Des voitures de société plus vertes? Plus rouges, plutôt!


Ainsi donc, à partir de 2026, seuls les véhicules de société entièrement électriques bénéficieront d’un avantage fiscal dégressif au fil du temps, ce qui, par voie de conséquence, obligera les détenteurs de ce type de véhicule à modifier leur installation électrique afin de pouvoir installer une borne de rechargement à leur domicile, aménagement pour lequel le gouvernement prévoit une déductibilité fiscale de 45% (ce qui laisse donc, mathématiquement 55% à charge de l’utilisateur) pourvu que cette borne soit couplée à un logiciel: bonjour la simplicité!

La puissance du lobby électrique jouant à plein, les commentaires saluent en général le futur «verdissement» du parc automobile des sociétés et, à plus long terme, le «verdissement» du parc automobile dans son ensemble. Et comme à l’habitude, on se prévaut d’une future réduction de 50% des émissions de gaz à effet de serre, mais on élude soigneusement la question de l’approvisionnement en électricité de ces véhicules de société, qui ne pourront pas être hybrides, ni celle de leur recyclage, et principalement du recyclage de leur batterie, qui reste pour l’heure tout à fait insoluble.

Une autre question largement ignorée à ce propos est celle de l’impôt éludé grâce à ce mécanisme, et par corollaire celle des charges sur le travail, largement supérieures aux charges sur le capital, ainsi que l’encouragement à la voiture qui est ainsi pratiqué, de quoi amplifier les phénomènes d’embouteillage, notamment autour de Bruxelles, comme le soulignait ce matin sur La Première Dave Sinardet, le politologue flamand préféré de certains médias francophones.

Mais ce qui reste le plus choquant, dans toute cette propagande en faveur du véhicule électrique, c’est ce refus obstiné d’aborder les conditions de travail inhumaines rencontrées en Afrique, et notamment au Katanga, en République Démocratique du Congo, par les «creuseurs», ces mineurs artisanaux de tous âges, notamment d’enfants, qui extraient dans des conditions de sécurité absolument nulles, et pour des salaires de misères, les métaux rares nécessaires tant à la production de batteries électriques que de smartphones.

Ils sont nombreux à payer de leur vie pareil travail, qui parvient à peine à les nourrir, eux et leurs familles. Et aussi longtemps que l’industrie automobile n’assurera pas un travail décent et des conditions de rémunération correctes à tous ces malheureux, des vies continueront à se perdre ainsi. Alors soyons cohérents: les voitures électriques ne sont pas vertes, elles sont rouges du sang de ces mineurs artisanaux!

Et les Wallons qui sont des cochons ou du caca, c’est sans doute aussi du folklore…


Que le Club Brugeois ait mérité son titre de champion de Belgique de football ne se discute guère, même si les Blauw en Zwart n’ont guère été fringants au cours de ces «play offs» un peu particuliers cette année particulièrement chahutée.

Si, sur le plan sportif, l’équipe dirigée par Philippe Clément, a dominé la compétition de la tête et des épaules, en coulisses, il n’en a pas vraiment été de même, si on en juge par l’entrée en Bourse avortée d’il y a quelques semaines. Et, depuis ce jeudi, il y a l’affaire Noa Lang, avec le chant de victoire entonné par le jeune prodige néerlandais du stade Jan Breydel, qui a chambré devant des fans brugeois en folie les «supporters juifs d’Anderlecht».

Réprobation immédiate du monde du football, avec la Pro League qui «déplore» cet excès de langage, puis le parquet de l’Union belge qui déclare «se pencher» sur les faits, et enfin le scandale qui enfle, avec la presse étrangère qui commente abondamment l’incident.

Panique du Club Brugeois qui, dans un communiqué, précise que «Paysans pour les supporters de Bruges, Schtroumpfs pour ceux de Genk, cafards pour ceux de Malines, Juifs pour ceux d’Anderlecht: ce sont des surnoms souvent adoptés (…) Il n’y a pas de sous-entendu antisémite là derrière».

Pour un peu, on croirait entendre la réaction des autorités communales alostoises, après le défilé dans un cortège carnavalesque d’un char où trônaient des Juifs au nez crochu, assis sur des sacs d’or, et vêtus de manière traditionnelle.

On veut bien accorder aux dirigeants brugeois que Noa Lang n’est pas antisémite (avec un tel prénom, ce serait un comble!), mais on ne le suivra pas dans leur raisonnement. Pour eux, parce qu’on le dit souvent, il est normal, donc, de qualifier des supporters de clubs adverses de «Juifs» ou de «cafards»?

Dans une Flandre où la première place du Vlaams Belang dans les intentions de vote se confirme, l’affirmation fait frémir. D’autant que le terme «cafards» renvoie à un autre contexte, celui du génocide des Tutsis au Rwanda, préparé par une campagne de propagande relayée par la sinistre radio Mille Collines, où les futures victimes étaient quotidiennement qualifiées de «cafards».

Pour autant, la réaction du monde du football belge apparaît singulièrement hypocrite. Car on ne l’a pas connu aussi intransigeant, dans le passé, pour réprimer des chants racistes qui ciblaient des joueurs d’origine étrangère et notamment africaine. En témoigne la campagne menée actuellement par certains joueurs ou anciens joueurs, au premier rang desquels Romelu Lukaku, que la Belgique footballistique adule, mais qui a dû faire face à ses débuts d’attaques particulièrement méchantes. On se souvient aussi de la carte jaune adressée au joueur carolo Marco Ilaimaharitra, qui avait eu l’audace de faire remarquer à l’arbitre Jonathan Lardot que le public du Club Malinois -les «cafards», donc, à en croire la direction du Club Brugeois- lui adressait des cris racistes. Plus loin dans le temps, on a eu les bananes jetées sur le terrain en direction de joueurs d’origine africaine, parmi lesquels l’attaquant nigérian d’Anderlecht, Nii Lamptey…

De la même manière, jamais n’ont été sanctionnés les chants flamingants qualifiant les joueurs wallons de «cochons», ou les Wallons en général d’être «du caca»: encore du folklore, sans doute, pour la direction du Club Brugeois, qui a montré, là, que si son équipe est championne de Belgique, elle, elle est sans aucun doute championne de Belgique du mauvais goût et de la stupidité.

On savait qu’on trouve peu de prix Nobel parmi les membres des «kops» et autres clubs de supporters «enragés»; il faut bien constater qu’au niveau de ses dirigeants, le football belge a décidément aussi bien du mal à trouver des gens censés, qui s’efforceront d’éradiquer le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie des tribunes de leurs stades. On leur souhaite de connaître au plus vite des résultats sportifs à l’aune de la bassesse de ces sentiments.

Pluie de bombes au Proche-Orient: le problème enfoui persiste


Rien ne semble pour l’instant pouvoir arrêter les tirs de roquettes depuis la bande de Gaza sur Israël, et les bombardements en réplique de l’armée israélienne sur la bande de Gaza: aux propositions de cessez-le-feu présentées par le Hamas, au pouvoir à Gaza, Israël a opposé son droit de se défendre, et il s’y accrochera d’autant plus que le président des États-Unis, Joe Biden, a apporté son soutien à l’État hébreu sur ce point.

Le nombre de victimes, tuées ou blessées, risque donc d’augmenter dramatiquement, et de manière totalement déséquilibrée, puisque, comme le signalait un analyste, quand Israël est touché par une pierre, il réplique avec des bombes. Et pas de manière à éviter les victimes civiles, comme l’a prétendu l’ambassadeur d’Israël en Belgique, Emmanuel Nahshon lors d’une récente interview télévisée. La théorie selon laquelle Tsahal, l’armée israélienne préviendrait ses adversaires plusieurs heures avant de frapper ne peut abuser personne.

L’ambassadeur, que j’ai eu l’occasion de rencontrer il y a quelques mois, s’est par ailleurs exprimé de façon fort peu diplomatique en accusant le gouvernement belge auprès duquel il est accrédité d’« hypocrisie et de lâcheté » pour ne pas soutenir inconditionnellement Israël, comme l’ont fait les États-Unis ou le Royaume-Uni, mais d’avoir insisté sur la nécessité d’un dialogue pour mettre fin à l’escalade actuelle.

Emmanuel Nahshon a par ailleurs repris la thèse de propagande selon laquelle les Palestiniens menacés d’expulsion à Jérusalem-Est sont des « squatters » occupant indûment des immeubles « acquis il y a 70 ans par des associations juives ».

Si cette théorie était exacte, et les faits aussi évidents, le recours actuellement pendant devant la Cour suprême d’Israël n’aurait pas été indispensable. Et puis au-delà du cas d’espèce, il y a une politique israélienne d’expulsion répétée de Palestiniens des habitations qui sont les leurs, notamment en invoquant de prétendues découvertes archéologiques dans leurs propriétés.

Le rôle d’un diplomate est bien sûr de représenter son pays. S’il dépasse sans doute certaines limites dans son expression, on peut comprendre qu’Emmanuel Nahshon élude la responsabilité écrasante d’Israël dans la situation actuelle. Avec la complicité active de l’ancien président des États-Unis, Donald Trump, l’État hébreu s’est de plus en plus écart ces dernières années de la solution à deux États que l’ONU préconise en vain depuis plus de sept décennies.

Après l’annexion illégale du plateau du Golan ont succédé les projets d’annexion de la Cisjordanie occupée, et de Jérusalem-Est, appelée à être la capitale de l’État palestinien, dont la carte, parsemée de colonies israéliennes annexées, figurant en annexe du récent « plan Jared Kushner » pour le Proche-Orient, démontre là non-viabilité.

L’instabilité politique persistante en Israël, où le camp de la paix semble durablement réduit au silence, ajoute au marasme: d’élection en élection, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, s’accroche d’autant plus à son poste que sa persistance au pouvoir retarde les procès pour corruption dont il fait l’objet. Quitte à courir derrière de possibles alliés de plus en plus classés à l’extreme-droite.

La responsabilité de l’Autorité palestinienne est également fort grande dans cette dérive : à 86 ans, son président, Mahmoud Abbas a reporté le 30 avril dernier une élection attendue par la population depuis… plus de quinze ans.

Pour justifier sa décision, il a invoqué le refus israélien de tenir le scrutin à -on y revient- Jérusalem-Est où vivent 350000 Palestiniens. Mais il est notoire que sa crainte était de perdre le pouvoir face aux listes concurrentes « de la Liberté » (celle-ci, menée par Marwan Barghouti, détenu dans une prison israélienne, secondé par Nasser al-Kidwa, neveu de Yasser Arafat, était donnée favorite de l’élection) et du « Futur » conduite depuis les Émirats par Mohamed Dahlan qui y a été exilé par… Mahmoud Abbas.

Et puis le Hamas comptait aussi sur ce scrutin pour sortir de sons isolement à Gaza: son offensive actuelle lui permet peut-être de marquer des points, et ne l’incitera pas à faire baisser la pression. Soutenu par l’Iran, le Hamas est lui aussi responsable de la dégradation actuelle de la situation, même si on doit le créditer de ses offres de cessez-le-feu.

Autres responsables de la dramatisation actuelle, les États-Unis qui ont jusqu’à récemment appuyé Benjamin Netanyahu dans tous ses errements et les États arabes (Émirats Arabes Unis, Koweït, Soudan, Maroc) ont noué des relations diplomatiques avec l’État hébreu en n’accordant pratiquement aucune attention aux doits du peuple palestinien, au bénéfice d’avancées comme, s’agissant du Maroc d’une reconnaissance fragile par les États-Unis de sa souveraineté sur la région toujours disputée du Sahara Occidental. Reste l’Union européenne dont l’incapacité à faire prévaloir une voie originale dans cette zone est plus que jamais criante

Tout cela revient au problème du déni des droits du peuple palestinien à un État viable, affirmé par les Nations-Unies. Au plus tard ce droit sera satisfait, au plus tard une paix durable s’installera au Proche-Orient…

Correctionnaliser le harcèlement pour lui fermer la porte


Je n’étais pas à convaincre du « plafond de verre » qui fait obstacle à une authentique égalité salariale, même dans les secteurs comme celui de la presse écrite quotidienne où j’ai été actif jusqu’il y a peu et où les barèmes salariaux ne sont pas sexués. Je suis par ailleurs bien conscient depuis longtemps du pouvoir de nuisance des réseaux sociaux, où la bêtise s’exprime sans retenue sous couvert ou non d’anonymat mais avec le bénéfice de l’impunité, car qualifiée, indûment à mon sens, d’activité de presse relevant de la cour d’assises. Alors, faute de pouvoir combattre efficacement cette interprétation abusive, il ne reste qu’une solution: correctionnaliser le harcèlement comme on l’a fait jadis pour les délits de presse à caractère raciste.

Cette réflexion m’a été inspirée par la vision, ce mercredi soir sur la Une, du documentaire #SalePute d Florence Hainaut et Myriam Leroy.

Ce documentaire m’a doublement surpris à la fois par la violence des attaques contre les femmes interviewées (les injures sexistes qui ne surprennent hélas pas sont doublées de menaces physiques ou de menaces de mort explicites) et par le manque de réaction policière ou judiciaire quand les victimes portent plainte.

L’excuse? Les délits de presse relèvent de la cour d’assises et on sait qu’organiser un procès de presse coûte cher. Mais peut-on parler de délit de presse? Sur le Web, je le sais, tout le monde se proclame ou peut se proclamer journaliste… ce qui ne veut pas dire que tout le monde l’est.

Proférer des injures ou des menaces n’a par ailleurs rien à voir avec émettre une opinion ou présenter des faits après les avoir recueillis, vérifiés et mis en perspective, voire rectifiés si nécessaire, ce qui constitue l’activité journalistique par excellence.

Même à l’époque où je sévissais dans un quotidien qui m’employait et ne me rémunérait pas assez à mon goût (air connu), il m’était interdit de diffamer, a fortiori d’injurier ou de menacer quelqu’un de sévices voire de mort! Un(e) juriste normalement équilibré(e) peut-il (elle) défendre sérieusement que les mêmes pratiques relèvent d’une activité de presse parce qu’elles s’exercent en ligne?

Cela posé, l’adage veut que deux juristes enfermés dan une cabine téléphonique (s’il en existe encore?) en ressortent avec deux, trois, voire quatre opinions différentes. Et si un(e) juge a qualifié ces pratiques méprisables d’activité de presse, et qu’un(e) autre a embrayé, une jurisprudence s’élabore.

Par ailleurs, certaines conceptions évoluent : naguère, une blogueuse ou un blogueur n’étaient pas considérés comme des journalistes, aujourd’hui tout le monde admet que le journalisme s’exerce aussi à travers des blogs. À commencer par l’auteur de ces lignes.

L’argument selon lequel les journalistes bénéficient d’une quasi-impunité parce qu’on ne réunit plus une cour d’assises pour juger des délits de presse est ancien.

Les contempteurs de ce mécanisme soulignaient souvent que la Belgique était un des rares pays à ne pas avoir correctionnalisé les délits de presse et il y a une quinzaine d’années, à l’AGJPB (Association Générale des Journalistes Professionnel(le)s de Belgique) puis à l’AJP (Association des Journalistes Professionnel(le)s francophones et germanophones) que je présidais, nous nous opposions à toute correctionnalisation de ces délits en Belgique.

C’est que l’opération risquait de déstabiliser le mécanisme subtil mis en place par le constituant de 1831 pour bétonner la liberté de la presse avec l’’interdiction définitive de la censure; le principe de la responsabilité en cascade (si l’auteur est domicilié ou connu en Belgique, ni l’éditeur, ni l’imprimeur, ni le distributeur ne peuvent être poursuivis) et par la tâche confiée à la cour d’assises, avec son jury populaire, de juger les délits de presse, puisque la presse s’adresse au peuple.

L’impunité des journalistes était par ailleurs théorique avec les multiples plaintes au civil déposées contre elle et eux, d’autant plus que la cour de cassation avait étendu au domaine civil le principe même de la responsabilité en cascade.

La discussion était néanmoins serrée parce que la Justice, alors, avait qualifié d’activité de presse la diffusion par le Vlaams Blok, ancêtre du Vlaams Belang, d’un tract qualifié de raciste. Interprétation tout aussi choquante mais qui faisait jurisprudence.

Avec beaucoup de réticences, l’AGJPB a alors accepté la correctionnalisation des seuls délits de presse à caractère raciste. Et depuis lors, la pratique a dissipé les craintes exprimées pour la liberté d’expression et la liberté de la presse.

Aujourd’hui, on peut donc envisager la même correctionnalisation des délits de presse relevant du sexisme, de la discrimination liée au handicap ou à l’orientation sexuelle, ou au harcèlement en ligne « en meute », pourvu que cela soit strictement balisé.

Cela ne peut se faire en trois coups de cuiller à pot, comme l’a expliqué le ministre de la Justice, Vincent van Quickenborne, ce mercredi, au débat qui a suivi la diffusion de #SalePute sur la Une: il faut déclarer les articles de la Constitution nécessaires susceptibles d’être révisés, s’ils n’ont pas été déclarés tels pour l’actuelle législature, et ensuite trouver la majorité qualifiée requise pour les modifier, sous la prochaine législature.

Cela veut-il dire qu’on doit rester passif entre-temps? Rien n’empêche des juristes de contester cette qualification d’activités de presse pour les harceleurs en ligne, ou alors de les poursuivre au civil.

Et puis, la solidarité peut s’opposer à eux: plus d’une fois au cours de la soirée, l’engagement de l’AJP et notamment de sa secrétaire générale a été souligné au cours de la soirée.

Si, au cours du lourd conflit mené au sein du journal… qui (air connu), une responsable syndicale nationale, sans doute jalouse du taux d’affiliation de l’AJP dans le secteur de la presse et de la presse écrite quotidienne en particulier, la qualifiait avec mépris d’« organisation corporatiste » (sic), elle a une nouvelle fois prouvé qu’elle défend efficacement les droits matériels et moraux de ses membres. Y compris dans des secteurs où les syndicats classiques mettent rarement la main à la pâte…

Bientôt une Saint Tonton le 10 mai?


Les documentaires se sont multipliés ces derniers jours et vont encore se multiplier d’ici à dimanche prochain sur les chaînes françaises et sur les chaînes historiques pour commémorer l’élection à la présidence de la République de François Mitterrand, le 10 mai 1981, il y a eu tout juste quarante ans ce dernier lundi.

Ce qui est gênant dans tous ces documentaires c’est leur ton généralement largement hagiographique. On n’a que très rarement évoqué le Mitterrand d’avant 1981: le résistant de la Seconde guerre mondiale passé d’abord dans les cercles du pouvoir à Vichy où il a noué des amitiés discutables auxquelles il est resté fidèle jusqu’au bout; ou le ministre de l’Intérieur partisan d’une répression musclée face aux insurgés algériens dans les années 1950. Sans compter cette nébuleuse affaire de «l’attentat» de la rue de l’Observatoire.

«Florentin»

Rien ou pratiquement rien non plus sur sa conquête du pouvoir au sein du Parti socialiste qui ne portait pas encore ce nom en 1971, au congrès d’Épinay.

Par contre sa haine corse pour un Michel Rocard, opposant de l’époque, Premier ministre méprisé, nommé le 10 mai 1988 et congédié le 15 mai 1991, après trois années de mandat particulièrement réussies, pour l’empêcher de briguer la succession à l’Élysée a bien été décrite: petitesse fréquente chez les hommes politiques d’envergure, poussée à son paroxysme chez un dirigeant, à qui sa duplicité avait valu le surnom de « florentin ». Le résultat de cette obstruction est peut-être l’effondrement, aujourd’hui, du Parti socialiste français et l’explosion de la gauche, désormais plus éloignée que jamais du pouvoir suprême…

On a par contre bien pu prendre la mesure de sa capacité extraordinaire à rebondir, pour avoir réussi en 1974 et encore plus en 1981 à se présenter comme un « homme nouveau », lui qui était dans le bain politique depuis plus de trois décennies. Ou qui, après avoir accusé le général de Gaulle de pratiquer un « Coup d’État permanent » avec sa Constitution de la Ve République, a par la suite exercé avec délectation les pouvoirs exorbitants accordés au chef de l’État.

Le choc salutaire de l’alternance

Ces commémorations de son élection à la présidence de la République ont par contre bien souligné le choc que ce scrutin a représenté pour une France où la droite semblait éternellement vouée au pouvoir, qui a joué vainement la menace d’une arrivée des chars soviétiques à Paris si la gauche se l’appropriait, et où le personnel de l’Élysée, selon les mots d’un acteur de l’époque semblait étonné de voir ses représentants manger… avec des fourchettes. Un choc décrit aujourd’hui par un de ses opposants d’alors comme le choc salutaire de l’alternance pour la démocratie française.

Elles traduisent aussi la nostalgie des Français pour un président qui a osé imposer des réformes sociales fortes dès son arrivée au pouvoir; qui s’est fourvoyé dans une politique économique dont une partie de ses proches annonçait la faillite dès le départ, puis en est revenu deux ans plus tard tout en maintenant les réformes sociales engagées… dont certaines pèsent toujours sur les finances publiques françaises, ou qui, par exemple avec l’abolition de la peine de mort, n’a pas hésité à imposer un choix politique et éthique à l’encontre de l’opinion largement majoritaire.

C’est aussi le souvenir d’un chef de l’État plus pénétré de Culture que d’économie, et qui a laissé sa trace dans le paysage parisien (Pyramide du Louvre, Arc de La Défense, Opéra de La Bastille, Colonnes de Buren), à la manière d’un monarque absolu non couronné, dont les Français sont périodiquement en quête, pratiquement depuis qu’ils ont coupé la tête de Louis XVI, le 21 janvier 1793.

Bizarrement par contre, son engagement européen, notamment à travers une proximité renforcée avec l’Allemagne, mise à l’épreuve au moment du processus de réunification en 1989, n’a été que très furtivement évoqué.

Plus prosaïquement, cette commémoration souligne en creux la médiocrité de la classe politique qui a succédé à François Mitterrand. En partie par sa faute, à la fois parce qu’il a étouffé au Parti socialiste les successeurs d’envergure (Jacques Delors, Michel Rocard) qui auraient pu faire de l’ombre à son bilan, et parce que par calcul politicien, il a favorisé l’expansion du cancer du Front national dans le paysage politique français.

Deux présidents d’envergure

La tentation est effectivement toujours grande d’idéaliser le passé. Mais à l’analyse, il faut bien convenir que seuls le général de Gaulle, qui s’est donné une République à la mesure de son ambition, et François Mitterrand, qui a joué à fond de ses institutions, ont présidé avec brio la Veme République. Tous deux en ayant bénéficié d’un fort soutien populaire au départ, puis subi la désillusion d’un peuple qui croit peut-être naïvement qu’un homme seul peut décider de l’évolution du pays.

Georges Pompidou n’a pas eu le temps d’assumer la succession du premier, et avant le second, l’illusion Giscard d’Estaing s’est progressivement dissipée au cours de son septennat.

Ensuite, si Jacques Chirac a été (et reste) un président très populaire, il a surtout brillé par ses gaffes politiques et son incapacité à exercer le pouvoir après l’avoir brillamment conquis.

Puis sont venus Nicolas Sarkozy, manifestement trop court pour la fonction; et François Hollande qui a très maladroitement tenté de reproduire le modèle Mitterrand. Jusque dans ses écarts amoureux avec l’épisode humiliant du scooter qu’il utilisait pour se rendre à son rendez-vous galant…

Reste Emmanuel Macron, sorti du néant politique, dont le parcours actuel n’est pas loin de rappeler la parenthèse Giscard d’Estaing des années 1970. Peut-être dans sa quasi-certitude d’aller tout droit vers la réélection, performance qu’à l’heure présente, seul François Mitterrand a effectivement réalisée.

Décidément, on comprend cette nostalgie de l’époque de « Tonton ». Même si, pour les Françaises et les Français, il serait peut-être préférable, l’an prochain, de pouvoir revenir les pieds sur terre….

Le retour de Seraing en D1A: sympa… mais de quel Seraing parle-t-on?


L’événement footballistique du week-end, dans notre petite terre d’héroïsme, a été la dégelée infligée par le RFC Seraing au SK Waasland-Beveren, qui condamne à la relégation le club waeslandien, et ramène du coup les Sérésiens au plus haut niveau du football belge, qu’ils ont quitté il y a un quart de siècle.

Ce résultat fait que la saison prochaine commencera à nouveau avec quatre clubs wallons au sein de l’élite: le Standard, le Sporting de Charleroi, l’AS Eupen (que je qualifierais plutôt de club germanophone… ou qatari), et donc, à la place de l’Excelsior Mouscron, le RFC Seraing, ou plus exactement le FC Seraing, si l’on s’en tient à la règle qui impose qu’un titre de «société royale» ne s’obtient qu’en fonction de conditions strictes (50 ans d’existence et agrément du Palais Royal), et qu’il ne peut se transmettre au gré de cessions à l’encan, dont le club de l’ancienne cité du fer a fait plusieurs fois l’objet au cours des dernières années.

Si l’on s’en tient aux faits, le RFC Seraing, club créé en 1905, a connu une existence chahutée marquée, au cours du dernier demi-siècle, par une grève des joueurs en 1969; par l’arrivée, l’année suivante, du défunt bourgmestre de Seraing, Guy Mathot, dans le comité de direction du club, ce qui lui attirera, plus tard, divers ennuis judiciaires; par la faillite du club, le 18 juin 1984, et sa reprise, en 1990, par le défunt entrepreneur bruxellois Gérard Blaton. Lequel fera flamber le Pairay, en qualifiant notamment le club pour une coupe d’Europe, avant de jeter l’éponge: le 2 avril 1996, le RFC Seraing est absorbé dans la fusion avec le Standard de Liège, et son matricule, le 17, disparaît pour toujours.

Feu le notaire Paul Plateus, fils de François Plateus, dirigeant historique du club, ancien secrétaire général du RFC Seraing, avait lutté jusqu’au bout pour faire échec à cette fusion, qui «tuait» son club. Mais comme le nabab bruxellois disposait de la totalité des parts de la coopérative, il n’avait eu que ses mots à opposer à une fusion qui équivalait à une mise à mort.

Restait le stade du Pairay, désormais veuf: il ne restera pas longtemps inoccupé. La Royale Union Liégeoise, née de la fusion de Bressous (matricule 23) et de Jupille, sous l’impulsion de l’ancien secrétaire du CPAS de Liège, Michel Faway, vient y planter ses pénates, et, en hommage au lieu, modifie son nom: le RFC Seraing-RUL voit le jour. Le 1er juillet 1996, il adaptera son nom: le RFC Sérésien accueille au sein de son équipe dirigeante d’anciens joueurs du RFC Seraing. En troisième division, le club se reconstruite patiemment jusqu’à l’irruption de Bernard… Serin.

Bernard Serin est une personnalité hors du commun. Il est arrivé en région liégeoise dans les bagages d’Usinor, et a été placé à la tête de Cockerill-Sambre quand le groupe sidérurgique lorrain a repris la sidérurgie wallonne.Tenu à l’écart du comité de direction du géant sidérurgique Arcelor, né de la fusion, le 18 février 2002, d’Usinor, de la luxembourgeoise Arbed, et de l’espagnole Aceralia, il claque ensuite la porte et reprend, avec l’aide de capitaux liégeois, Cockerill Mechanical Industries (CMI), la filiale la plus boîteuse du bassin sidérurgique liégeois. Il la transforme rapidement en success story wallonne et internationale: le groupe, qui a pris aujourd’hui le nom de John Cockerill, rayonne dans le monde entier.

Parallèlement à cela, cet hédoniste, originaire de l’Hérault, est devenu à la fois Lorrain et liégeois, et il est passionné par le football. Entré dans le comité du FC Metz en 2006, il en devient le vice-président exécutif en 2008, puis président en 2009, succédant au mythique Carlo Molinari. Bernard Serin préside toujours le club messin, qui, sous sa conduite, a connu des fortune diverses, faites de descente en Ligue 2 puis de remontée en Ligue 1, où il figure toujours aujourd’hui.

Cet homme d’affaires avisé imagine alors rapidement un partenariat entre le club lorrain et… qui au fond?

Dans un premier temps, le 1er juillet 2013, il reprend le RFC Sérésien, mais le club évolue alors en Iere provinciale liégeoise: la mariée n’est pas assez belle pour en faire un partenaire du FC Metz.

Un an plus tard, c’est le tour de passe-passe: le 1er juillet 2014, Bernard Serin rachète le matricule du club de Boussu-Dour, club lui-même issu d’une fusion, mais à bout de souffle. Sous le numéro 167, le club, baptisé Seraing United, évolue alors en division II.

Douze mois plus tard, le 1er juillet 2015, le club change à nouveau de nom: selon le site du club, il redevient le «RFC Seraing».

Petit problème, sauf à donner à la lettre «R» une autre dénomination, il ne peut en aucun cas exciper du titre de «Royal» puisque Seraing United n’avait pas hérité de cette distinction, non plus que Boussu-Elouges et Dour, clubs passé à la trappe de cette opération, de même que Bressoux, Jupille, et la Royale Union Liégeoise, dont le souvenir ne subsiste plus que chez les historiens du football belge.

Le phénomène n’est pas unique dans le football belge: pour ne plus parler du RWDM qui unit trois clubs disparus (le Racing de Bruxelles, le White Star, et le Daring de Molenbeek) qu’on a rebaptisé abusivement «Daring» à chaque fois qu’il a rencontré l’Union Saint-Gilloise, le Beerschot, par exemple, failli lui aussi, ne s’est tiré d’affaire qu’en rachetant le matricule de Wilrijk, et n’a gardé que pour un temps le nom de Beerschot-Wilrijk qui correspondait exactement à sa situation «matriculaire»

Le partenariat entre les deux clubs peut alors s’organiser: Seraing devient la succursale du FC Metz.

Un partenariat «gagnant-gagnant»? Pas immédiatement, puisque, avec la réforme du football belge, le FC Seraing s’est retrouvé en division IA francophone, où il a figuré sans briller jusqu’à l’année dernière, quand à la faveur d’un replâtrage de bric et de broc de la division I B (avec notamment l’intégration brillamment ratée des U23 du Club Brugge), le matricule 167 a bénéficié de circonstances administrative favorables, avec le désistement de plusieurs clubs, pour acquérir, sur le tapis vert, le droit de jouer à l’étage supérieur cette saison.

On connaît la suite: les renforts heureux venus de Lorraine, avec surtout le buteur Georges Mikautatdze, 22 buts cette saison, qui va repartir pour Metz; le début de championnat tonitruant; puis la lutte pour conquérir la deuxième place dans le sillage de l’intouchable Union Saint-Gilloise, placée, elle, sous tutelle britannique.

La conclusion de cette campagne est tombée dimanche, et quelques centaines de supporters ont fêté les «Rouge et Noir» à leur retour au Pairay.

Le plus dur commence maintenant. D’abord pour reconstruire une équipe, car Metz, qui a besoin de toutes ses plumes pour voler, reprendra ses meilleurs éléments, pour en amener d’autres, inexpérimentés, sur les hauteurs sérésiennes. Le problème, c’est qu’en division IA, les débutants n’ont pas toujours l’occasion de se faire les dents. Et le récent match de coupe de Belgique entre Seraing et le Standard est là pour montrer l’écart qu’il lui reste à franchir pour éviter de faire un rapide aller et retour.

Et puis reste la quadrature du cercle que Seraing, même à la grande époque des Bocande, Oblitas, Rojas, Bertelsen, Kabongo ou Lukaku (Roger, pas Romelu…) n’a jamais pu résoudre: hors les derbies liégeois, face au Standard ou au RFC Liégeois alors toujours en division I, ou à part la visite du Sporting d’Anderlecht ou du Sporting de Charleroi, les travées du Pairay sont le plus souvent restées désespérément vides.

Si on peut être heureux de cette promotion, et féliciter le FC Seraing pour ce résultat, ce n’est pas faire preuve d’un pessimisme exagéré de dire que son avenir reste aussi sombre que les fumées qui, jadis, sortaient de ses hauts-fourneaux aujourd’hui éteints…

L’élection à Madrid annonce des lendemains difficiles en Espagne


Qu’elles soient locales ou régionales, les élections suscitent toujours le même type de réaction, sous toutes les latitudes: si l’opposition en sort gagnante, les partis au pouvoir s’empressent de souligner que les enjeux du scrutin étaient purement locaux, et qu’on ne peut en tirer de conclusions globales. Tandis que les vainqueurs annoncent d’ores et déjà un renversement d’alliances au niveau national, ce qui se produit effectivement… parfois.

Après les élections régionales à Madrid, qui ont vu le triomphe de la liste du Parti Populaire, emmenée par Isabel Diaz Ayuso, il ne paraît pourtant pas présomptueux de prévoir de grandes difficultés pour le gouvernement socialiste de Pedro Sanchez et pour sa majorité brinquebalante. Surtout après le départ de Pablo Iglesias: la figure de proue du parti Podemos, qui avait quitté son poste de deuxième vice-président du gouvernement national pour descendre dans l’arène madrilène, afin de faire barrage à la droite et à l’extrême-droite, a tiré les conclusions de son échec cuisant, et annoncé son retrait de la politique. Un peu à la manière de Lionel Jospin, jetant l’éponge en 2002, après la qualification surprise de Jean-Marie Le Pen, le leader du Front National, au second tour de l’élection présidentielle française.

Il faut dire que la déroute a été totale pour Podemos, même si la présidence de Pablo Iglesias lui a permis de gagner trois sièges (10 contre 7) dans la nouvelle assemblée, ainsi que pour toute la gauche madrilène, dont le Parti Populaire a, à lui seul, dépassé le nombre de suffrages (65 contre 58). Or l’espoir du camp de gauche était d’amplifier son résultat global (54 élus) de 2019…

Pour le PSOE, le Parti Socialiste Ouvrier Espagnol du Premier ministre, Pedro Sanchez, la pilule est également amère à avaler, puisque la débâcle de Podemos ne lui a pas bénéficié: il se retrouve à égalité avec la liste écologiste au sein de l’assemblée madrilène. Mais si les «Verts» ont gagné 4 mandats et se retrouvent à 24, les socialistes, eux, en ont perdu 13. C’est donc tout naturellement la liste Más Madrid qui va prendre la tête de l’opposition.

Ce qui est rassurant, à Madrid, c’est que le résultat époustouflant du PP n’a pas permis à l’extrême-droite de progresser: Vox passe de 12 à 13 élus. Le maintien des nostalgiques du franquisme n’en reste pas moins un élément inquiétant dans la capitale espagnole. Ils pourraient même jouer un rôle politique important, puisqu’il manque quatre voix au Parti Populaire pour détenir la majorité dans une assemblée forte de 136 députés…

Autre constat, Ciudadanos, l’autre parti «citoyen», créé, comme Podemos, il y a une quinzaine d’années, a sombré corps et biens: il n’a pas atteint le seuil électoral des 5% et ses 26 sièges sont très vraisemblablement allés… au PP.

A priori, la majorité de Pedro Sanchez, composée du PSOE, du Parti socialiste de Catalogne, et de Podemos, reste en place. Puisque, air connu, l’élection à Madrid s’est jouée sur des enjeux madrilènes.

Le «hic», c’est que ce scrutin a ébranlé le PSOE et Podemos, tandis que le Parti Socialiste de Catalogne, lui, a subi la victoire des indépendantistes lors des dernières élections régionales. Qui oserait dire que le gouvernement Sanchez pourra appliquer son programme comme si rien n’était désormais?

Une nouvelle fois, la balance du pouvoir à Madrid pourrait avoir des répercussions lourdes en Catalogne, où on se souvient que l’attitude fermée de Mariano Rajoy, le prédécesseur conservateur de Pedro Sanchez, et son retrait sur les concessions précédemment faites par le PSOE aux nationalistes catalans, ont conduit à la crispation, à la proclamation unilatérale chahutée d’indépendance du 10 octobre 2017, et à la répression qui s’en est suivie. Un retour de la droite au pouvoir à Madrid étoufferait à nouveau dans l’oeuf toute tentative d’accord amiable entre le gouvernement central et les autorités autonomistes aux affaires à Barcelone.

L’élection à Madrid annonce peut-être tout autant des jours difficiles pour l’Espagne que pour le gouvernement Sanchez…

Dites «le» Covid et pas «la» Covid


D’accord, la pandémie actuelle de Covid-19 est… une belle saloperie, dont on espère se sortir au plus vite. Mais tant qu’à faire, autant appeler «le» Covid-19 par son nom, et pas «la» Covid-19, comme l’a déclaré de manière un peu précipitée l’Académie française, en se réclamant du mot anglais «disease», autrement dit «maladie», qui est féminin dans la langue de Shakespeare, a-t-elle expliqué.

Que l’Académie française se base sur l’anglais plutôt que sur l’usage pour déterminer le genre d’un mot est en soi assez bizarre. Mais en l’occurrence, comme elle l’a fait pour le wallon, qu’elle s’obstine à considérer comme un «dialecte du français» (cf. un article précédent de ce blog), l’Académie a péché par approximation. Car le nom scientifique du virus qui nous perturbe depuis plus d’un an est le SARS-CoV-2, acronyme anglais de Severe Acute Respiratory Syndrome Coronavirus 2. Autrement dit, le «Coronavirus 2» (puisque le mot «virus» est masculin), qui provoque «un syndrome respiratoire aigu sévère». On se demande toujours où nos immortels sont allés y dénicher le mot «maladie»…

À côté de l’immense défi que représente la sortie de pandémie, cette réflexion prend des allures de débat sur le sexe des anges, j’en conviens bien.

Mais comme disait Albert Camus, «mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur d’autrui», et le malheur provoqué par la pandémie est suffisamment grand pour que les approximations de l’Académie n’y ajoutent pas de la confusion. Il est assez interpellant de voir des chaînes télévisées francophones parler régulièrement «du» Covid, pendant que d’autres chaînes télévisées, essentiellement françaises, s’accrochent à «la» Covid.

Comme toujours, l’usage se chargera de régler les choses, et l’Académie l’enregistrera avec retard. Après tout, à mes débuts dans la carrière journalistique, un vieil avocat qui plaidait devant un tribunal correctionnel des dossiers tout à fait communs d’accidents de la circulation, plaisantait en relevant qu’on parlait couramment d’«une automobile» alors que la logique aurait voulu qu’on parle «d’un automobile», puisque le mot «mobile» est masculin. L’Académie, heureusement, n’était pas là, intervenue pour imposer une règle. On lui souhaite avant tout de mettre son dictionnaire à jour, et de se rappeler que le wallon est une langue…