Les journalistes responsables de la montée ou non de l’extrême-droite? Un peu courte, l’analyse!


Pour Jean-Marc Nollet, l’absence de l’extrême-droite en Wallonie serait le résultat du «silence médiatique» à son propos!

Le coprésident d’Ecolo, Jean-Marc Nollet, était présent sur La Première, ce matin, comme dans les colonnes de divers journaux, dont celui qui m’a employé pendant de nombreuses années sans jamais me rémunérer à mon goût (lol). Et, en radio, il a osé féliciter son interlocuteur sur le «cordon médiatique» qui, selon lui, préserve la Wallonie de la déferlante d’extrême-droite qui fait rage en Europe depuis des mois, et dont le dernier avatar a fait une percée désolante au Portugal, en demi-siècle après la révolution des œillets qui a mis fin à la dictature salazariste.

Il est vrai que l’extrême-droite n’a pas droit au chapitre dans les médias francophones… pour la bonne et simple raison qu’elle est pratiquement inexistante sur le plan politique!

Pourquoi l’extrême-droite «n’accroche»-t-elle pas en Wallonie? Différentes formes d’explications ont déjà été avancées ces dernières années, dont la principale est l’absence de «nationalisme wallon».

Si le contentieux fouronnais, dans les années 1980, le slogan flamingant «Plus un franc flamand pour l’acier wallon»; ou l’émergence progressive du pouvoir wallon ont pu créer un sentiment wallon, les Wallons sont plus particularistes que nationalistes. Avant d’être Wallon(ne), on est Liégeois(e); Borain(e); Luxembourgeois(e); Namurois(e); Condruzien(ne); Hesbignon(ne); Carolorégien(ne); et autres identités plus locales.

Autre élément d’explication: l’extrême-droite wallonne n’a jamais été entraînée par un(e) leader d’envergure. Au contraire, les diverses mouvances d’extrême-droite, portées par des responsables falots, ont plus passé leur temps à se chamailler entre elles qu’à forger un programme nauséabond, du type de ceux de la Lega en Italie; de l’Afd (Alternativ für Deutschand) Outre-Rhin; du Rassemblement national en France; ou du Vlaams Belang en Flandre, qu’on annonce premier parti au nord du pays au lendemain des scrutins du 9 juin prochain. Au point que le Front national français, mué depuis lors en Rassemblement national, avait fini par interdire au Front national belge l’utilisation de son nom et de son symbole, la flamme tricolore, rouge-jaune-noir en Belgique, sur le modèle de la bleu-blanc-rouge française.

Rendre les journalistes responsables de l’émergence et de l’essor de mouvements d’extrême-droite n’est pas nouveau, en Belgique francophone. Il y a une trentaine d’années déjà, Louis Michel, alors président des libéraux francophones, avait déjà avancé pareille explication. Ce qui m’avait déjà poussé, alors en tant que président des journalistes belges et francophones, à protester.

Les journalistes français(e)s auraient-ils (elles) rempli leur devoir d’informer s’ils (si elles) avaient refusé la parole à Marine Le Pen avant le deuxième tour de la dernière élection présidentielle?

Même si une chaîne comme CNews, en France, est réputée «rouler pour» l’extrême-droite, dont elle relaie complaisamment les points de vue, oserait-on dire que les journalistes français, dans leur ensemble, sont des suppôts de l’extrême-droite, parce qu’ils invitent périodiquement des responsables politiques du Rassemblement national à s’exprimer? N’auraient-ils pas rempli leur mission d’information, quand Marine Le Pen s’est retrouvée au deuxième tour de l’élection présidentielle, face au (futur) président Macron, s’ils ne lui pas octroyé le même temps de parole?

De la même manière, les journalistes néerlandophones de Belgique peuvent-ils se permettre de ne jamais parler du Vlaams Belang, alors que la percée de ce parti s’annonce irrésistible, au point de le placer en tête au lendemain du 9 juin?

Dans le même temps, s’indigne-t-on en Wallonie de l’espace accordé au PTB (Parti du Travail de Belgique)? Même si l’extrême-gauche et l’extrême-droite ne peuvent sûrement pas être placée sur un pied d’égalité, en fonction des «valeurs» qu’elles défendent respectivement.

De toute manière, il y a belle lurette que les journalistes, tout en refusant toute responsabilité dans l’émergence et le progrès des mouvements d’extrême-droite, ont réfléchi à la manière de les aborder, en décortiquant leur programme et en révélant ce qu’ils ne veulent parfois pas dire.

Mais au fait, cette attitude journalistique ne doit-elle pas s’appliquer à l’ensemble des partis politiques, spécialement en période électorale? Quand Jean-Marc Nollet, ce matin, annonçait «plus de trains ponctuels» ou «quatre mille kilomètres de pistes cyclables en Wallonie» si Ecolo revient au pouvoir après le 9 juin, on aurait pu lui rappeler que le ministre fédéral de la Mobilité, Georges Gilkinet, est le vice-Premier ministre… écolo du gouvernement dirigé par Alexander De Croo. Et qu’en Wallonie, le ministre écolo de l’Énergie et du Climat, Philippe Henry, est responsable entre autres du large sous-équipement de la Région en matière de bornes de recharge des voitures électriques.

On aurait pu aussi interroger Jean-Marc Nollet sur sa présence depuis trente ans dans le landerneau politique, alors qu’Ecolo, en principe, milite pour la limitation du nombre de mandats: l’incohérence politique, plus que le silence médiatique, est une des composantes du lit de l’extrême-droite…

Pour les Congolais(e)s, l’avenir reste aussi sombre


La Commission électorale nationale indépendante (Céni) l’a proclamé: Félix Tshisekedi est reconduit dans sa fonction de président de la République Démocratique du Congo (RDC) sur un score sans appel de 73,34% des voix. Et comme par le passé, la communauté internationale entérinera ce résultat, malgré tous les questionnements qu’on doit se poser sur la régularité de ce scrutin. Trop heureuse de voir la transition du pouvoir s’efforcer pacifiquement dans le plus grand pays d’Afrique, un continent où, dans bien des pays, des coups d’État militaires, dont certains sont orientés par le groupe de mercenaires russes Wagner et par la Russie de Vladimir Poutine, ont interrompu le cycle démocratique.

Faut-il pour autant se satisfaire de ce scrutin chahuté?

La réponse est venue de la mission d’observation des Églises catholique et protestantes, qui a dit avoir «documenté de nombreux cas d’irrégularités, susceptibles d’affecter l’intégrité des résultats de différents scrutins en certains endroits».

Pour rappel, le 20 décembre dernier, les Congolaises et les Congolais étaient invité(e)s à élire leur président, leurs députés nationaux et provinciaux, et leurs conseillers locaux. En principe, le scrutin n’était prévu que ce jour-là, mais les nombreux problèmes qui ont surgi – comme ceux de bureaux de vote censés ouvrir leurs portes à 9 heures mais qui n’ont été accessibles qu’à 13 ou 14 heures, le temps d’installer des isoloirs et/ou des «machines à voter»- ont fait que les opérations de vote ont été étendues au 21 par la Céni, et ont duré plusieurs jours dans certaines régions. Faisant naître le soupçon de manipulations, comme celles qui ont permis à Félix Tshisekedi d’être élu à la présidence en décembre 2018, au détriment de Martin Fayulu, considéré par de nombreux observateurs comme le véritable vainqueur du scrutin présidentiel.

Un succès électoral incontestable, pour Félix Tshisekedi?

Martin Fayulu était à nouveau en piste cette année, et il est crédité de 5,33% des suffrages, derrière Félix Tshisekedi et Moïse Katumbi, l’ancien gouverneur du Katanga, qui aurait bénéficié de 18,08% des voix. L’ancien Premier ministre, Adophe Muzito, aurait obtenu, lui 1,12%, et la vingtaine d’autres candidats, dont le Prix Nobel de la Paix, Denis Mukwege, n’aurait pas franchi le seuil de 1% des suffrages.

Selon la Céni, 43% des inscrits auraient pris part au scrutin.

Ce dernier chiffre, et le système d’élection présidentielle à un seul tour, qui couronne le candidat arrivé en tête, suffiraient pas, dans de nombreux pays, pour invalider ce mode de scrutin et à postuler, au moins, un deuxième tour opposant les deux candidat(e)s arrivé(e)s en tête au premier tour.

Et l’exigence d’une participation d’au moins 50% des citoyen(ne)s à l’élection.

Au-delà de ces considérations politiques, la question qui se pose est de savoir si la réélection de Félix Tshisekedi pour son second mandat présidentiel, va améliorer un tant soit peu la situation des Congolaises et des Congolais, dont l’état de pauvreté dans un pays aussi riche de son sol et de son sous-sol est un authentique scandale.

Si point n’est nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer, comme l’aurait décrété Guillaume le Taciturne, il faut bien constater que sur base de son bilan de président sortant, on ne peut guère attendre de résultat de Félix Tshisekedi.

Pour la population congolaise, l’urgence règne depuis longtemps…

On inscrira à son crédit l’effort pour amener tous les enfants gratuitement à l’école primaire. Mais pour le reste, sa lutte contre la corruption, matérialisée par la condamnation de son allié de 2018, Vital Kamerhe, réhabilité ensuite, n’a débouché sur rien de concret. Et la promesse de rétablir la paix dans l’est de la RDC est démentie chaque jour par les morts qui s’y accumulent, et la persistance de groupes de guérillas armés qui font peser leur dictature sur des populations affamées.

Quant à l’exploitation, essentiellement chinoise et rwandaise, des ressources minières du pays, elle se poursuit de manière éhontée.

Si Félix Tshisekedi avait suscité de grands espoirs, il y a cinq ans, tant en raison du nom qu’il portait que de sa réputation d’opposant à la dictature de Mobutu puis au règne sans partage de Joseph Kabila, le désenchantement est survenu. Il s’est notamment matérialisé par la très faible participation au scrutin du 20 décembre, et des jours suivants.

On n’ose espérer que les choses changent fondamentalement. À moins que dans certaines administrations locales ou provinciales se retrouvent des élu(e)s pénétré(e)s du bien public, et qui, d’ici à quelques années, pourraient accéder à des fonctions plus importantes. Pour construire une vraie démocratie à partir de la base.

Le drame, pour la population congolaise, c’est que l’urgence se fait sentir depuis longtemps…

L’échevin disonais Delaval défenestré: sérieux dilemme pour le PS


L’absence de quorum requis lors du vote à bulletins secrets imposé à l’Union Socialiste Communale (USC) de Dison n’y a rien changé : la motion de défiance introduite par son propre parti contre l’échevin des Finances, Jean-Michel Delaval, a été approuvée par le groupe socialiste, rejoint bizarrement par un élu MR, moins évidemment le désormais ex-échevin lui-même. Ce dernier a plaidé sa cause en conseil er sur Facebook, mais il n’a pas fait de pli, et a repris sa place au sein du groupe socialiste, se disant toujours membre du parti. Fin de l’épisode? Pas si sûr…

On peut se réjouir de voir ainsi des élus voter en âme er conscience, en ignorant les mots d’ordre… ou les statuts de leur propre formation politique. Mais on s’étonne en même temps de voir des élu(e)s socialistes, par essence parmi les plus régenté(e)s par leur parti, s’éloigner ainsi du « rappel à la loi » que leur avait imposé la commission de vigilance du PS, après que la fédération verviétoise de l’ex-parti à la rose eut, comme expliqué ici, décidé courageusement de se débarrasser de la patate chaude.

L’ex-échevin n’a pas fait un pli, mais a annoncé un recours

L’ex-échevin Delaval a déjà annoncé un recours devant les instances du PS, qui vont se retrouver face à un terrible dilemme: vont-elles désavouer l’ensemble du groupe socialiste disonais (moins Jean-Michel Delaval) et notamment la bourgmeste, Véronique Bonni, à un peu plus d’un an du scrutin communal, ou bien va-t-il lui imposer un humiliant retour en arrière ?

Le sort de ce recours sera observé avec grand intérêt, même si la formation du président Paul Magnette se caractérise par une interprétation assez erratique de ses propres statuts. Faut-il rappeler ici l’exclusion de la bourgmestre de Verviers, Muriel Targnion, coupable d’avoir voulu démettre un président de CPAS, qui a ensuite été écarté, mais la confiance renouvelée à son collègue de Sambreville, Jean-Charles Luperto, pourtant définitivement condamné en justice? Ou la suspension immédiate du bourgmestre d’Anthisnes et député européen Marc Tarabella, cité et inculpé dans le «Qatargate», mais qui bénéficie toujours , comme tout accusé, de la présomption d’innocence?

Reste que désormais, la majorité disonaise est irrémédiablement divisée.

La défenestration de l’échevin Delaval, après celle de la présidente du CPAS, Dany Wérisse, et la démission de l’échevin Benoit Dantinne pourrait se révéler une victoire à la Pyrrhus pour la bourgmestre.

Celle-ci, qui se disait « attristée » au début de l’épisode, a sans doute révélé ses véritables intentions en se muant en authentique Fouquier-Tinville à l’égard de son ex-collègue, qui a par ailleurs des choses à se faire pardonner: https://www.vedia.be/www/video/info/politique/l-echevin-des-finances-de-dison-jean-michel-delaval-a-ete-limoge_111801.html

Véronique Bonni a ainsi (provisoirement?) écarté celui qui avait failli la priver de la tête de liste aux dernières élections communales et qui risquait de lui faire de l’ombre en octobre 2024. Son pari est risqué : elle pourrait dans un peu plus d’un an devenir la bourgmestre qui aura fait perdre au PS son emprise quasi-séculaire sur la politique disonaise..

Pourquoi en faire autant sur le sacre de Charles III?


Le monde va s’arrêter, ce samedi, pour visionner le couronnement du roi du Royaume-Uni, Charles III. Le monde et en tout cas la Belgique, puisque la chaîne publique a d’ores et déjà annoncé que son journal télévisé de la mi-journée sera décalé de deux heures et demie, pour se dérouler en milieu d’après-midi!

Et tout ça pour quoi? Pour une cérémonie protocolaire et fastueuse qui ne nous concerne absolument pas, et qui, surtout, relève d’un autre temps, voire de temps anciens. Sans compter que les sommes dépensées pour ce couronnement, le plus cher de tous les temps, apparaissent singulièrement indécentes dans le contexte de crise internationale qui frappe le monde entier en général, et le Royaume-Uni en particulier.

La monarchie, en soi, apparaît de nos jours comme une forme de régime politique de plus en plus incongrue: la démocratie ne peut se satisfaire d’une transmission du pouvoir par simple hérédité, indépendante des qualités ou des défauts de la personne appelée à exercer la fonction suprême de chef(fe) de l’État, aussi symbolique soit-elle.

Ces défauts, quand ils existent, sont d’ailleurs rarement détaillés. Ils sont toujours noyés sous un torrent de propos sirupeux, largement répandus, et dont, cette semaine, on a déjà eu un aperçu notamment sur VivaCité où sévit un ersatz du défunt Léon Zitrone. On pensait pourtant que ce dernier était inégalable dans le genre. Et non, il est toujours possible de faire pire!

Pourtant, un certain nombre de pays européens ont conservé une forme monarchique. Alors que d’autres, républicains en principe, ont plutôt une forme de monarchie élective, aux pouvoirs nettement plus étendus que ceux des monarchies traditionnelles: il n’est nul besoin de voyager très loin pour en trouver une.

Cela n’efface pourtant pas les défauts inhérents à la forme monarchique du pouvoir. Car rares sont les monarchies à échapper aux critiques fondées. Comme celles qui visent l’ex-roi d’Espagne, Juan-Carlos, un temps célébré pour avoir sauvé une démocratie chancelante dans son pays, aujourd’hui exilé en Arabie Saoudite pour oublier ses turpitudes privées et échapper à d’éventuelles poursuites financières. On se souvient aussi de la condamnation du beau-frère (roturier) du roi actuel, Felipe, pour corruption.

En Norvège, c’est une princesse, Märtha-Louise, la sœur aînée du roi actuel, qui s’est entichée d’un pseudo-shaman états-unien, avant d’émigrer Outre-Atlantique avec ses enfants. Au Danemark, il était patent que le défunt prince consort d’origine française a connu une triste fin de vie, tant son existence lui était devenue insupportable. Et si, aux Pays-Bas, la famille royale semble plus ou moins vivre dans une certaine normalité, dans la mesure où celles et ceux qui ne sont pas appelés à régner trouvent normal de travailler, chez nous, les dernières révélations sur l’enfance et l’adolescence du prince Laurent ont rappelé, après l’épisode de Delphine de Saxe-Cobourg, ex-Boël, combien les relations au sein de la famille royale n’ont rien d’idyllique

Un couronnement d’un autre âge pour Charles III

Retour au Royaume-Uni d’où partiront ce samedi des tonnes de lieux communs: entre les fils de Charles III, la rupture est consommée. L’absence de l’épouse et des enfants de Harry (dont l’aîné fête son anniversaire ce samedi même) le démontrera de manière éclatante. On imagine qu’elle ne sera qu’à peine évoquée. Tandis que des couronnes de lauriers seront tressées autour de la « reine consort », jadis vilipendée…

On ne parle pas non plus d’Andrew, un des frères cadets de Charles III, qui n’a évité un procès pour viol de mineure aux États-Unis qu’au prix d’un coûteux accord financier. Il a été exclu de toute fonction officielle, à la suite de cet épisode fort peu glorieux. Mais il sera quand même de la fête…

Reste la question qui interroge ; pourquoi le monde entier s’arrêtera-t-il ce samedi? Pourquoi la chaîne publique belge reportera-t-elle son journal de la mi-journée de quelque deux heures et demie, quoi qu’il se passe chez nous ou dans le monde ? Parce que nous serions tous des Britanniques? Allons donc, c’était peut-être vrai en 1953, dans l’immédiat après-guerre, au moment du couronnement d’Elizabeth II.

Aujourd’hui, après le Brexit, avec des Écossais qui continuent à rêver d’indépendance, ce n’est plus du tout le cas. La course à l’audimat ne peut tout justifier!

La jacquerie néerlandaise s’est traduite dans les urnes


Les Français avaient connu les «Bonnets rouges» avant les «Gilets jaunes» sans pouvoir traduire cette colère populaire dans les urnes: les Néerlandais ont transformé l’essai, en faisant du BoerBurgerbeweging (le Mouvement Paysans-Citoyens) le grand vainqueur des élections provinciales cette semaine. Ce qui leur a valu les félicitations du Premier ministre libéral, Mark Rutte, même si le nouveau-venu a pris des voix à son parti, à son partenaire de coalition démocrate-chrétien (CDA), et surtout au parti d’extrême-droite, Forum voor Democratie, de Thierry Baudet.

Le succès de l’ancien «Parti des fermiers» n’est pas tout à fait inattendu: aux Pays-Bas comme en Flandre récemment, les agriculteurs ont massivement manifesté pour rejeter les dispositions d’un plan de réduction des rejets d’azote que, comme chez nous, ils estimaient trop massivement dirigé contre le secteur agricole.

Caroline Van der Plas illustre l’adage selon lequel le journalisme mène à tout, à condition d’en sortir…

Les électeurs néerlandais sont par ailleurs coutumiers du vote en faveur de partis nouveaux, qui ne se sont pas encore frottés à l’exercice du pouvoir. Dans les années 60-70, c’est le parti D66, libertaire à ses débuts, qui a recueilli les voix des mécontents. Trente ans plus tard, c’est un leader d’extrême-droite décomplexé, Pim Fortuyn, qui a opéré une percée spectaculaire, avec un anti-islamisme forcené, qui a conduit à son assassinat. Sa succession a été prise avec un succès certain par Geert Wilders, le chef aux cheveux peroxydés d’un parti hypocritement baptisé « de la Liberté» (PVV). Avant que Thierry Baudet, et son Forum pour la démocratie, ne prenne le relais au cours des derniers scrutins. Jusqu’à cette semaine, où, victime d’une dissidence, il a surtout vu le BBB, conduit par une ancienne journaliste, Caroline Van der Plas (soucieuse de confirmer l’adage selon lequel le journalisme mène à tout à condition d’en sortir?), lui damer le pion.

Au vu des exemples ci-dessus, le Mouvement Paysans-Citoyens est-il appelé à… ne pas durer?

Dans la foulée de ce succès électoral inattendu, les Néerlandais veulent y croire. «Il leur suffit qu’ils placent des gens compétents aux postes à responsabilités pour qu’ils s’installent dans la durée» confiait un de ses électeurs au micro de la télé flamande, partie à la découverte de ce phénomène politique nouveau.

La chance du BoerBurgerBeweging pourrait venir d’une invitation à se joindre à la coalition gouvernementale, peut-être à la place d’un des partenaires affaiblis, le CDA (dont Caroline Van der Plas a fait partie naguère), ou la Christen Unie, le petit parti confessionnel cramponné sur des positions assez rétrogrades.

Le BBB, nous dit-on, ne se contente pas d’une seul problématique, les règles en matière de rejet d’azote, ou d’un seul secteur, le secteur agricole. Son programme est plus large que cela, et il présente à la fois des aspects de gauche, en matière sociale, et de droite, en matière d’immigration notamment, susceptibles de balayer large.

Un coup d’œil sur son programme laisse tout d’abord apparaître des propositions plutôt.. écolos: un sol sain, des plantations saines, des animaux sains, des paysans, des jeunes et des citoyens sains. Tout comme l’économie, l’enseignement, et la société. Des Pays-Bas en pleine santé, en quelque sorte!

Tout de même, si le parti rejette toute forme de discrimination, et veut des Pays-Bas ouverts à une immigration en provenance de pays en guerre, pour tous les autres migrants, il exige qu’ils puissent prouver qu’ils ont un métier pour pouvoir rester chez nos voisins. Ce qui revient à dire, en fait, qu’ils ne seront guère à obtenir un titre de séjour!

Le BBB propose aussi notamment un Fonds, alimenté par les supermarchés, pour récompenser les agriculteurs soucieux du bien-être animal. Au vu de l’attitude de l’actionnaire néerlandais du groupe Delhaize, ce n’est pas gagné d’avance! Il veut également renforcer le droit qui protège l’agriculture, et notamment la transmission agricole. Une loi doit prévoir des compensations, qui empêcheront les frais de transmission de se répercuter sur le consommateur, explique-t-il. Et ils entendent assouplir le plan de réduction des rejets d’azote…

La multiplicité des partis politiques aux Pays-Bas rendant la négociation de chaque coalition gouvernementale fort longue entre partenaires obligés de signer des compromis, le BBB, s’il s’installe dans la durée, risquera de se trouver un jour associé aux partis au pouvoir… que les électeurs néerlandais sanctionnent ensuite, en accordant leurs voix à un nouveau-venu.

On est impatient de connaître la suite…

Au nord comme au sud de la frontière linguistique, les mêmes maux frappent les politiques


Après l’affaire Nethys, l’affaire du greffier du Parlement wallon: il semble bien difficile de moraliser la vie politique en Wallonie. En Wallonie uniquement? Un peu au-delà de la frontière linguistique, les «affaires» se succèdent à Saint-Trond, où le dernier épisode en date a vu Jelle Engelbosch, une des figures de proue de la N-VA locale et limbourgeoise, annoncer son retrait de la politique. L’homme, l’année passée, avait été proposé par son parti au poste de bourgmestre de la cité fruitière, en remplacement de Veerle Heeren (CD&V), obligée de démissionner après plusieurs affaires embarrassantes. En Flandre aussi, la Roche Tarpéienne est décidément fort près du Capitole.

Veerle Heeren s’était arrogé une priorité vaccinale avant d’accorder un prêt illégal à un de ses prédécesseurs

Les première péripéties des «affaires Heeren» avaient transpiré quelque peu de ce côté de la frontière linguistique. Parce qu’elles touchaient à la pandémie de coronavirus. Celle qui était alors la bourgmestre trudonnaire s’était accordé, à elle et à son entourage, une priorité vaccinale qui n’avait pas lieu d’être. Lorsque ces faits avaient été rendus publics, une suspension de six mois de sa fonction mayorale lui avaient été imposée. Au passage, l’épisode l’avait privée d’une promotion dans les Ordres nationaux, que son passé de parlementaire lui aurait en principe automatiquement value.

Le souci pour Veerle Heeren, c’est qu’à peine rentrée en fonction, elle était convaincue d’avoir accordé un prêt illégal de 65000 euros à un de ses prédécesseurs, le fantasque Jef Cleeren (CD&V) lui aussi, dont on se souvient qu’il avait présidé le club de football local alors qu’il occupait l’Hôtel de ville de la cité hesbignonne.

Cette fois, c’en était trop: Veerle Heeren a dû démissionner de son poste, et parmi les candidats à sa succession figurait Jelle Engelbosch. C’est néanmoins une autre CD&V, Inge Kempeneers, qui a hérité de l’écharpe mayorale.

Encore heureux, finalement, que cette étoile montante de la N-VA, qui avait recueilli, en 2014, pas moins de 15000 voix de préférence sur la liste N-VA pour le Parlement flamand, n’ait pas accédé au poste de bourgmestre. Sans quoi, Saint-Trond se serait à nouveau retrouvée sans mayeur en ce printemps 2023.

Après son passage au Vlaams Parlement, Jelle Engelbosch était revenu sur la scène trudonnaire en 2019, pour y occuper le poste d’échevin d’Aménagement du territoire. Ce qui n’était pas précisément compatible avec son métier d’agent immobilier, selon l’opposition trudonnaire. Comme l’expliquait le Belang van Limburg, ce jeudi, il mettra fin à cette activité… deux ans plus tard.

Conflits d’intérêts, activités commerciale incompatibles avec sa fonction scabinale, utilisation d’informations à des fins privées: la barque de Jelle Engebosch s’est sérieusement chargée au fil des mois

Entre-temps, dans le village de Velm, qui fait partie de la ville de Saint-Trond, des agriculteurs avaient remarqué qu’une parcelle lui avait été vendue au prix de 90000 euros par la fabrique d’église locale. Une parcelle située en zone d’extension d’habitat! En conseil communal, l’homme expliquera qu’il s’agissait d’une extension de son jardin, et qu’il avait l’intention d’y faire paître des chèvres. Mais l’opposition, essentiellement socialiste, parlera de conflit d’intérêts, de fautes de procédure et de délit d’initié, rappelait le Belang van Limburg.

L’affaire qui lui a été politiquement fatale, rapporte le quotidien limbourgeois, portait sur une fermette, que le couple qui l’occupait ne pouvait plus modifier, en raison de difficultés financières. Ils devaient notamment des milliers d’impôts en matière d’immeubles inoccupés.

L’échevin trudonnaire rachète alors le bien, pour 30000 euros, alors qu’une estimation menée par un audit public en fixera plus tard la valeur à 144000 euros!

Il ne peut en principe rien en faire, dans la mesure où la démolition du bâtiment est interdite par la ville, dans le cadre de la préservation du paysage rural. Mais trois ans plus tard, cette disposition est prescrite, et l’homme peut alors disposer du terrain, et il fait disparaître la fermette.

Un audit se saisira du dossier en 2022, ce qui n’empêchera pas Jelle Engelbosch, quelques mois plus tard, d’être candidat au fauteuil mayoral. «Ce que je n’aurais pas accepté si je n’étais pas certain de mon innocence» dira-t-il alors.

Le rapport final des auditeurs a conclu au conflit d’intérêts, à l’exercice d’activité lucratives incompatibles avec sa fonction scabinale, et de l’utilisation d’informations à son profit personnel. Le Belang van Limburg signalait, en conclusion de son article, que le parquet mène par surcroît une enquête pour faux en écriture: Jelle Engelbosch a beau avoir pris ses distances avec la politique, il n’en a pas forcément fini avec les ennuis.

«Ce que nous faisons nous-mêmes, nous le faisons mieux» proclamait, il y a une vingtaine d’années, le ministre-président flamand Luk Vanden Brande (CD&V). En la matière, on dirait qu’ils font aussi pire que les autres!

Qatargate: tu quoque, amice ?


Depuis vendredi dernier, le député européen et bourgmestre d’Anthisnes, Marc Tarabella, est incarcéré à la prison de Saint-Gilles. Il doit répondre de faits de corruption publique, blanchiment, et appartenance à une organisation criminelle, dans l’affaire connue sous le nom de Qatargate, qui ébranle le Parlement européen.

Comme tout inculpé, Marc Tarabella bénéficie de la présomption d’innocence. Et tant à la fédération de Huy-Waremme du Parti socialiste, dont il est suspendu, qu’à Anthisnes même, ses amis, nombreux, affichent toujours leur conviction qu’il est effectivement innocent des faits mis à sa charge.

Son avocat, Me Toller, partage cette conviction, et a dénoncé le fait qu’il n’avait pas encore eu accès au dossier. Ce jeudi, cette lacune a été comblée quand il a plaidé la remise en liberté du bourgmestre anthisnois devant la chambre du conseil, et a, par surcroît, déposé une requête en suspicion légitime contre le juge d’instruction Michel Claise. En vain, puisque Marc Tarabella a été maintenu en détention.

A priori, on a des difficultés à imaginer que le juge d’instruction bruxellois, vétéran de la lutte contre la corruption et l’évasion fiscale, s’abaisse à incarcérer une personne pour faire pression sur elle, afin d’obtenir des aveux…

Nous aussi, nous l’avons dit, nous serions à la fois stupéfait et cruellement déçu si, au bout du compte, il apparaissait que Marc Tarabella, un député européen très engagé qui a toujours communiqué beaucoup sur son activité, se serait laissé acheter par l’émirat. Ce serait en contradiction totale avec toute son action politique, mais aussi avec sa personnalité. Car l’élu est resté l’homme qu’il était, il y a bien longtemps, quand il travaillait à Liège pour la Caisse Générale d’Épargne et de Retraite, l’antique CGER, disparue depuis longtemps dans la double vague de rationalisation et de privatisation du secteur bancaire.

Mais, en nous rappelant ce passé professionnel, nous avons été assez interloqué d’apprendre que les enquêteurs, vendredi dernier, n’ont pas seulement perquisitionné (en vain) les locaux de l’Administration communale d’Anthisnes, mais se sont aussi intéressés à un compte bancaire ouvert de manière anonyme, sous ses initiales, par le mayeur antisnois dans une banque liégeoise.

La pratique, il faut l’avouer, ne manque pas d’interpeller, car à quoi sert un compte anonyme, si ce n’est à des transactions discrètes ?

L’autre élément interpellant est une archive des débats au Parlement européen, où un ministre qatari plaidait la cause de son émirat, ava t le dernier championnat du monde de football. Alerté par un de ses anciens collègues députés, plongé jusqu’au cou dans le Qatargate, Marc Tarabella avait demandé et obtenu la parole, alors qu’il n’était pas inscrit au rôle. Et il s’était lancé dans un plaidoyer anti-boycott basé sur le fait que de telles objections n’avaient pas précédé le Mondial russe de 2018. Cela nous a laissé la pénible impression d’une intervention « aux ordres »…

La présomption d’innocence de Marc Tarabella reste entière, répétons-le. Mais on attend que sa situation se clarifie surtout au plus vite, dans un sens comme dans l’autre. Mais pour l’instant, nous serions tenté de paraphraser Jules César, le jour de son assassinat, et de lancer « Tu quoque, amice? ». « Toi aussi, ami?»

L’exclusion de Marc Tarabella démontre l’inconséquence du PS


Le député européen et bourgmestre socialiste d’Anthisnes, Marc Tarabella, est désormais écarté de l’Alliance Progressiste des Socialiste et Démocrates au Parlement européen, où il siège depuis 2004, et il est, par surcroît, exclu du Parti Socialiste. Une exclusion temporaire, a-t-on expliqué au Boulevard de l’Empereur, jusqu’au moment où l’enquête sur la corruption au Parlement européen aura conduit soit à son inculpation, soit à son innocence.

Les «révélations», ou pseudo-révélations du «repenti» italien, Pier Antonio Panzeri, l’ont, il est vrai, gravement mis en cause ces derniers jours: à en croire certaines fuites, son ancien collègue au Parlement européen l’accuserait d’avoir perçu 120000 euros en provenance du Qatar. Et Panzeri, dans le même temps, a complètement innocenté Marie Arena, compromise elle aussi par un voyage dans l’émirat qu’elle avait opportunément omis de déclarer.

Marc Tarabella s’est-il laissé acheter? L’enquête devra le démontrer. La perquisition menée tambour battant à son domicile n’a en tout cas pas laissé apparaître le moindre pactole. Et ses concitoyens d’Anthisnes ont peine à croire que leur bourgmestre, resté très proche d’eux, ait ainsi cédé à une offre sonnante et trébuchante.

Pour l’heure, Marc Tarabella, mis en cause par des «fuites», n’est pas inculpé…

Pour ma part, pour bien connaître Marc Tarabella depuis de très nombreuses années, j’avoue que je serais à la fois très surpris et très cruellement déçu si l’enquête, au bout du compte, démontrait que s’il a changé d’opinion sur l’organisation du dernier championnat du Monde de football au Qatar, c’est après s’être laissé convaincre par une valise de billet. Jusqu’à preuve du contraire, je m’accroche à la présomption d’innocence dont bénéficie chaque inculpé. Et je rappelle qu’à l’heure présente, le bourgmestre d’Anthisnes, qui a déjà réclamé à plusieurs reprises d’être entendu par Michel Claisse, le juge d’instruction en charge du dossier, n’est toujours pas inculpé.

La précipitation avec laquelle le Parti Socialiste l’a exclu, fût-ce de manière temporaire, n’en est dès lors que plus choquante. Et pose question sur la manière dont le PS exclut ou non ses membres. Une manière en apparence très arbitraire, qui semble essentiellement relever du bon vouloir du prince, entendez, du président du parti, Paul Magnette.

Comme le rappelait avec beaucoup de pertinence Bertrand Henne, ce matin, sur La Première, le Parti Socialiste ne respecte en rien les règles qu’il avait édictées, il y a plusieurs années, quand avaient éclaté les affaires dites de Charleroi. Celles qui avaient conduit le président du parti de l’époque, Elio Di Rupo, à jeter qu’il en avait «marre des parvenus» (sic)!

En principe, selon ces règles, tout mandataire inculpé devait être exclu du PS. Mais rapidement, il est apparu qu’une inculpation pouvait déboucher sur un non-lieu, voire un acquittement. Dès lors, la règle a été illico vidée de sens.

Il arrive néanmoins que des inculpés finissent par être condamnés. Ce fut le cas, récemment, de M. Jean-Charles Luperto, définitivement condamné dans une affaire de mœurs. Oui, mais hum, Jean-Charles Luperto est un gros faiseur de voix à Sambreville, et l’exclure risquait de le voir conduire, en 2024, une liste du bourgmestre qui aurait privé le PS du mayorat dans une ville importante de la province de Namur. On a donc inventé une excuse selon laquelle cette condamnation n’est en rien liée à l’exercice d’un mandat politique (!), et on a oublié la «blague» qu’il avait faite auparavant à son collègue de Jemeppe-sur Sambre, qu’il avait menacé de mort, en estimant que cette plaisanterie lui avait coûté un mandat ministériel. Le camarade reste donc un camarade. «Je suis le champion de l’éthique» a expliqué le président du PS, ce jeudi soir, au JT de La Une, juste avant la séance des vœux de son parti. On doit donc en conclure que, pour lui, se poster dans les toilettes d’une station d’autoroute, en quête d’une relation homosexuelle furtive est un acte parfaitement éhique…

Stéphane Moreau, ancien bourgmestre d’Ans et ex-patron de Nethys, a, lui, été exclu du PS en avril 2017, en pleine révélation des manœuvres financières et d’une fraude à l’assurance qui lui avaient bénéficié. L’ancien député provincial sérésien André Gilles, ex-président du conseil d’administration de l’intercommunale Publifin, aujourd’hui Tecteo, dont dépendait Nethys, a été lui aussi exclu en même temps du parti: la règle vide de sens a été appliquée à leur endroit, sans que personne la remette en cause. Pour rappel, à nouveau, à l’heure présente, Marc Tarabella n’est pas inculpé dans le «Qatargate».

Il y a un an Alain Mathot, l’ancien député-bourgmestre de Seraing, condamné pour corruption, a préféré, lui, se retirer du PS, avant de subir une exclusion qui lui semblait devenue inévitable.

Et puis il y a eu les exclusions pour cause de divergence politique avec certains mandataires. Emir Kir, le populaire député-bourgmestre de Saint-Josse a été «dégommé» pour son refus de reconnaître le génocide arménien et pour sa proximité avec des «Loups gris», la milice d’extrême-droite turque. Son exclusion temporaire, largement approuvée, va bientôt prendre fin… sans qu’on sache si, sur le génocide arménien, sa position ait évolué. Lui aussi est une «machine à voix»…

La bourgmestre de Verviers, Muriel Targnion, et son échevin des Finances, Alexandre Loffet, ont, eux été exclus, en violation des règles internes du PS soit dit au passage, parce qu’ils n’étaient pas revenus sur leur signature au bas d’une motion reniée, sous pression, par certain(e)s de leurs ancien(ne)s colistier(e)s, demandant le retrait du mandat d’un président du CPAS, lui aussi PS, dont le comportement politique posait problème à la gestion de l’ancienne cité lainière. La tentative de mettre un autre bourgmestre de consensus, feu Jean-François Istasse, à la place de Muriel Targnion, ayant échoué, le-dit président du CPAS a tout de même été écarté. Et dernier épisode en date, Alexandre Loffet, ancien président de la fédération verviétoise du PS, qui devait démissionner en ce début d’année pour faire place à un(e) socialiste «orthodoxe»…. a été réintégré au parti. Manière de lui éviter de nouveaux déchirements.

La jurisprudence du Parti Socialiste, on le voit, est à géométrie (très) variable, et le tort principal de Marc Tarabella est sans doute d’être le bourgmestre d’une… petite commune condruzienne, et de ne pas peser suffisamment lourd. Comme l’écrivait déjà Jean de la Fontaine, selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous feront blanc ou noir…

Charles III n’a pas la cote au Québec


Des élus québécois ont refusé de prêter serment de fidélité à Charles III

Largement ignorées par les médias de notre petite terre d’héroïsme, les récentes élections législatives au Québec ont vu la majorité du Premier ministre François Legault (CAQ-Coalition Avenir Québec) largement reconduite à la faveur d’un système de représentation particulièrement favorable et largement contesté. Mais l’événement de cette rentrée parlementaire a été constitué par le refus des élus du Parti Québécois et aussi de Québec Solidaire refuser de prêter le serment de fidélité à Charles III.

Le nouveau roi du Royaume-Uni est en effet toujours le chef d’État nominal d’une série d’anciennes colonies britanniques, dont le Canada. Une situation qui reste en travers de la gorge des indépendantistes québécois, mais aussi, c’est intéressant à noter, des représentant(e)s de Québec Solidaire, conduits par l’ancien leader étudiant Gabriel Nadeau-Dubois.

Gabriel Nadeau-Dubois et les élu(e)s de Québec Solidaire vont-ils ajouter un serment à celui qu’ils ont prêté?

Ces députés « rebelles » ne sont que partiellement installés. Certains mandataires de Québec Solidaire seraient, à en croire la presse québécoise, prêts à ajouter le serment de fidélité au souverain britannique à leur serment initial lors d’une prochaine séance.

Ce ne sera en tout cas pas le cas des élus indépendantistes, héritiers de celles et ceux qui ont commémoré le passage sous le joug anglophone, qui ont acclamé le général de Gaulle venir saluer « Le Québec libre » et puis qui ont pris en matière linguistique des mesures de protection… largement semblables à celles qu’a prises la Flandre en la matière.

La balle sera alors dans le camp de la CAQ, qui vient elle-même de faire passer une loi de défense supplémentaire de la langue de Voltaire, et qui risque de se trouver confrontée à un dilemme: refuser des élus du peuple, ou accepter un serment qui fasse l’impasse sur la fidélité au roi du Royaume-Uni!

Le Parti Québécois de Paul St-Pierre Plamondon n’en démordra pas

Globalement, on ne peut que saluer la cohérence des élus du Parti Québécois, conduits par leur jeune leader Paul Saint-Pierre Plamondon.

Il est sûrement temps,pour le Canada de mettre fin à ce lien de dépendance qui date d’un autre âge, et dont d’autres anciennes colonies britanniques se sont déjà débarrassées ou semblent prêtes à le faire, comme l’Australie.

Ce combat est d’autant plus vivace au Québec où la cession de la « Belle province » par la France au Royaume-Uni par la France, au XVIIIeme siècle a pris des allures d’asservissement.

Et puis, globalement, quoi qu’en disent les thuriféraires des monarchies, notamment sur la chaîne télévisée publique francophone, le régime monarchique, par nature, est profondément non-démocratique, et donc particulièrement suranné…

L’Europe s’est-elle résignée à l’extrême-droite?


Les sondages l’avaient annoncé: Fratelli d’Italia, la formation d’extrême-droite présidée par Giorgia Meloni, est sortie en tête des suffrages en Italie, ce dernier week-end. Forte de sa coalition avec la Lega, de Matteo Salvini qu’on sent impatient de rejeter à nouveau à la mer, et à une mort probable, les migrants qui abordent dans les ports italiens; et avec Forza Italia, le parti créé par un Silvio Berlusconi qui, à 85 ans, prend de plus en plus des airs de momie de cire, elle va donc devenir la première femme à présider un gouvernement en Italie. Pour le meilleur… et pour le pire?

Pour la première fois depuis l’éviction du Duce en 1943, et malgré sa Constitution qui proscrit le fascisme, l’Italie va ainsi être dirigée par une authentique facho!

Certes, Giorgia Meloni a lissé son discours au cours de la récente campagne électorale. Mais France 3 a opportunément ressorti l’interview d’une jeune militante d’extrême-droite de 19 ans, qui avait été réalisée à Rome, en 1996. La jeune Giorgia Meloni, parce c’était bien d’elle qu’il s’agissait, pas encore teinte en blonde peroxydée, y professait son admiration pour Benito Mussolini, «un bon politicien, parce que tout ce qu’il a fait, il l’a fait pour l’Italie», clamait la militante de l’Alianza Nazionale.

La jeune militante d’Alianza Nazionale Giorgia Meloni ne cachait pas son admiration pour Benito Mussolini

On ne sait à quoi elle faisait allusion. À l’assassinat de Giacomo Matteoti? Bon pour l’Italie? Aux crimes de guerre commis par l’Italie fasciste en Éthiopie, avec l’utilisation massive de gaz de combat? Profitables à l’Italie? Aux lois anti-juives? Positives pour l’Italie? Au soutien au coup d’État militaire du général Franco en Espagne? Bénéfique pour l’Italie? Ou à l’alliance avec l’Allemagne hitlérienne? La ruine de l’Italie, en 1944, oppose le démenti le plus formel à cette opinion.

Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis, m’objectera-t-on. Sur ce plan, Giorgia Meloni doit être une dirigeante géniale, car, entre ses récents discours, et ses prises de position lors de la campagne électorale, hors son hostilité à l’invasion de la Russie par l’Ukraine, elle a singulièrement changé de caps!

Reste à savoir dans quelle mesure, ses dernières prises de position sont sincères. Au Parlement européen, les élu(e)s de son parti se sont surtout distingué(e)s par leur opposition aux textes pénalisant les discriminations basées sur le sexe, l’orientation sexuelle ou le genre, mais aussi à un texte prônant… l’égalité salariale entre hommes et femmes. Et en matière d’immigration, elle ne le cède en rien à Matteo Salvini, dont le recul a été proportionnel à la progression de Fratelli d’Italia: c’est peut-être la seule bonne nouvelle (relative) de ce scrutin.

Sa récente profession de foi européenne procède, elle, sans doute surtout de la crainte de voir l’Italie perdre les larges subsides européens qui lui sont promis, pour renflouer une économie lourdement frappée par la pandémie de Covid-19.

Stigmatiser l’Italie n’aurait toutefois guère de sens dans une Europe où le Rassemblement National, en France, a été présent au deuxième tour de l’élection présidentielle en 2017 comme en 2019, et surtout, à l’occasion des récentes élections législatives, a envoyé un nombre record de députés au Palais Bourbon.

L’alliance nouée par les démocrates-chrétiens avec le parti du défunt Jörg Haider en Autriche avait scandalisé l’Europe en 1999

L’Europe ne stigmatisera pas l’Italie comme elle l’avait fait de l’Autriche, en 1999, quand pour la première fois, l’extrême-droite avait été associée au pouvoir lorsque le chancelier Wolfgang Schüssel (ÖVP) avait fait alliance avec le défunt leader du FPÖ, Jörg Haider, poussant notamment le commissaire européen belge, Louis Michel, à proposer le boycott de l’Autriche comme lieu de vacances. Le pays, alors, avait été placé «sous surveillance» européenne. Et lorsque, en 2002, Jean-Marie Le Pen, leader du Front National, s’était qualifié à la surprise générale pour affronter Jacques Chirac au second tour de l’élection présidentielle française, les foules étaient descendues dans la rue, et la gauche avait sans équivoque donné un mot d’ordre pour lui barrer la route.

Mais depuis lors, le Fidesz de Viktor Orban s’est imposé à Budapest, et y a systématiquement rogné les libertés publiques. La Pologne s’est ingéniée à museler l’indépendance de son pouvoir judiciaire. Les Pays-Bas ont connu la percée de Pim Fortuyn et aujourd’hui de Thierry Baudet. Au Danemark, le Parti populaire a soutenu des gouvernements de 1997 à 2011 et de 2015 à 2019, et a surtout réussi à faire partager ses idées nauséabondes en matière d’immigration. Et dernièrement, en Suède, les mal-nommés Démocrates de Suède ont fait un triomphe électoral et se préparent à gouverner avec la droite classique.

Comment comprendre cette banalisation de l’extrême-droite en Europe? C’est sans doute en partie parce que les repères politiques se sont largement estompés, spécialement dans des démocraties comme la nôtre où les gouvernements doivent se reposer sur des coalitions.

La conception «utilitaire» de la politique de nombre d’électrices et d’électeurs qui ne votent plus en fonction d’une vision de la société, mais pour que les élu(e)s solutionnent «leurs» problèmes, et les sanctionnent donc d’office d’un scrutin à l’autre, parce que cette tâche est hors de leur portée, peut également intervenir.

Mais ce qui était vrai en Autriche en 1999, et l’est toujours dans l’Italie de 2022, ce qui banalise aussi l’extrême-droite, c’est la complaisance d’une droite classique (Wolfgang Schüssel à l’époque, Silvio Berlusconi aujourd’hui; ou des élus LR en France, qui courent derrière le Rassemblement National dans l’espoir de lui ravir ses électeurs), qui réchauffe elle-même «le ventre fécond d’où est sorti la bête immonde», comme l’écrivait Bertolt Brecht.

À l’inverse, depuis le «dimanche noir» de 1991, en Flandre, le «cordon sanitaire» tendu au tour du Vlaams Blok puis du Vlaams Belang par les formations démocratiques, a réussi jusqu’ici à empêcher l’extrême-droite flamande de venir polluer à l’excès le paysage politique belge. Mais il y a lieu de rester vigilant. Après les dernières élections, Bart De Wever, le président à vie (?) de la N-VA, a courtisé son rival d’extrême-droite avant de se raviser. Et les sondages donnent la première place au Vlaams Belang en Flandre, si les élections étaient pour demain. Même s’il sort en tête des urnes, en 2026, le cordon sanitaire s’imposera pourtant plus que jamais!