratique du Congo ou surprenants, comme ces investissements immobiliers à Anvers, révélés par une excellente enquête de nos confrères du Vif, dont l’une des retombées sera ce soutien incongru de la N-VA aux élus socialistes de la Chambre, pour faire obstacle à la demande de levée d’immunité parlementaire de l’un d’entre eux, le député-bourgmestre de Seraing, Alain Mathot (cf. ci-dessous), poursuivi dans un dossier de corruption. Les derniers retraités de l’Association Liégeoise d’Électricité, frustrés d’avantages accordées à leurs prédécesseurs tandis qu’eux étaient toujours en activité, tenteront, mais en vain, d’obtenir de la Justice qu’elle force Tecteo à respecter les engagements souscrits par l’ALE.

Collusion politique

Avoir de l’ambition, en tant que chef d’entreprise, peut être collectivement positif. C’est d’ailleurs la parade, aujourd’hui, de Stéphane Moreau, qui, comme si c’était une circonstance atténuante à l’égard des préventions mises à sa charge, et dont, pour l’heure, il est toujours présumé innocent, plaide l’extraordinaire développement de Nethys qu’il a assuré essentiellement, on le répète, avec de l’argent public, provenant de l’intercommunale Publifin, ex-Tecteo et future Enodia, et de sa filiale Resa.

Mais, à force d’échapper à tout contrôle, l’ambition devient débridée. Celle de Stéphane Moreau, sur le plan politique, le conduira à «tuer le père». Michel Daerden, l’inamovible mayeur ansois, est sur le déclin, quand il se sent pousser dans le dos par son peu fidèle premier échevin. Il croit toujours pouvoir mobiliser ses soutiens traditionnels, et lance contre le renégat une motion de défiance… qui se retourne contre lui. Et il ne trouve pas le moindre soutien à la Fédération liégeoise du parti socialiste, où ses manières autoritaires et sa dérive suscitent de plus en plus de réticence. Stéphane Moreau devient donc premier citoyen dans sa commune du plateau liégeois.

Avec le bourgmestre de Liège, Willy Demeyer, président de la Fédération liégeoise du parti socialiste; avec le député provincial sérésien, André Gilles; avec le député-bourgmestre de Seraing, Alain Mathot; et avec Jean-Claude Marcourt, alors ministre wallon de l’Économie, et qui se rêvait ministre-président wallon, il fait ensuite partie du «club des cinq» cadenassant la Fédération.

La protection politique se parfait au sein de la coalition provinciale (la province de Liège est actionnaire majoritaire de l’intercommunale) entre le PS et son partenaire libéral, le MR, conduit par son chef de file, Georges Pire, tandis que le PSC puis le cdH est habilement associé à l’opération, puisque les mandats dans les intercommunales sont distribués selon la clé D’Hondt au prorata de la représentation des partis au sein de l’institution provinciale. On retiendra notamment le rôle joué par l’inamovible chef de groupe social-chrétien, puis humaniste, Dominique Drion dans une série de décisions cruciales.

Stéphane Moreau, qui avait déjà fait entrer Tecteo dans le capital de la société IPM, éditrice de La Libre et de La Dernière Heure, se porte alors acquéreur, à un prix nettement supérieur à leur valeur réelle, des Éditions de l’Avenir.

La manoeuvre avait peut-être dans son esprit pour but de lui assurer une protection médiatique contre d’éventuels futurs orages. Mais là, le calcul allait se révéler foireux.

D’abord parce que le rachat des quotidiens du groupe provoque une levée de boucliers dans la classe politique, où, comme rappelé plus haut, certains iront jusqu’à évoquer une «Berlusconisation» de la presse francophone, en référence au magnat italien de la presse, devenu un Président du conseil des plus discutables.

Très vite, par ailleurs, le conflit éclatera entre un personnel qui avait pu croire dans un projet industriel de Nethys vers des développements numériques, mais constats la vanité de cette attente, et à qui les pressions exercées par le rédacteur en chef de l’époque, et les tentatives de peser sur le contenu des quotidiens, apparurent rapidement insupportables

Le comble sera atteint avec la désignation, au mépris des conventions existantes, d’un directeur des rédactions «aux ordres», qui se signalera dès son arrivée par un éditorial, aux antipodes de la politique d’indépendance du groupe, volant au secours du député-bourgmestre de Seraing, toujours dans le dossier de corruption à sa charge, et dont l’épilogue judiciaire est attendu pour les prochains jours. Plus tard, lors d’une séance au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, invité à se pencher sur une forme de censure exercée par la direction du groupe, l’estime dans lequel cette dernière tenait ce directeur des rédactions sera enregistrée par une autre vidéo particulièrement significative, qui fera le tour de la toile.

L’obsession de l’argent

Autre caillou dans la chaussure de Stéphane Moreau: l’obstination d’un échevin des Finances d’Olne. Cédric Halin a des compétences en matière financière et analytique, et sa présence aux assemblées générales de Tecteo n’avait pas pour but essentiel de voter l’approbation des comptes et la décharge aux administrateurs, avant de se précipiter sur les petits fours de circonstance, mais de comprendre pourquoi les dividendes perçus par la petite commune liégeoise dont il est devenu depuis lors le bourgmestre, fondaient comme neige au soleil.

C’est en tirant sur ce fil que la dérive des comités de secteur, créés au moment de la fusion entre ALE et ALG, et où des mandataires publics se voyaient octroyer une rente mensuelle en compensation de réunions qui avaient… ou n’avaient pas lieu, que le «scandale Publifin» a commencé à éclater, dans la sphère médiatique d’abord, dans les cénacles politiques ensuite, et, de fil en aiguille, se prolongent ces jours-ci sur le plan judiciaire.

Car entre-temps, l’autorité wallonne, réveillée, avait mis des garde-fous en place, notamment pour limiter le salaires de ces super-managers d’autant plus efficaces qu’ils jouent avec de l’argent public, même au travers de sociétés anonyme dont les actionnaires sont tous publics. C’est alors que de faramineuses indemnités compensatoires auraient été subrepticement octroyées à Stéphane Moreau; au directeur financier de Nethys, Pol Heyse; à la directrice générale, Bénédicte Bayer; et une série d’autres personnes, dont certaines, une fois le scandale mis au jour, se sont empressées de rembourser les montants, bien moindres que les millions d’euros évoqués, qui leur avaient été attribués. Pour ainsi sans doute se mettre à l’abri des poursuites.

L’argent semble en effet être le gros point faible de Stéphane Moreau. Comment expliquer, autrement un faux à l’assurance, sous forme d’une police antidatée, pour éviter de devoir rembourser les frais de réparation d’un… abri de jardin détruit par un arbre tombé lors d’une tempête? Ou une domiciliation fictive avec sa compagne, pour majorer le montant d’une assurance-pension à son bénéfice? Et ces tentatives désespérées de vendre pour une bouchée de pain à l’homme d’affaires François Fornieri, lui aussi détenu, au prix d’une forme de délit d’initié puisque ce dernier était administrateur de Nethys, de filiales qui rapportent gros aujourd’hui et dont il aurait dû devenir administrateur-délégué, une fois venue la défenestration qu’il sentait venir?

Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se brise. Les appuis politiques d’hier sont aujourd’hui aux abonnés absents, et les affidés médiatiques, au mieux, jouent la carte de l’oubli, ou ont retourné leur veste. L’ancien patron omnipotent de Nethys et de Tecteo a pu jouer la montre, en (ab)usant de la transaction pénale, pour éviter des condamnations qui apparaissaient inéluctables. Cette voie, aujourd’hui, lui paraît fermée. Lui reste à espérer un acquittement: le travail de ses avocats a déjà commencé.

La désunion règne à Verviers


Le couperet est tombé sur la bourgmestre de Verviers: Muriel Targnion a été exclue du PS. Décision pertinente ou non? Selon le point de vue où on se place, la réponse sera bien différente. Mais ce qu’on peut remarquer, c’est que la procédure utilisée témoigne d’un certain machiavélisme : c’est en effet la commission de vigilance, l’instance déontologique suprême du parti socialiste, qui a prononcé la sentence. L’instance d’appel, en principe: Muriel Targnion aurait dû être entendue d’abord au plan local, où la division des ex-camarades rendait peut-être tout examen serein des faits impossible, ou au niveau de la fédération verviétoise du PS.

Là, c’est sans doute celles et ceux qui ne voulaient pas manquer l’éjection du parti de la bourgmestre verviétoise qui n’en auront pas voulu: la fédération est en effet toujours présidée par l’échevin verviétois des Finances, qui est dans le camp de Muriel Targnion.

En Justice, l’affaire aurait été « déportée » vers un autre arrondissement judiciaire: la fédération liégeoise ou celle de Huy-Waremme auraient pu être chargées d’examiner le dossier. Mais le résultat aurait été aléatoire. Alors, c’est l’instance suprême, celle dont les décisions sont sans appel, qui est entrée en jeu. Et elle a pris la sanction la plus lourde, plus sans doute pour sanctionner la dérive affairiste de Muriel Targnion dans le dossier Nethys, où sa défense de la gestion calamiteuse de Stéphane Moreau et consorts à l’époque où elle présidait le conseil d’administration d’Enodia, son intercommunale faîtière, en a choqué plus d’un, que ses tentatives d’éjecter de son poste le président du CPAS, Hasan Aydin, dont la gestion rétive à toute tutelle et les comportements personnels, sexiste, communautariste et hostile à tout contrôle, de la presse notamment, sont étrangement ignorés.

Cette sévérité, qui n’a pas frappé aussi vite les acteurs du dossier Nethys, aurait-elle sanctionné les tentatives de Muriel Targnion de créer une majorité alternative à Verviers, pendant que l’USC locale était sous tutelle? C’est d’autant moins crédible qu’il semble manifestement y avoir eu d’autres tentatives de mettre sur pied des majorités alternatives dans la cité lainière. Ce qui me conforte dans la conviction qu’on assiste à une espèce de partie de billard à trois bandes dont le résultat aboutira peut-être à mettre et Muriel Targnion et Hasan Aydin à l’écart, ce qui pouvait apparaître au départ comme l’issue la plus logique au conflit qui se muait en guerre de tranchées. Pour confier l’écharpe mayorale à celui qui, proche de Paul Magnette, le président du PS, est peut-être l’éminence grise de toute cette opération …

Faudra-t-il d’abord éjecter Muriel Targnion de son fauteuil mayoral, car rappelons-le, son exclusion du parti ne remet pas son mandat en jeu. À Saint-Josse, Émir Kir est toujours bien en place, malgré une exclusion du parti qui a pris bien plus longtemps à se dessiner que celle de Muriel Targnion. Il faut dire que l’homme tient les troupes socialistes d’une main de fer dans sa commune. Et que son exclusion a sans doute pesé sur le conflit à Verviers: Paul Magnette, dit-on, aurait peur de braquer encore une fois la communauté turque en sacrifiant un de ses élus. Cette communauté avait d’ailleurs été mobilisée pour sauver le soldat Aydin lors d’un conseil communal avorté. Le communautarisme est pourtant une voie politique sans issue.

Muriel Targnion compte sur la parole donnée. Elle a pourtant déjà éprouvé la fiabilité de certains de ses interlocuteurs qui s’étaient rangés résolument à ses côtés avant de tourner casaque à une vitesse surprenante.

Et puis, si on élargit la perspective, on doit bien constater qu’au-delà du PS, la mésentente et la division ont aussi fait de sérieux ravages à Verviers.

Bien avant les élections communales de 2018, les dissensions au sein du MR avaient suscité une intervention énergique du président de la fédération verviétoise du parti. Et ce dernier avait annoncé de manière péremptoire qu’un élu ne pourrait plus figurer sur la liste libérale communale. Cette décision a été suivie d’effets: le-dit candidat a apporté à la liste bleue un capital de voix dont elle ne pouvait se passer, et il a récupéré au passage un mandat d’échevin. Et voilà maintenant que le déménagement à Verviers du président de la fédération d’arrondissement du MR, est évoqué. Pour le plus grand plaisir, on l’imagine du premier échevin, tête de liste en 2018. Et les mauvaises langues déjà de rappeler la manière dont le-dit président fédéral s’est fait déposséder de son écharpe mayorale à Herve, qui témoigne peut-être d’un manque de sens stratégique…

L’épisode a laissé des traces avec une liste libérale dissidente qui s’est présentée et a transformé l’essai en s’imposant à la majorité. Avant de voir partir son créateur. Pour raison de déménagement certes, mais qui laisse supposer que son engagement pour la ville était relatif.

Au cdH aussi , la bisbille a débuté avant l’élection communale, avec le bourgmestre du début de législature précédente et qui semblait bien avoir fait son temps après le renversement d’alliance qui l’avait privé de son écharpe, qui a fait barrage au premier échevin sortant, dont le leadership semblait s’imposer. Le-dit ancien échevin s’est alors exilé et le parti, dont l’aile démocrate-chrétienne avait été sérieusement écornée, a subi une déculottée qui l’a renvoyé dans l’opposition. Tandis qu’un élu, à peine installé, prenait ses distances.

Et puis les récents événements au sein du PS ont rendu l’accord du cdH indispensable pour écarter le président du CPAS, et sa cheffe de groupe a signé la motion qui lui permettait de rentrer en piste et de faire passer certaines de ses priorités. Et qui n’a pas accepté cet engagement? Coucou le revoilou, l’ancien mayeur, accompagné d’un ex-échevin. Il est décidément difficile de se départir d’anciennes attitudes…

Les autres partis semblent épargnés par ces bagarres internes . Même si on sait que le chef de file Ecolo n’est arrivé chez les « Verts » qu’après avoir rompu… avec le cdH qui l’avait lancé

Ces épisodes navrants ont pour toile de fond le déclin inexorable d’une ville en cours de paupérisation où des initiatives sociétales s’efforcent de compenser une action publique défaillante.

Bien sûr, le politique n’a pas toutes les clés en mains, et la population ne peut leur jeter la pierre sans s’interroger. Puisque selon l’adage, on a les politiques qu’on mérite. Mais force est de constater que l’Histoire se répète dans la Cité lainière.

Parmi les premières à avoir suscité un projet d’outlet-mall, Verviers a tellement tergiversé que d’autres villes l’ont précédée avec, à la clé, des projets de « villages » qui rendaient ringard le concept de quai de gare prôné à Verviers. Résultat des courses, Maasmechelen attire les visiteurs, dont de nombreux Verviétois.

Et puis miracle, l’arrivée d’une locomotive permet de sauver le site, rebaptisé Crescend’eau et le centre nerveux du commerce verviétois migre vers la périphérie. L’urgence se présentait alors, à Verviers comme dans d’autres villes, pour les commerces du centre. C’est alors que sort un projet de centre commercial en centre-ville, avec au départ une couverture de la Vesdre qui suscite une opposition musclée. Près de quinze ans ont passé depuis lors, et la première pierre de centre commercial se fait toujours attendre.

Les récentes péripéties politiques à Verviers ne sont évidemment pas de nature à donner confiance à des investisseurs par ailleurs paralysés par la pandémie. Mais au-delà, le temps n’est-il pas venu de réfléchir à de nouvelles pistes pour le centre-ville de Verviers? Ce qui implique l’apport d’idées neuves. La plus jeune élue du PS à Verviers vient de quitter le parti qu’elle qualifie de « parti de has been ».

Le constat est peut-être plus inquiétant: comme déjà écrit sur ce blog, le rejet de tels comportements politiques présente le risque de favoriser le vote d’extreme-droite.

Stéphane Moreau parti, que subsistera-t-il de Nethys?


 

Ainsi donc, le départ de Stéphane Moreau, l’administrateur-délégué de Nethys, réclamé en vain depuis trois ans par l’autorité wallonne, serait prochain, si on doit en croire les confidences de Pierre Meyers, le président du conseil d’administration de la société au Soir de ce jour?

Cette sortie de scène avant que les nouvelles procédures envisagées, après examens et débats d’usage, par le Parlement wallon et par Pierre-Yves Dermagne, le tout nouveau ministre régional des Pouvoirs locaux, ne puissent arriver à leur terme, correspondrait assez au personnage, qui se croit ou se sait hors d’atteinte. Une forme de pied de nez ultime…

Mais surtout, avec les révélations en chaîne des offres liantes conclues pour la vente du réseau VOO au fonds d’investissement états-unien Equity Providence et pour celle de WIN, la filiale de Nethys en charge des nouvelles technologies à la société Ardentia Tech créée ensuite par François Fornieri, administrateur de Nethys, qui en a confié la gestion quotidienne à Stéphane Moreau dans un parfum de double conflit d’intérêts; après l’annonce de la cession prochaine d’Elicio, la filiale « Énergies nouvelles » de Nethys à un consortium formé de John Cockerill, ci-devant CMI et… Ardentia Tech à nouveau, puis avec les récentes envisagées de la compagnie d’assurance L’Intégrale –peut-être à DKV, mais la piste d’un rapprochement avec APICIL, mutualité française déjà actionnaire de L’Intégrale, est évoqué par Nethys- et in fine le dégagement de Nethys des Éditions de l’Avenir (une décision qui ne désolerait pas leurs rédactions), c’est à un nettoyage industriel par le vide que le patron de Nethys semble occupé essentiellement pour l’instant.

Une fois cette coquille vide, et NewCo1, où est actuellement logée la marque VOO tranformée en instrument financier, sur le mode de Finanapart, dont la suppression vient d’être décidée, il n’aurait évidemment que peu de raisons d’y rester.

Reste l’ironie des commentaires des responsables politiques qui défendaient naguère sa gestion malgré ses errements en plaidant que la direction du câble wallon restait en Wallonie alors que celle du câble flamand était depuis longtemps entre mains états-uniennes. Et, si nous étions échevin des Finances d’une commune liégeoise, des questions nous tarauderaient sur l’usage qui a été fait des investissements réalisés à l’époque lointaine où l’Association Liégeoise d’Électricité était dirigée par des responsables pénétrés de l’idée de l’initiative publique. Et qui en investissant dans la câblo-distribution il y a un demi-siècle, étaient encore bien plus visionnaires qu’ils ne le pensaient

Retrait prudent

Un rebondissement: Stéphane Moreau a annoncé son retrait de la structure d’Ardentia Tech. Manière d’écarter définitivement tout soupçon de conflit d’intérêt, malgré les assurances données en la matière par le président du conseil d’administration de Nethys, Pierre Meyers? Ce dernier a pourtant donné toutes les assurances que les dispositions du Code des entreprises ont été respectées, sous le regard d’éminents avocats.

Mais reste peut-être une forme de délit d’initiés. L’infraction ne touche qu’à des sociétés cotées (la désormais ex-patronne de Proximus en fait l’expérience pour l’instant), mais il n’empêche, dans les opérations annoncées, il doit y avoir eu comme une distorsion de concurrence: au moment où le conseil d’administration de Nethys a décidé de vendre les filiales concernées, un de ses administrateurs a pu les racheter avant que la mise en vente ne soit officiellement annoncée. D’autres amateurs potentiels se sont depuis lors fait connaître, et on estimé que le prix de vente de ces filiales était sous-estimé. On attendra les avis des experts mandatés par le conseil d’administration d’Enodia, puis un éventuel débat au Parlement wallon, pour savoir le fin mot de cette histoire.

Reconstruire la confiance aux Éditions de l’Avenir? Il est long le chemin…

Reconstruire la confiance aux Éditions de l’Avenir? Il est long le chemin…


Copains de Nice-MatinUne délégation de journalistes français de Nice-Matin a tenté, ce mardi, de s’initier aux arcanes du système politique belge.

Il n’est pas sûr qu’ils ont pu en saisir toute les subtilités en une courte visite, et qu’ils peuvent désormais distinguer le Parlement wallon du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, où ils ont assisté à un débat sur les violations de la liberté de la Presse dont la direction s’est rendue coupable, en début de mois, à l’égard des journalistes de L’Avenir, auxquels ils étaient venus témoigner de leur solidarité.

Ce qu’ils ont constaté, par contre, c’est que l’opacité de la gestion de Nethys, dont ils se plaignent en bordure de Méditerranée, est identique au confluent de la Sambre et de la Meuse. Quand Jos Donvil, l’administrateur-délégué de L’Avenir, et Yves Berlize, son directeur général, ignorant volontairement l’ordre du jour de la réunion, sont revenus sur la nécessité à leurs yeux absolue d’un plan social qui décime la rédaction, tout en affichant l’objectif illusoire de faire de L’Avenir le «numéro 1 (sic) en Belgique» francophone, mon excellent confrère, Albert Jallet, délégué de l’Association des Journalistes Professionnels (AJP) a résumé qu’avec Nethys « On va…; on va…; on va…» mais surtout, depuis 2013, on ne voit rien venir. À Namur pas plus qu’à Nice. L’appel à rebâtir la confiance lancé par plusieurs élus, mettra encore longtemps à se concrétiser…

lavenirSans surprise, la direction des Éditions de l’Avenir a réaffirmé son attachement à la liberté de la Presse, et s’est défendue becs et ongles contre toute forme de «lock-out» ou de censure, avec la condition imposée, le mercredi 6 mars, à l’impression du quotidien.

«Il suffit de regarder la définition de « lock-out » au dictionnaire», ont notamment invité Jos Donvil et Yves Berlize.

L’argument est court. Le dictionnaire enregistre la signification des mots à un moment «M», mais la modifie dès que l’usage en élargit l’extension. Pensons par exemple au glissement de sens du verbe «bluffer», qu’on entend plus aujourd’hui au sens d’«impressionner», que de «tromper»….

Lock-out ou non, la réaction de la direction des Éditions de l’Avenir a été «disproportionnée», ont constaté tant le ministre des Médias, Jean-Claude Marcourt, que le député MR Olivier Maroy, qui n’a pas oublié son passé de journaliste.

La volonté d’éviter une répétition du «journal pirate» (sic) du 16 février –«l’information appartient aux lecteurs», a rappelé le secrétaire général de la Fédération Européenne des Journalistes; «L’enquête était rigoureuse et fouillée» a insisté Martine Simonis, secrétaire générale de l’AJP; la publication des pages de ce «collector» a suivi un processus normal, avec validation à plusieurs étages, mais en laissant le directeur des rédations «réputé rapporter à Stéphane Moreau» dans l’ignorance de l’opération, a précisé votre serviteur – ne justifiait pas la fermeture de l’accès au site Web et aux réseaux sociaux du journal du lundi 4 au mercredi 6 mars inclus. Une fermeture que ne pouvait expliquer une pseudo opération de maintenance, opérée par un technicien de Nethys, appelé sur place, mais qui était là, aux dires d’Yves Berlize, par hasard, parce qu’il était justement de passage ce jour-là, pour tout autre chose… dont on ne saura rien.

En l’occurrence, comme M. Jourdain faisait de la prose sans le savoir, la direction des Éditions de l’Avenir  a pratiqué ces jours-là une forme de lock-out sans s’en rendre compte. Et qui pourrait dans les mois à venir avoir pour conséquence d’élargir la portée même du terme. De toute manière, a conclu Fabian Culot, un élu MR qui n’a pas oublié être administrateur d’Enodia, l’ex-Publifin, «seul un juge pourrait dire s’il y a eu ou non lock-out». Et par essence, la commission des Médias du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles n’est pas un tribunal.

Il a aussi été question des licenciements ciblés opérés par la direction, en début de congé de carnaval. Les demandes d’explication de Stéphane Hazée (Ecolo) ou de Benoît Drèze (cdH) sur les motivations de ces licenciements, en l’absence de tout nouvel organigramme de la rédaction, qui laissent notamment sans responsable un service central comme celui de l’info générale du journal (une première, sans aucun doute, dans la Presse belge), n’ont amené dans le chef d’Yves Berlize, que des explications très générales, du style «critères opérationnels, simplification, mutualisation au sein de Voo». Tout de même, Jos Donvil a affirmé que les trois confrères ainsi éjectés avaient refusé les réinsertions-sanctions acceptées par les syndicats sans la moindre concertation avec les intéressés. Deux de ces derniers contestent la véracité de cette assertion. La stratégie d’intimidation, décrite notamment par votre serviteur, ne s’en déploie pas moins.

«Comment en sortir par le haut?» ont demandé plusieurs membres de la Commission. Comment rebâtir la confiance?

Comme l’a exprimé Albert Jallet, la tâche est bien difficile quand les représentants de la rédaction, invités à une réunion par la direction pour discuter réorganisation -un souci bien tardif des dirigeants des Éditions de l’Avenir, qui se sont rendu compte du risque, qui leur avait été signalé, de perdre l’aide à la Presse de la Fédération Wallonie-Bruxelles: tous deux néerlandophones, ils ne sont sans doute pas bien au fait d’un système que la Flandre a supprimé il y a lonlgtemps, au profit d’encarts publicitaires de la Région dans les quotidiens flamands- ils se retrouvent face à leurs interlocuteurs… accompagnés de leur avocat.

Ce mardi, en commission, Jos Donvil et Yves Berlize ont remis cela. C’est en compagnie de deux (éminents) juristes, avec lesquels ils avaient apparemment travaillé leur prestation la veille, durant toute la journée, qu’ils se sont présentés devant les députés.

Nous n’avons rien contre les avocat, surtout quand l’un d’entre eux, préside un club de football où l’on parle encore wallon, sponsorisé par… Voo, qui en accorde toutefois bien plus à l’autre club (honni) de la ville. Mais leur audition n’était pas prévue par la commission. Malgré la plaidoirie vigoureuse de Fabian Culot, lui-même avocat, en leur faveur, la seule voix de Stéphane Hazée a suffi pour que la parole ne leur soit pas accordée. Car, comme l’avait indiqué Isabelle Moinet, la présidente de la commission, l’unanimité était requise pour modifier la liste des personnes entendues.

Stéphane Hazée a eu raison de s’opposer à ce qu’on donne la parole à l’un des deux avocats de la direction des Éditions de l’Avenir. Non qu’il y avait à redouter d’un exposé qu’on devine brillant, et dont le propos était, sans aucun doute, de dénier le moindre «lock-out», les 4, 5, et 6 mars dernier. On aurait juste curieux d’entendre s’il abordait la censure préalable imposée par l’actionnaire avant de donner le feu vert à l’impression du journal du 6.

Ce qui choque surtout, dans la démarche, c’est à nouveau l’inélégance de la direction des Éditions de l’Avenir qui n’avait pas fait part à ses contradicteurs de sa volonté de donner la parole à l’un de ses avocats.

Comment voudrait-on que, devant pareille duplicité; devant l’obstination à ne pas prendre en considération les motions unanimes, non de la rédaction mais de l’ensemble du personnel des Éditions de l’Avenir, contre le directeur des rédactions; et devant l’inertie d’un actionnaire qui ne se manifeste pas seulement à Namur, mais à Nice, la confiance puisse se reconstruire?

Comme l’a dit à plusieurs reprises Martine Simonis, au cours de cet après-midi tendu, «les faits sont têtus»….

 

 

Éditions de l’Avenir: les 2% qui révèlent l’intention


Les masques sont tombés, ce lundi, aux Éditions de l’Avenir avec la fin de non-recevoir brutale opposée par la direction, obéissant aux ordres venus d’en haut, à la demande de l’Association des Journalistes Professionnels d’application d’une convention de travail et de rémunération des journalistes du groupe. Cette demande aurait eu pour effet d’améliorer de… 2% l’offre faite aux journalistes susceptibles de partir en RCC (Régime de chômage avec complément d’entreprise) et donc de rendre possible l’exécution du plan social signé par les syndicats il y a quelques semaines. Le refus de la direction témoigne, en dépit des dénis répétés de Nethys, l’actionnaire unique des Éditions de l’Avenir (EdA), de sa volonté de licencier des journalistes ciblés, notamment ceux qui ont relaté les débats nés des graves dysfonctionnements relevés tant au sein de Nethys que de son actionnaire public, l’intercommunale Publifin aujourd’hui rebaptisée Enodia.

L’existence d’une telle «liste noire» a été évoquée, il y a de nombreuses semaines déjà, par l’hebdomadaire «Le Vif»; elle a été démentie rapidement et à plusieurs reprises tant par la direction des Éditions de l’Avenir que par l’actionnaire principal de la société. Tout laisse entendre que sa réalité sera démontrée dès lundi prochain, quand la même direction des EdA transmettra au ministère de l’Emploi, une liste de cinquante noms, dont une majorité de personnes visées par un licenciement «sec», essentiellement des journalistes, dans l’espoir de faire reconnaître l’entreprise comme entreprise en restructuration.

Kris Peeters, ministre fédéral de l’Emploi, n’aura peut-être guère d’attention pour ce dossier: il lui serait bon de se rappeler que sa nature n’est pas essentiellement économique, mais politique, sociétale et démocratique. Et que la précipitation en la matière serait mauvaise conseillère.

Un accord incontesté

L’argumentation développée hier par le porte-parole de Nethys démontre la faiblesse du démenti qu’il a à nouveau apporté ce lundi à l’existence d’une «liste noire» de journalistes.

«L’AJP, explique-t-il, conteste un accord intervenu un décembre dernier dans le cadre du plan de restructuration (NB: enfin un aveu: jusque-là, la direction parlait toujours hypocritement de «plan de redéploiement») de L’Avenir, approuvé par 84% du personnel».

Premier enfumage: l’Association des Journalistes Professionnels ne conteste pas cet accord, dont le personnel n’avait approuvé que le principe, mais pas le contenu.

Elle a simplement demandé que, dans le cadre de ce plan, la direction des EdA applique les dispositions de la convention de travail et de rémunération des journalistes qu’elle a délibérément choisi d’ignorer. Comme, pour rappel, elle avait choisi de contourner un autre accord, sur la nomination d’une rédactrice ou d’un rédacteur en chef, pour imposer un directeur des rédactions frappé par une motion de défiance générale.

La demande de l’AJP ne remet donc pas en cause cet accord. Elle ne vise pas non plus à obtenir pour les journalistes un quelconque privilège: revendiquer le repect d’un accord social est un droit. Par surcroît, l’application de cette convention améliorerait un fifrelin (2%: un total de 180000 euros sur un coût global de 9 millions) l’offre faite aux journalistes susceptibles de partir en RCC et aiderait donc à atteindre l’objectif des 50 équivalents temps-plein (ETP) que le plan social a fixé. Le refus de la direction témoigne clairement de sa volonté de passer par des licenciements ciblés. De quoi accréditer l’idée d’une «liste noire».

Qui est qui?

«Les dispositions de cet accord ont été négociées entre la direction des Éditions de l’Avenir et les syndicats et en aucun cas avec Nethys»  ajouté le porte-parole.

Qu’en termes pesés cette chose-là est dite: oui, la direction des Éditions de l’Avenir a négocié l’accord. Mais pas de manière autonome. Sous contrôle de son conseil d’administration, d’abord, présidé par Pol Heyse, dirigeant de Nethys et quasi-exclusivement composé de représentants de Nethys, actionnaire unique de l’entreprise!

Alors, on peut jouer sur les mots. Mais la réalité du pouvoir au sein des Éditions de l’Avenir est évidemment chez Nethys. S’il n’en fallait qu’une preuve supplémentaire, son administrateur-délégué est… salarié de Nethys. Les multiples suspensions de séance, au cours des négociations, sollicitées par la direction qu’on devinait demander ses instructions à Liège, en est une autre. Et la preuve cardinale en est le maintien à son poste d’un directeur des rédactions imposé par Stéphane Moreau, administrateur-délégué de Nethys, qui entend le maintenir contre vents et marées, et malgré les avis contraires de la direction même des EdA!

Le porte-parole de Nethys est payé pour tenter de nous faire prendre des vessies pour des lanternes. Mais la ficelle utilisée, là, est vraiment trop grosse. Et son démenti sur l’existence d’une «liste noire» de journalistes tombe à plat. Heureusement, dans la vie réelle, le nez de celles et ceux qui disent ce qui n’est pas ne s’allonge pas, comme celui de Pinocchio!

Où notre contradicteur a parfaitement raison, par contre, c’est quand il rappelle que le plan social a été négocié entre la direction des EdA et les syndicats, avec des délégués de l’AJP présents au titre seulement d’observateurs. L’AJP n’a donc pas signé cette convention, négociée à la hussarde, et sous une pression du temps tout à fait artificielle (l’intention de licencier a été annoncée le 24 octobre, et tout devait être bouclé pour le 21 décembre: cette négociation aurait pu, ou plutôt dû, être entamée au moins trois mois plus tôt!). L’eût-elle fait, comme elle avait été invitée à le faire chez Rossel, par exemple, une clause discriminatoire à l’égard des journalistes n’y aurait pas été maintenue. Faute d’atteinte de l’objectif de 50 EQT, y lit-on, il sera procédé à des licenciements… de journalistes.

Et après cela, on nous baladera encore en prétendant qu’il n’existe pas de liste préétablie? Mieux vaut lire ou entendre cela que d’être sourd ou aveugle, dira-t-on. Pas sûr…

Une étrange conception de la gouvernance


Alain JeunehommeLa décision de rachat des Éditions de l’Avenir par l’intercommunale Tecteo, ou plutôt, par la SA Tecteo Services pour compte de Tecteo, a fait une première victime: Alain Jeunehomme a été dégommé de son poste d’administrateur de l’intercommunale, et, dans la foulée, de sa fonction de chef de cabinet de la ministre des Classes moyennes. Sabine Laruelle a, à cette occasion, subi un cruel camouflet, puisque le matin même de la défenestration de son chef de cab’, s’affichant «cool et pas frustrée», elle lui maintenait sa confiance, dès lors qu’il appliquait ses consignes au sein de son cabinet.

Le crime d’Alain Jeunehomme? N’avoir pas obtempéré aux consignes de son président provincial, Daniel Bacquelaine, qui lui demandait de ne pas approuver le rachat, ou, à défaut, d’exiger le report de la décision.

Chose étrange: d’autres administrateurs, apparemment, n’avaient pas reçu les mêmes consignes. Ou alors les ont ignorées, mais sont restés néanmoins en place.

Cette démission (plus ou moins) volontaire n’en interpelle pas moins, car elle renvoie à la manière dont sont gérées des sociétés publiques. Ou plus exactement à la conception dont certains responsables politiques de haut niveau ont de la gestion des sociétés publiques.

Car enfin, la responsabilité d’administrateurs, qu’ils soient publics ou privés, c’est de veiller aux intérêts de la société dont ils ont la charge. Et, nous l’avons dit ici, en rachetant les Éditions de l’Avenir, c’est une société saine que Tecteo a acquise. Dans une perspective économique qui peut se justifier: l’apport de contenu régional doit permettre à l’intercommunale de garnir son offre sur le Web, alors que de son côté, le groupe de presse trouve dans cette reprise un partenaire spécialisé, susceptible d’accompagner le développement de ses applications payantes.

da6eb862-4bfe-4f06-8df4-0561e2ff4183_PICTUREY avait-il urgence? On l’invoque par l’imminence, faute de décision, du rachat des Éditions de l’Avenir par Rossel. Lequel avait fait offre de reprise, et n’a jamais caché son intérêt pour un rachat, suivi d’une fusion des EdA avec sa filiale Sud-Presse. Avec, là aussi, une logique (?) économique: la colonne vertébrale de «L’Avenir» est la Nationale 4, et la dorsale wallonne celle des quotidiens de Sud-Presse. Pareille fusion aurait conduit à l’union contre nature de deux quotidiens qui abordent l’actualité régionale de manière radicalement différente, et aurait entraîné un bain de sang social. Et surtout, l’acquisition des Éditions de l’Avenir aurait mis 85% de la presse écrite quotidienne francophone dans les mains de Rossel. Le discours sur le pluralisme qu’on entend dans le chef de certains prend tout à coup une singulière dimension…

Le véto imposé par Charles Michel à ses administrateurs; ou la volte-face de Dominique Drion, qui, après avoir approuvé le rachat, a réclamé la convocation d’un conseil d’administration; voire même l’appel d’Emily Hoyos aux «amis de la liberté de la presse» n’en apparaissent pas dès lors, bien éloigné d’un principe de bonne gouvernance dans le chef du président du MR; incohérente pour l’administrateur cdH de Tecteo; et assez grandiloquent dans la bouche de la coprésidente d’Ecolo. Et l’on sent bien, surtout chez le premier nommé, la volonté de tailler des croupières à l’homme fort de Tecteo, le bourgmestre d’Ans, Stephane Moreau, dont nous avons déjà dans ce blog épinglé la conception des relations sociales; de l’observation des normes législatives en matière d’incompatibilités de fonctions; ou encore du respect de la liberté de la presse, à propos de sa plainte pour un montant total de 6 millions d’euros à l’égard du «Soir» et d’un journaliste indépendant liégeois.

Et là, désolé: certains politiques se servent du rachat des Éditions de l’Avenir pour tenter de se refaire un peu rapidement une virginité, eux qui ont laissé Tecteo et son patron échapper à toute forme de tutelle.

Car enfin, il y a eu au Parlement wallon une proposition de décret, émanant de Bernard Wesphael, pour conserver la tutelle régionale sur une intercommunale supra-régionale, en fonction de son territoire principal d’implantation. Mais cette proposition de l’ancien chef de groupe des «Verts», un des meilleurs connaisseurs du dossier Tecteo, est restée lettre morte…

Et puis, c’est… à l’unanimité qu’a été créée la société anonyme Tecteo Services, celle qui a permis à Stéphane Moreau de ceindre l’écharpe mayorale à Ans tout en restant CEO de Tecteo, et celle-là même qui vient d’acquérir les Éditions de l’Avenir. Tecteo Services a procédé à cette acquisition le plus légalement du monde, en utilisant la délégation de pouvoir qui lui permet de mobiliser des fonds de l’intercommunale, pour procéder à tout investissement s’inscrivant, fût-ce de manière très large, dans son objet.

En s’en prenant à la décision de rachat, MR, cdH et Ecolo se tirent donc une balle dans le pied. Ils ne servent en tout cas ni le pluralisme, ni l’indépendance journalistique. Et sur ce dernier point, qu’ils ne s’en fassent donc pas: la rédaction de «L’Avenir» sait comment se défendre!